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ARGUMENT

Le livre de la Genèse a été ainsi nommé, parce que Moïse y décrit l'origine de toutes choses. Il commence par la création du monde et il s'étend jusqu'à la mort de Joseph, ce qui comprend l'espace d'environ 2400 ans.

Chapitres  CHAPITRE I.  CHAPITRE II.  CHAPITRE III.  CHAPITRE IV.   CHAPITRE V.  CHAPITRE VI.  CHAPITRE VII.  CHAPITRE VIII.   CHAPITRE IX.  CHAPITRE X.   CHAPITRE XI.   CHAPITRE XII. CHAPITRE XIII.  CHAPITRE XIV.   CHAPITRE XV.   CHAPITRE XVI. CHAPITRE XVII.  CHAPITRE XVIII.  CHAPITRE XIX.   CHAPITRE XX.  CHAPITRE XXI.  CHAPITRE XXII.  CHAPITRE XXIII.  CHAPITRE XXIV.   CHAPITRE XXV.   CHAPITRE XXVI.   CHAPITRE XXVII.  CHAPITRE XXVIII.  CHAPITRE XXIX. CHAPITRE XXX.   CHAPITRE XXXI. CHAPITRE XXXII.  CHAPITRE XXXIII.  CHAPITRE XXXIV.  CHAPITRE XXXV.   CHAPITRE XXXVI.   CHAPITRE XXXVII. CHAPITRE XXXVIII.   CHAPITRE XXXIX.  CHAPITRE XL.   CHAPITRE XLI.   CHAPITRE XLII.   CHAPITRE XLIII.   CHAPITRE XLIV.   CHAPITRE XLV. CHAPITRE XLVI.   CHAPITRE XLVII.   CHAPITRE XLVIII. CHAPITRE XLIX.   CHAPITRE L. LIVRES DU VIEUX TESTAMENT.

 CHAPITRE I.

Le premier chapitre contient l'histoire de la création du monde. 

1 Dieu créa, au commencement, les cieux et la terre.

2 Et la terre était sans forme et vide, et les ténèbres étaient sur la face de l’abîme, et l’Esprit de Dieu se mouvait sur les eaux.

3 Et Dieu dit : Que la lumière soit ; et la lumière fut.

4 Et Dieu vit que la lumière était bonne ; et Dieu sépara la lumière d’avec les ténèbres.

5 Et Dieu nomma la lumière, Jour ; et les ténèbres, Nuit. Ainsi fut le soir, ainsi fut le matin ; ce fut le premier jour.

6 Puis Dieu dit : Qu'il y ait une étendue entre les eaux ; et qu’elle sépare les eaux d’avec les eaux.

7 Dieu donc fit l’étendue, et sépara les eaux qui sont au-dessous de l’étendue d’avec celles qui sont au-dessus de l’étendue ; et ainsi fut.

8 Et Dieu nomma l’étendue, Cieux. Ainsi fut le soir, ainsi fut le matin ; ce fut le second jour.

9 Puis Dieu dit : Que les eaux qui sont au-dessous des cieux, soient rassemblées en un lieu, et que le sec paraisse ; et ainsi fut.

10 Et Dieu nomma le sec, Terre. Il nomma aussi l’amas des eaux, Mers ; et Dieu vit que cela était bon.

11 Puis Dieu dit : Que la terre pousse son jet, savoir, de l’herbe portant semence, et des arbres fruitiers portant du fruit selon leur espèce, qui aient leur semence en eux-mêmes sur la terre ; et ainsi fut.

12 La terre donc produisit son jet, savoir, de l’herbe portant de la semence selon son espèce, et des arbres portant des fruits, qui avaient leur semence en eux-mêmes, selon leur espèce ; et Dieu vit que cela était bon.

13 Ainsi fut le soir, ainsi fut le matin ; ce fut le troisième jour.

14 Puis Dieu dit : Qu’il y ait des luminaires dans l’étendue des cieux, pour séparer la nuit d’avec le jour, et qui servent de signes, et pour les saisons, et pour les jours, et pour les années ;

15 Et qui soient pour luminaires dans l’étendue des cieux, afin de luire sur la terre ; et ainsi fut.

16 Dieu donc fit deux grands luminaires ; le plus grand luminaire, pour dominer sur le jour, et le moindre, pour dominer sur la nuit ; il fit aussi les étoiles.

17 Et Dieu les mit dans l’étendue des cieux, pour luire sur la terre ;

18 Et pour dominer sur le jour et sur la nuit, et pour séparer la lumière d’avec les ténèbres ; et Dieu vit que cela était bon.

19 Ainsi fut le soir, ainsi fut le matin ; ce fut le quatrième jour.

20 Puis Dieu dit : Que les eaux produisent en toute abondance des animaux qui se meuvent et qui aient vie ; et que les oiseaux volent sur la terre, vers l’étendue des cieux.

21 Dieu créa donc les grands poissons, et tous les animaux vivants et qui se meuvent, que les eaux produisirent en toute abondance, selon leur espèce, et tout oiseau ayant des ailes, selon son espèce ; et Dieu vit que cela était bon.

22 Et Dieu les bénit, disant : Croissez et multipliez, et remplissez les eaux dans les mers ; et que les oiseaux multiplient sur la terre.

23 Ainsi fut le soir, ainsi fut le matin ; ce fut le cinquième jour.

24 Puis Dieu dit : Que la terre produise des animaux vivants selon leur espèce : les animaux domestiques, les reptiles et les bêtes de la terre selon leur espèce ; et ainsi fut.

25 Dieu donc fit les bêtes de la terre selon leur espèce, les animaux domestiques, et les reptiles de la terre selon leur espèce ; et Dieu vit que cela était bon.

26 Puis Dieu dit : Faisons l’homme à notre image, selon notre ressemblance, et qu’il domine sur les poissons de la mer, sur les oiseaux des cieux, sur les animaux domestiques, et sur toute la terre, et sur tout reptile qui rampe sur la terre.

27 Dieu donc créa l’homme à son image ; il le créa à l’image de Dieu ; il les créa mâle et femelle.

28 Et Dieu les bénit, et leur dit : Croissez et multipliez, et remplissez la terre, et l’assujettissez, et dominez sur les poissons de la mer, et sur les oiseaux des cieux, et sur toute bête qui se meut sur la terre.

29 Et Dieu dit : Voici, je vous ai donné toute herbe portant semence, et qui est sur toute la terre ; et tout arbre qui a en soi du fruit d’arbre portant semence ; ce qui vous sera pour nourriture.

30 Mais j’ai donné à toutes les bêtes de la terre, et à tous les oiseaux des cieux, et à tout ce qui se meut sur la terre, qui a vie en soi, toute herbe verte pour manger ; et ainsi fut.

31 Et Dieu vit tout ce qu’il avait fait, et voilà, il était très bon. Ainsi fut le soir, ainsi fut le matin ; ce fut le sixième jour.

REFLEXIONS

Le premier chapitre de la Genèse nous enseigne la première vérité de la religion : c'est qu'il y a un Dieu qui a créé le Ciel et la terre et toutes les choses qui y sont, que c’est lui qui a donné à toutes les créatures la nature et les qualités qu’elles ont et que c’est par sa volonté que le monde subsiste dans l'ordre admirable que l'on y remarque.

Mais nous apprenons surtout dans ce chapitre que Dieu a fait l'homme à son image, qu'il lui a donné la domination sur les autres créatures et une âme spirituelle et immortelle capable de connaître et d'aimer son créateur.

Ainsi notre devoir est de reconnaître et d'adorer la puissance, la grandeur et la sagesse de Dieu qui paraissent dans tous ses ouvrages, de célébrer sa bonté envers nous et de lui rendre continuellement les actions de grâces, l'amour et l'obéissance que nous lui devons si justement.

CHAPITRE II.

Dieu, après avoir créé le monde en six jours, consacre le septième jour. Il met Adam dans le paradis terrestre et il lui défend de manger du fruit d’un arbre qui est appelé l’arbre de la connaissance du bien et du mal. Il crée la femme et institue le mariage.

1 Les cieux donc et la terre furent achevés et toute leur armée.

2 Et Dieu eut achevé au septième jour l’œuvre qu’il avait faite ; et il se reposa au septième jour de toute l’œuvre qu’il avait faite.

3 Et Dieu bénit le septième jour, et il le sanctifia, parce qu’en ce jour-là il s’était reposé de toute l’œuvre qu’il avait créée pour être faite.

4 Telles sont les origines des cieux et de la terre, lorsqu’ils furent créés, quand l’Eternel Dieu fit la terre et les cieux ;

5 Et toutes les plantes des champs, avant qu’il y en eût en la terre, et toutes les herbes des champs, avant qu’elles eussent poussé. Car l’Eternel Dieu ne faisait point pleuvoir sur la terre, et il n’y avait point d’homme pour cultiver la terre.

6 Et aucune vapeur ne montait de la terre, qui arrosât toute la surface de la terre.

7 Or, l’Eternel Dieu avait formé l’homme de la poudre de la terre, et il avait soufflé dans ses narines une respiration de vie ; et l’homme fut fait en âme vivante.

8 L’Eternel Dieu avait aussi planté un jardin en Héden du côté de l’orient, et il y avait mis l’homme qu’il avait formé.

9 Et l’Eternel Dieu avait fait germer de la terre tout arbre désirable à la vue, et bon à manger, et l’arbre de vie au milieu du jardin, et l’arbre de la connaissance du bien et du mal.

10 Et un fleuve sortait d’Héden pour arroser le jardin ; et de là il se divisait en quatre fleuves.

11 Le nom du premier est Pisçon ; c’est celui qui coule dans tout le pays de Havila, où l’on trouve de l’or.

12 Et l’or de ce pays-là est bon ; c’est là aussi que se trouve le Bdellion, et la pierre d’Onyx.

13 Et le nom du second fleuve est Guihon ; c’est celui qui coule dans tout le pays de Cus.

14 Et le nom du troisième fleuve est Hiddekel ; c’est celui qui coule vers l’Orient de l’Assyrie. Et le quatrième fleuve est l’Euphrate.

15 L’Eternel Dieu prit donc l’homme et le plaça dans le jardin d’Héden, pour le cultiver et pour le garder.

16 Puis l’Eternel Dieu commanda à l’homme, disant : Tu mangeras librement de tout arbre du jardin.

17 Toutefois, pour ce qui est de l’arbre de la connaissance du bien et du mal, tu n’en mangeras point ; car au jour que tu en mangeras, tu mourras.

18 Or, l’Éternel Dieu avait dit : Il n’est pas bon que l’homme soit seul ; je lui ferai une aide semblable à lui.

19 Car l’Éternel Dieu avait formé de la terre toutes les bêtes des champs, et tous les oiseaux des cieux ; puis il les avait fait venir vers Adam, afin qu’il vît comment il les nommerait, et que le nom qu’Adam donnerait à tout animal vivant, fut son nom.

20 Et Adam donna les noms à tous les animaux domestiques, et aux oiseaux des cieux, et à toutes les bêtes des champs ; mais il ne se trouvait point d’aide pour Adam qui fût semblable à lui.

21 Et l’Éternel Dieu fit tomber un profond sommeil sur Adam, et il s’endormit ; et Dieu prit une de ses côtes, et il resserra la chair à la place.

22 Et l’Éternel Dieu forma une femme de la côte qu’il avait prise d’Adam, et la fit venir vers Adam.

23 Alors Adam dit : A cette fois celle-ci est l’os de mes os, et la chair de ma chair. On la nommera hommesse, car elle a été prise de l’homme.

24 C’est pourquoi l’homme laissera son père et sa mère, et il se joindra à sa femme, et ils seront une même chair.

25 Or, Adam et sa femme étaient tous deux nus, et ils n’en avaient point de honte.

REFLEXIONS
Nous devons remarquer trois choses dans ce chapitre :

I. La première, que le monde ayant été créé en six jours, Dieu se reposa le septième jour et qu'il le consacra afin que la célébration du jour de repos servît dans la suite à conserver parmi les hommes la mémoire de la création du monde.

II. Il faut remarquer, en second lieu, qu'Adam fut mis dans le paradis terrestre pour y être heureux et que Dieu pour éprouver son obéissance lui donna une loi accompagnée de menaces en lui défendant sous peine de mort de manger du fruit de l'arbre de la connaissance du bien et du mal. Cette conduite de Dieu marque sa grande bonté envers l'homme innocent, mais cela montre aussi que l'homme ne pouvait pas être indépendant, qu'il était obligé de se soumettre aux lois de son créateur et que ce n'était que par l'obéissance qu'il pouvait avoir part aux effets de l'amour de Dieu.

III. En troisième, ce que Moïse rapporte de l'institution du mariage nous engage à reconnaître la grande sagesse et la bonté de Dieu qui paraissent dans cet ordre qu'il établit au commencement pour la conservation et pour le bien du genre humain. Cela nous oblige à respecter le mariage comme un état sacré et dont Dieu est l'auteur et à nous éloigner de tout ce qui est contraire à une si sainte institution et particulièrement de l'impureté et de toute sorte de souillure.

 CHAPITRE III.

Après que Moïse a rapporté l'histoire de la création du monde, il récite dans ce chapitre : I. Comment Adam et Ève tombèrent dans le péché. II. Comment Dieu les punit en les assujettissant aux misères de cette vie et à la mort et en les chassant du paradis terrestre.

 1 Or, le serpent était le plus fin de tous les animaux des champs que l’Éternel Dieu avait faits ; et il dit à la femme : Quoi ? Dieu aurait-il dit : Vous ne mangerez point de tout arbre du jardin ?

2 Et la femme répondit au serpent : Nous mangeons du fruit des arbres du jardin.

3 Mais quant au fruit de l’arbre qui est au milieu du jardin, Dieu a dit : Vous n’en mangerez point, et vous ne le toucherez point, de peur que vous ne mouriez.

4 Alors le serpent dit à la femme : Vous ne mourrez nullement ;

5 Mais Dieu sait qu’au jour que vous en mangerez, vos yeux seront ouverts, et vous serez comme des dieux, connaissant le bien et le mal.

6 La femme donc voyant que le fruit de l’arbre était bon à manger, et qu’il était agréable à la vue, et que cet arbre était désirable pour donner de la science, en prit du fruit et en mangea, et en donna aussi à son mari, qui était avec elle, et il en mangea.

7 Et les yeux de tous deux furent ouverts ; et ils connurent qu’ils étaient nus ; et ils cousirent ensemble des feuilles de figuier, et ils s’en firent des ceintures.

8 Alors ils ouïrent, au vent du jour, la voix de l’Éternel Dieu, qui se promenait par le jardin. Et Adam et sa femme se cachèrent de devant la face de l’Éternel Dieu, parmi les arbres du jardin.

9 Mais l’Éternel Dieu appela Adam, et lui dit : Où es-tu ?

10 Et il répondit : J’ai entendu ta voix dans le jardin, et j’ai craint, parce que j’étais nu ; et je me suis caché.

11 Et Dieu dit : Qui t’a montré que tu étais nu ? N’as-tu pas mangé de l’arbre duquel je t’avais défendu de manger ?

12 Et Adam répondit : La femme que tu m’as donnée pour être avec moi, m’a donné du fruit de l’arbre, et j’en ai mangé.

13 Et l’Éternel Dieu dit à la femme : Pourquoi as-tu fait cela ? Et la femme répondit : Le serpent m’a séduite, et j’en ai mangé.

14 Alors l’Éternel Dieu dit au serpent : Parce que tu as fait cela, tu seras maudit entre tous les animaux et entre toutes les bêtes des champs ; tu marcheras sur ton ventre, et tu mangeras la poussière tous les jours de ta vie.

15 Et je mettrai de l’inimitié entre toi et la femme ; entre ta postérité et la postérité de la femme : cette postérité t’écrasera la tête et tu la blesseras au talon.

16 Et il dit à la femme : J’augmenterai beaucoup ton travail et ta grossesse, et tu enfanteras en travail les enfants ; tes désirs se rapporteront à ton mari, et il dominera sur toi.

17 Puis il dit à Adam : Parce que tu as obéi à la parole de ta femme, et que tu as mangé de l’arbre duquel je t’avais donné ce commandement, disant : Tu n’en mangeras point, la terre sera maudite à cause de toi ; tu en mangeras en travail tous les jours de ta vie.

18 Et elle te produira des épines et des chardons ; et tu mangeras l’herbe des champs.

19 Tu mangeras le pain à la sueur de ton visage, jusqu’à ce que tu retournes en la terre, d’où tu as été pris ; car tu es poudre et tu retourneras en poudre.

20 Et Adam appela sa femme Ève, parce qu’elle a été la mère de tous les vivants.

21 Et l’Éternel Dieu fit à Adam et à sa femme des robes de peaux, et les en revêtit.

22 Et l’Éternel Dieu dit : Voici, l’homme est devenu comme l’un de nous, sachant le bien et le mal. Mais maintenant il faut prendre garde qu’il n’avance sa main, et ne prenne aussi de l’arbre de vie, et qu’il n’en mange et ne vive à toujours.

23 Et l’Éternel Dieu le fit sortir du jardin d’Héden, pour labourer la terre de laquelle il avait été pris.

24 Ainsi il chassa l’homme, et il logea des Chérubins vers l’Orient du jardin d’Héden, avec une lame d’épée de feu, qui se tournait çà et là pour garder le chemin de l’arbre de vie.

REFLEXIONS
Le but de ce chapitre est de nous apprendre comment le péché et la mort sont entrés dans le monde et cette histoire du péché d’Adam a été rédigée par écrit afin qu’il parût que Dieu n’est pas l’auteur du péché, mais que l’homme y est tombé volontairement et par sa faute. Outre cela, on voit dans la chute de notre premier père combien il est dangereux de ne pas croire ce que Dieu a dit, de prêter l'oreille aux tentations et de suivre les désirs de la chair et avec quel soin nous devons veiller sur nous-mêmes et obéir à toutes les lois du Seigneur, même dans les choses qui paraissent de moindre importance. Ce qui arriva à Adam et à Ève après leur péché et la punition que Dieu leur infligea en les assujettissant aux misères de cette vie et à la mort et en les chassant du jardin d'Éden fait voir que les menaces de Dieu ne sont jamais vaines et qu’il ne peut laisser la désobéissance de l'homme impunie. Mais Dieu fit paraître en même temps sa miséricorde en promettant, que la semence de la femme écraserait la tête du serpent ; ce qui voulait dire que Dieu délivrerait les hommes du péché et de la mort qui étaient entrés au monde par la séduction du diable. Nous devons bénir Dieu de ce qu'il a accompli cette promesse en envoyant Jésus-Christ pour détruire les œuvres du démon et pour nous procurer l’entrée dans le paradis céleste où il nous prépare un bonheur qui ne finira jamais.

CHAPITRE IV.

Moïse récite la naissance de Caïn et d’Abel, le meurtre que Caïn commit en tuant Abel son frère et la punition de Caïn. Il fait ensuite le dénombrement des descendants de Caïn et il rapporte la naissance de Seth qui fut un autre fils d’Adam et de qui les patriarches sont descendus.

1 Or, Adam connut Ève, sa femme, et elle conçut et enfanta Caïn, et elle dit : J’ai acquis un homme par l’Éternel.

2 Elle enfanta encore Abel son frère ; et Abel fut berger, et Caïn laboureur.

3 Or, il arriva au bout de quelque temps que Caïn offrit à l’Éternel en oblation des fruits de la terre ;

4 Et qu’Abel aussi offrit des premiers-nés de son troupeau et de leur graisse. Et l’Éternel eut égard à Abel et à son oblation.

5 Mais il n’eut point égard à Caïn, ni à son oblation ; et Caïn fut irrité, et son visage en fut abattu.

6 Et l’Éternel dit à Caïn : Pourquoi es-tu en colère, et pourquoi ton visage est-il abattu ?

7 Si tu fais bien, ne sera-t-il pas reçu ? Mais si tu ne fais pas bien, la peine du péché est à la porte. Or, ses désirs se rapportent à toi ; et il sera sous ta puissance.

8 Et Caïn parla à Abel son frère. Et comme ils étaient aux champs, Caïn s’éleva contre Abel son frère, et le tua.

9 Et l’Éternel dit à Caïn : Où est Abel ton frère ? Et il lui répondit : Je ne sais : suis-je le gardien de mon frère, moi ?

10 Et Dieu dit : Qu’as-tu fait ? La voix du sang de ton frère crie de la terre jusqu’à moi.

11 Maintenant donc tu seras maudit, même par la terre, qui a ouvert sa bouche pour recevoir de ta main le sang de ton frère.

12 Quand tu laboureras la terre, elle ne te rendra plus son fruit ; tu seras aussi vagabond et fugitif sur la terre.

13 Et Caïn dit à l’Éternel : Ma peine est plus grande que je ne puis porter.

14 Voici, tu m’as chassé aujourd’hui de dessus cette terre, et je serai caché de devant ta face, et je serai vagabond et fugitif sur la terre ; et il arrivera que quiconque me trouvera, me tuera.

15 Et l’Éternel lui dit : Partant quiconque tuera Caïn, sera puni sept fois au double. Et l’Éternel mit une marque sur Caïn, afin que quiconque le trouverait, ne le tuât point.

16 Alors Caïn sortit de devant la face de l’Éternel, et habita au pays de Nod, vers l’Orient d’Héden.

17 Puis Caïn connut sa femme, qui conçut et enfanta Hénoc ; et il bâtit une ville, qu’il appela Hénoc, du nom de son fils.

18 Puis Hirad naquit à Hénoc, et Hirad engendra Méhujaël, et Méhujaël engendra Méthusçaël, et Méthusçaël engendra Lémec.

19 Et Lémec prit deux femmes : le nom de l’une était Hada, et le nom de l’autre Tsilla.

20 Et Hada enfanta Jabal, qui fut père de ceux qui demeurent dans les tentes, et des pasteurs.

21 Et le nom de son frère fut Jubal, qui fut père de tous ceux qui touchent le violon et les orgues.

22 Et Tsilla aussi enfanta Tubal-Caïn, qui forgeait toutes sortes d’instruments d’airain et de fer ; et la sœur de Tubal-Caïn fut Nahama.

23 Et Lémec dit à Hada et à Tsilla, ses femmes : Femmes de Lémec, entendez ma voix, écoutez ma parole : Je tuerai un homme, si je suis blessé ; même un jeune homme, si je suis meurtri.

24 Car si Caïn est vengé sept fois au double, Lémec le sera soixante-dix-sept fois.

25 Et Adam connut encore sa femme, qui enfanta un fils et l’appela Seth ; car Dieu m’a, dit-elle, donné un autre fils au lieu d’Abel que Caïn a tué.

26 Et un fils naquit aussi à Seth, et il l’appela Enos. Alors on commença à appeler du nom de l’Eternel.

REFLEXIONS
Ce chapitre nous propose deux exemples remarquables :

Le premier est celui d’Abel, lequel, comme le dit St. Paul : offrit par la foi un plus excellent sacrifice que Caïn et obtint le témoignage d’être juste, mais qui nonobstant sa piété fut exposé à l'envie et à la cruauté de son frère qui même le tua. C’est ainsi que Dieu voulut faire voir dès le commencement du monde qu'il n'agrée de service que celui que les gens de bien lui rendent et que cependant il permet quelquefois qu'ils soient opprimés par les méchants, ce qui faisait voir dès lors que ce n’était pas dans cette vie qu’il fallait attendre la récompense de la piété.

L’autre exemple est celui de Caïn dans la personne duquel nous avons une image des impies et de ceux qui haïssent leurs frères, aussi bien que des maux qui arrivent par l'envie et par la jalousie. L’on voit de plus dans les frayeurs dont Caïn fut agité après son crime qu’une mauvaise conscience est ordinairement travaillée par des craintes et par des remords. La généalogie des descendants de Caïn a été conservée pour marquer la distinction qu’il y eut dans la suite entre la postérité impie de Caïn et celle de Seth, fils d’Adam, duquel les patriarches et le Messie sont descendus.

 CHAPITRE V.

Moïse fait dans ce chapitre le dénombrement des patriarches et leur généalogie depuis Adam jusqu’à à Noé.

1 C’est ici le dénombrement de la postérité d’Adam, depuis le jour que Dieu créa l’homme et qu’il le fit à sa ressemblance.

2 Il les créa donc mâle et femelle, et il les bénit, et il leur donna le nom d’Homme, au jour qu’ils furent créés.

3 Ainsi Adam vécut cent trente ans, et engendra un fils à sa ressemblance, selon son image, et il lui donna le nom de Seth.

4 Et les jours d’Adam, après qu’il eut engendré Seth, furent huit cents ans ; et il engendra des fils et des filles.

5 Tout le temps donc qu’Adam vécut, fut neuf cent trente ans ; puis il mourut.

6 Seth aussi vécut cent cinq ans, et engendra Enos.

7 Et Seth vécut, après qu’il eut engendré Enos, huit cent sept ans ; et il engendra des fils et des filles.

8 Tout le temps donc que Seth vécut, fut neuf cent douze ans ; puis il mourut.

9 Et Enos ayant vécu quatre-vingt-dix ans, engendra Kénan.

10 Et Enos, après qu’il eut engendré Kénan, vécut huit cent quinze ans ; et il engendra des fils et des filles.

11 Tout le temps donc qu’Enos vécut, fut neuf cent cinq ans ; puis il mourut.

12 Et Kénan ayant vécu soixante et dix ans, engendra Mahalaléel.

13 Et Kénan, après qu’il eut engendré Mahalaléel, vécut, huit cent quarante ans ; et il engendra des fils et des filles.

14 Tout le temps donc que Kénan vécut, fut neuf cent dix ans ; puis il mourut.

15 Mahalaléel aussi vécut soixante-cinq ans, et il engendra Jéred.

16 Et Mahalaléel, après qu’il eut engendré Jéred, vécut huit cent trente ans ; et il engendra des fils et des filles.

17 Tout le temps donc que Mahalaléel vécut, fut huit cent quatre-vingt-quinze ans ; puis il mourut.

18 Et Jéred ayant vécu cent soixante-deux ans, engendra Hénoc.

19 Et Jéred, après avoir engendré Hénoc, vécut huit cents ans ; et il engendra des fils et des filles.

20 Tout le temps donc que Jéred vécut, fut neuf cent soixante-deux ans ; puis il mourut.

21 Hénoc aussi vécut soixante-cinq ans, et engendra Méthusela.

22 Et Hénoc, après qu’il eut engendré Méthusela, marcha avec Dieu trois cents ans ; et il engendra des fils et des filles.

23 Tout le temps donc qu’Hénoc vécut, fut trois cent soixante-cinq ans.

24 Ainsi Hénoc chemina avec Dieu, et il ne parut plus, parce que Dieu le prit.

25 Et Méthusela ayant vécu cent quatre-vingt-sept ans, engendra Lémec.

26 Et Méthusela, après qu’il eut engendré Lémec, vécut sept cent quatre-vingt-deux ans ; et il engendra des fils et des filles.

27 Tout le temps donc que Méthusela vécut, fut neuf cent soixante-neuf ans ; puis il mourut.

28 Lémec aussi vécut cent quatre-vingt-deux ans, et il engendra un fils.

29 Et il l’appela Noé, en disant : Celui-ci nous soulagera de notre œuvre, et du travail de nos mains, sur la terre que l’Éternel a maudite.

30 Et Lémec, après qu’il eut engendré Noé, vécut cinq cent quatre-vingt-quinze ans ; et il engendra des fils et des filles.

31 Tout le temps donc que Lémec vécut, fut sept cent soixante-dix-sept ans ; puis il mourut.

32 Et Noé, âgé de cinq cents ans, engendra Sem, Cam et Japhet.

REFLEXIONS
Nous devons faire deux réflexions principales sur ce chapitre :

I. La première, sur la longue vie des patriarches. Dieu voulut qu'ils vécussent fort longtemps afin que le monde se peuplât par ce moyen plus promptement et que la connaissance et la mémoire de la création y fussent plus facilement et plus sûrement conservées.

II. La seconde réflexion est celle que St. Paul fait dans l'épître aux Hébreux, où il dit : qu’Hénoc fut enlevé et ne vit point la mort parce qu'il avait été agréable à Dieu pendant sa vie. Dieu voulut ainsi récompenser la piété de ce patriarche et apprendre aux hommes de ce temps-là qu'il y avait pour les gens de bien une autre vie après celle-ci. C'est de quoi nous avons des preuves encore plus claires dans l'Évangile et surtout dans l'ascension de Jésus-Christ. Ainsi ceux qui imiteront Hénoc dans sa piété, qui marcheront comme lui avec Dieu et s'étudieront à lui être agréables par une vie sainte et religieuse seront reçus après leur mort dans le lieu où ce patriarche fut enlevé et où notre Seigneur est allé nous préparer une place.

CHAPITRE VI.

Dieu voyant l’extrême corruption des hommes prend la résolution d'envoyer le déluge, et il commande à Noé de bâtir une arche pour s'y retirer avec sa famille et avec les bêtes.

1 Or, il arriva que quand les hommes eurent commencé à se multiplier sur la terre, et qu’ils eurent engendré des filles ;

2 Les fils de Dieu, voyant que les filles des hommes étaient belles, en prirent pour leurs femmes, de toutes celles qu’ils choisirent.

3 Et l’Éternel dit : Mon Esprit ne contestera point à toujours avec les hommes ; car aussi ne sont-ils que chair : leurs jours donc seront de cent vingt ans.

4 En ce temps-là, il y avait des géants sur la terre, et cela après que les fils de Dieu se furent joints avec les filles des hommes, et qu’elles leur eurent donné des enfants : ce sont ces puissants hommes qui, de tout temps, ont été des gens de renom.

5 Et l’Éternel voyant que la malice des hommes était très grande sur la terre, et que toute l’imagination des pensées de leur cœur n’était que mal en tout temps,

6 Il se repentit d’avoir fait l’homme sur la terre, et il en eut un grand déplaisir dans son cœur.

7 Et l’Éternel dit : J’exterminerai de dessus la terre les hommes que j’ai créés, depuis les hommes jusqu’au bétail, jusqu’à tout ce qui se meut, même jusqu’aux oiseaux des cieux ; car je me repens de les avoir faits.

8 Mais Noé trouva grâce devant l’Éternel.

9 Ce sont ici les générations de Noé : Noé fut un homme juste et plein d’intégrité en son temps, marchant avec Dieu.

10 Et Noé eut trois fils, Sem, Cam et Japhet.

11 Et la terre était corrompue devant Dieu, et remplie d’extorsion.

12 Dieu donc regarda la terre, et, voici, elle était corrompue ; car toute chair avait corrompu sa voie sur la terre.

13 Et Dieu dit à Noé : La fin de toute chair est venue devant moi ; car ils ont rempli la terre d’extorsion : ainsi, je les détruirai avec la terre.

14 Fais-toi une arche de bois de gopher : tu feras l’arche par loges, et tu l’enduiras de bitume par dedans et par dehors.

15 Et tu la feras ainsi : La longueur de l’arche sera de trois cents coudées, et sa largeur de cinquante coudées, et sa hauteur de trente coudées.

16 Tu donneras du jour à l’arche ; tu feras son comble d’une coudée de hauteur, tu mettras la porte de l’arche à son côté, et tu la feras avec un bas étage, un second et un troisième.

17 Et voici, je ferai venir un déluge d’eaux sur la terre, pour détruire toute chair qui a esprit de vie en soi sous les cieux, et tout ce qui est sur la terre, expirera.

18 Mais j’établirai mon alliance avec toi ; et tu entreras dans l’arche, toi, tes fils, ta femme, et les femmes de tes fils avec toi.

19 Et de tout ce qui a vie d’entre toute chair, tu en feras entrer deux de chaque espèce dans l’arche, pour les conserver en vie avec toi ; savoir, le mâle et la femelle ;

20 des oiseaux, selon leur espèce ; des bêtes, selon leur espèce ; et de tous les animaux qui se meuvent, selon leur espèce ; il y en entrera, de tous, deux de chaque espèce avec toi, afin que tu les conserves en vie.

21 Prends aussi avec toi de toute nourriture qu’on mange, et fais-en ta provision, afin qu’elle serve pour ta nourriture et pour celle des animaux.

22 Et Noé fit toutes les choses que Dieu lui avait commandées ; il les fit ainsi.

REFLEXIONS
Il faut remarquer dans ce chapitre :

I. En premier lieu que le mariage des descendants de Seth avec les filles qui étaient de la postérité de Caïn fut la cause des impuretés, des injustices et des autres crimes qui se multiplièrent sur la terre, même parmi ceux qui descendaient de Seth, ce qui obligea Dieu à envoyer le déluge. Cela montre que le commerce avec les méchants et les impies est très dangereux et qu'en particulier l'impureté et la sensualité ont été de tout temps la source de bien des maux et que ce péché, de même que la violence et l'injustice attirent sur les hommes la colère du ciel.

II. La bonté et la patience de Dieu envers les habitants du premier monde paraissent en ce qu'il leur donna cent et vingt ans pour se repentir et en ce qu'il les fit avertir par le moyen de Noé et par la construction de l'arche du déluge qui allait arriver. C'est ainsi que Dieu a usé de tout temps d'un grand support envers les hommes et qu'il leur donne toujours le temps et les avertissements nécessaires afin qu'ils préviennent ses jugements.

III. Dans l'ordre que Dieu donna à Noé de bâtir l'arche, on doit considérer le soin que Dieu a de ceux qui le craignent et le moyen admirable dont il voulut se servir par un effet de sa sagesse pour conserver les hommes et les bêtes afin de repeupler la terre après le déluge.

IV. Enfin, l'on voit dans ce chapitre la foi et l'obéissance de Noé : lequel, étant divinement averti des choses qui ne se voient point encore, craignit et bâti l'arche, par laquelle il condamna le monde et fut fait héritier de la justice qu’on obtient par la foi. Cette réflexion que St. Paul fait au chapitre XI de l'épître aux Hébreux nous engage à être les imitateurs de la foi de ce patriarche, à marcher dans l'intégrité comme lui et à profiter de la patience de Dieu qui nous invite à la repentance afin que nous puissions éviter les jugements qui doivent tomber sur les méchants et être sauvés avec ceux qu'il recevra un jour dans son royaume céleste.

CHAPITRE VII.

Ce chapitre contient l'histoire du déluge duquel Noé fut garanti ayant été conservé dans l'arche avec sa famille et avec les bêtes qu’'il y avait fait entrer.

1 Et l’Éternel dit à Noé : Entre, toi et toute ta maison, dans l’arche ; car je t’ai vu juste devant moi en ce temps.

2 Tu prendras de toutes les bêtes nettes sept de chaque espèce, le mâle et la femelle ; mais des bêtes qui ne sont point nettes, un couple, le mâle et la femelle.

3 Tu prendras aussi des oiseaux des cieux, sept de chaque espèce, le mâle et la femelle, afin d’en conserver la race sur toute la terre.

4 Car dans sept jours je ferai pleuvoir sur toute la terre, pendant quarante jours et quarante nuits ; et j’exterminerai de dessus la terre toute chose qui subsiste et que j’ai faite.

5 Et Noé fit toutes les choses que l’Éternel lui avait commandées.

6 Et Noé était âgé de six cents ans, quand le déluge des eaux vint sur la terre.

7 Noé donc entra, et ses fils, sa femme, et les femmes de ses fils avec lui, dans l’arche, à cause des eaux du déluge.

8 Il y entra aussi des bêtes nettes, et des bêtes qui ne sont point nettes, et des oiseaux, et tout ce qui rampe sur la terre ;

9 Elles entrèrent deux à deux vers Noé dans l’arche, savoir, le mâle et la femelle, comme Dieu lui avait commandé.

10 Et il arriva qu’au septième jour les eaux du déluge furent sur la terre.

11 En l’an six cent de la vie de Noé, au second mois, au dix-septième jour du mois, en ce jour-là toutes les fontaines du grand abîme furent rompues, et les bondes des cieux furent ouvertes.

12 Et la pluie tomba sur la terre pendant quarante jours et quarante nuits.

13 En ce même jour-là, Noé, Sem, Cam et Japhet, fils de Noé, entrèrent dans l’arche, avec la femme de Noé, et les trois femmes de ses fils avec eux ;

14 Eux, et toutes les bêtes selon leur espèce ; et tous les animaux domestiques selon leur espèce ; et tous les reptiles qui se meuvent sur la terre, selon leur espèce, et tous les oiseaux selon leur espèce ; et tout petit oiseau, ayant des ailes, de quelque sorte que ce soit.

15 Il vint donc de toute chair, qui a en soi esprit de vie, un couple à Noé dans l’arche.

16 Le mâle, dis-je, et la femelle de toute chair y vinrent, comme Dieu lui avait commandé ; puis l’Éternel ferma l’arche sur lui.

17 Et le déluge se répandit pendant quarante jours sur la terre ; et les eaux crûrent, et élevèrent l’arche, et elle fut élevée de dessus la terre.

18 Et les eaux se renforcèrent, et s’accrurent fort sur la terre, et l’arche flottait au-dessus des eaux.

19 Et les eaux se renforcèrent prodigieusement sur la terre ; et toutes les plus hautes montagnes qui étaient sous tous les cieux, furent couvertes.

20 Les eaux s’élevèrent de quinze coudées plus haut ; ainsi les montagnes furent couvertes.

21 Et toute chair qui se mouvait sur la terre expira, tant des oiseaux que du bétail, des bêtes et de tous les reptiles qui se traînent sur la terre, et tous les hommes.

22 Toutes les choses qui étaient sur le sec, et qui avaient respiration de vie en leurs narines, moururent.

23 Tout ce donc qui subsistait sur la terre fut exterminé, depuis les hommes jusqu’aux bêtes, jusqu’aux reptiles, et jusqu’aux oiseaux des cieux ; et ils furent exterminés de dessus la terre. Noé demeura de reste, et ce qui était avec lui dans l’arche.

24 Et les eaux se maintinrent sur la terre pendant cent cinquante jours.

REFLEXIONS
L’histoire du déluge est tout à fait mémorable et c’est ici l’exemple le plus remarquable que Dieu ait donné de sa justice depuis la création du monde. C’est aussi un événement très certain et dont la mémoire a été conservée parmi tous les peuples et dans les auteurs les plus anciens, aussi bien que dans les livres sacrés. St. Pierre nous enseigne quel est l'usage que nous devons faire de cette histoire, lorsqu'il dit : Si Dieu n’a point épargné le monde ancien, s’il a sauvé Noé, lui huitième héraut de la justice, et s’il a amené le déluge sur le monde des méchants, le Seigneur sait délivrer de la tentation ceux qui l'honorent et réserver les impies pour être punis au jour du jugement. L’on doit faire de sérieuses réflexions sur ce grand exemple. Nous y voyons que Dieu est juste, que ses menaces s'exécutent toujours et que le grand nombre des pêcheurs ne met point les hommes à couvert de sa vengeance. Nous devons de plus considérer que, comme ceux qui n’étaient pas dans l’arche périrent, de même ceux qui auront négligé d’entrer dans la voie du salut et de profiter de la patience de Dieu périront infailliblement. C’est de quoi Jésus-Christ nous avertit dans l'Évangile en disant : Qu’il en sera du jour de sa venue comme des jours de Noé, auxquels les habitants du premier monde vivaient dans la sécurité et ne pensèrent point au déluge jusqu'à ce qu'il vînt et les fit tous périr. C’est ainsi que les pêcheurs seront surpris lorsque Jésus-Christ viendra pour juger le monde et pour rendre à tous les hommes selon leurs œuvres.

CHAPITRE VIII.

Moïse récite dans ce chapitre comment Noé sortit de l'arche après que les eaux du déluge se furent retirées et comment il offrit un sacrifice à Dieu, ensuite de quoi Dieu rétablit l'ordre de la nature.

1 Or, Dieu se souvint de Noé, et de toutes les bêtes, et de tous les animaux qui étaient avec lui dans l’arche. Et Dieu fit passer un vent sur la terre, et les eaux s’arrêtèrent.

2 Car les sources de l’abîme, et les bondes des cieux avaient été fermées ; et la pluie des cieux avait été retenue.

3 Et les eaux se retiraient de plus en plus de dessus la terre ; et au bout des cent cinquante jours elles diminuèrent.

4 Et au dix-septième jour du septième mois, l’arche s’arrêta sur les montagnes d’Ararat.

5 Et les eaux allaient en diminuant de plus en plus, jusqu’au dixième mois : et au premier jour du dixième mois les sommets des montagnes se montrèrent.

6 Puis il arriva qu’au bout de quarante jours Noé ouvrit la fenêtre qu’il avait faite à l’arche.

7 Et il lâcha un corbeau, qui sortit, allant et revenant, jusqu’à ce que les eaux séchassent sur la terre.

8 Il lâcha aussi d’avec soi un pigeon, pour voir si les eaux étaient diminuées sur la terre.

9 Mais le pigeon, ne trouvant pas sur quoi asseoir la plante de son pied, retourna à lui dans l’arche ; car les eaux étaient sur toute la terre. Et Noé avançant sa main, le reprit, et le retira à soi dans l’arche.

10 Et quand il eut attendu encore sept autres jours, il lâcha encore le pigeon hors de l’arche.

11 Et sur le soir le pigeon revint à lui, et voici, il avait dans son bec une feuille d’olivier qu’il avait arrachée ; et Noé connut que les eaux s’étaient retirées de dessus la terre.

12 Et il attendit encore sept autres jours ; puis il lâcha le pigeon, qui ne retourna plus à lui.

13 Et il arriva que l’an six cent et un de l’âge de Noé, au premier jour du premier mois, les eaux se séchèrent de dessus la terre ; et Noé ôtant la couverture de l’arche, regarda, et voici, la surface de la terre se séchait.

14 Et au vingt-septième jour du second mois la terre fut sèche.

15 Alors Dieu parla à Noé, disant :

16 Sors de l’arche, toi, ta femme, tes fils, et les femmes de tes fils avec toi.

17 Fais sortir avec toi toutes les bêtes qui sont avec toi, de toute chair, tant des oiseaux que des bêtes, et tous les animaux qui se meuvent sur la terre : qu’ils peuplent en abondance la terre, et qu’ils croissent et multiplient sur la terre.

18 Noé donc sortit ; ses fils, sa femme, et les femmes de ses fils avec lui.

19 Toutes les bêtes, tous les reptiles, tous les oiseaux, tout ce qui rampe sur la terre, selon leurs espèces, sortirent de l’arche.

20 Et Noé bâtit un autel à l’Éternel, et prit de toute bête nette, et de tout oiseau net, et il offrit des holocaustes sur l’autel.

21 Et l’Éternel flaira une odeur qui l’apaisa, et dit en son cœur : Je ne maudirai plus la terre, à l’occasion des hommes ; car l’imagination du cœur des hommes est mauvaise dès leur jeunesse ; et je ne détruirai plus tout ce qui vit, comme j’ai fait.

22 Mais tant que la terre durera, les semailles et les moissons, le froid et le chaud, l’été et l’hiver, le jour et la nuit ne cesseront point.

REFLEXIONS
Ce qu'il y a principalement à remarquer ici : C'est que Dieu après avoir donné des marques terribles de sa sévérité dans le déluge, donna des témoignages de sa bonté, non seulement envers Noé et sa famille, mais aussi envers tout le genre humain, en rétablissant le monde dans l'état et dans l'ordre où nous le voyons encore aujourd'hui. Et puisque nous jouissons de ces effets de la bonté de Dieu, nous devons l'en remercier et être incités à l'aimer et à le craindre par la considération de sa miséricorde aussi bien que par celle de sa justice qui paraissent l'une et l'autre d'une manière si sensible dans ce qui arriva lors du déluge universel.

CHAPITRE IX

On voit ici trois choses :

I. Les lois que Dieu donna après le déluge à Noé et au genre humain, particulièrement à l’égard de la nourriture qui fut alors changée et du meurtre. II. La promesse que Dieu fit de ne plus envoyer de déluge universel. III. Ce qui arriva à Noé lorsqu’ayant été surpris par le vin, Cam son fils se moqua de lui. Moïse rapporte sur la fin de ce chapitre la mort de Noé.

 1 Et Dieu bénit Noé, et ses fils, et leur dit : Croissez et multipliez, et remplissez la terre ;

2 Et que toutes les bêtes de la terre, tous les oiseaux des cieux, avec tout ce qui se meut sur la terre, et tous les poissons de la mer, vous craignent et vous redoutent ; ils sont remis entre vos mains.

3 Tout ce qui se meut et qui a vie, vous sera pour nourriture : je vous ai donné toutes ces choses comme l’herbe verte.

4 Toutefois, vous ne mangerez point de chair avec son âme, qui est son sang.

5 En effet, je redemanderai votre sang, savoir, le sang de vos âmes, je le redemanderai de la main de toutes les bêtes, et de la main de l’homme ; même je redemanderai l’âme de l’homme de la main de son frère.

6 Qui aura répandu le sang de l’homme dans l’homme, son sang sera répandu ; car Dieu a fait l’homme à son image.

7 Vous donc, croissez, multipliez ; croissez en toute abondance sur la terre, et multipliez sur elle.

8 Dieu parla aussi à Noé et à ses fils, qui étaient avec lui, disant :

9 Quant à moi, voici, j’établis mon alliance avec vous, et avec votre postérité après vous ;

10 Et avec tout animal vivant qui est avec vous, tant des oiseaux que des animaux domestiques, et de toutes les bêtes de la terre qui sont avec vous, de toutes celles qui sont sorties de l’arche, jusqu’à toutes les bêtes de la terre.

11 J’établis donc mon alliance avec vous, et nulle chair ne sera plus exterminée par les eaux du déluge, et il n’y aura plus de déluge pour détruire la terre.

12 Dieu dit encore : C’est ici le signe que je donne de l’alliance qui est entre moi et vous, et entre toute créature vivante qui est avec vous, pour durer à toujours :

13 Je mettrai mon arc dans la nuée, et il sera pour signe de l’alliance entre moi et la terre.

14 Et quand il arrivera que j’aurai couvert de nuées la terre, l’arc paraîtra dans la nuée.

15 Et je me souviendrai de l’alliance que j’ai faite avec vous, et avec tout animal qui vit en toute chair. Et les eaux ne feront plus de déluge pour détruire toute chair.

16 L’arc donc sera dans la nuée, et je le regarderai, afin qu’il me souvienne de l’alliance perpétuelle qui est entre Dieu et tout animal vivant, en quelque chair qui soit sur la terre.

17 Dieu donc dit à Noé : C’est là le signe de l’alliance que j’ai établie entre moi et toute chair qui est sur la terre.

18 Et les fils de Noé, qui sortirent de l’arche, furent Sem, Cam et Japhet. Et Cam fut le père de Canaan.

19 Ce sont là les trois fils de Noé, desquels toute la terre fut peuplée.

20 Et Noé, qui était laboureur, commença de planter la vigne.

21 Et il but du vin, et il fut enivré et se découvrit au milieu de sa tente.

22 Et Cam, père de Canaan, ayant vu la nudité de son père, sortit et le rapporta à ses deux frères.

23 Alors Sem et Japhet prirent un manteau qu’ils mirent sur leurs deux épaules, et marchant en arrière, ils couvrirent la nudité de leur père, et leurs visages étaient tournés en arrière, de sorte qu’ils ne virent point la nudité de leur père.

24 Et Noé, réveillé de son vin, sut ce que le plus petit de ses fils lui avait fait.

25 C’est pourquoi, il dit : Maudit soit Canaan ! il sera serviteur des serviteurs de ses frères.

26 Il dit aussi : Béni soit l’Éternel, Dieu de Sem, et que Canaan leur soit fait serviteur !

27 Que Dieu attire en douceur Japhet, et qu’il loge dans les tabernacles de Sem ; et que Canaan leur soit fait serviteur !

28 Et Noé vécut, après le déluge, trois cent cinquante ans.

29 Tout le temps donc que Noé vécut, fut neuf cent cinquante ans ; puis il mourut.

REFLEXIONS
Ce chapitre nous présente ces instructions :

I. La première, que nous devons garder inviolablement les lois que Dieu donna à Noé après le déluge, user sobrement des créatures dont Dieu nous a accordé l’usage et nous éloigner de la cruauté et de l’injustice.

II. La seconde, que l'alliance que Dieu traita avec Noé et avec tout le genre humain en promettant de ne plus envoyer de déluge et de conserver le monde dans son état a toujours subsisté depuis ce temps-là et qu’ainsi nous devons reconnaître et célébrer la grande bonté du Seigneur envers nous, de laquelle nous ressentons les effets.

III. La troisième instruction est que si le monde ne doit plus être détruit par le déluge, il le sera par le feu du dernier jour, selon ce que dit St. Pierre : Si le monde ancien est péri étant couvert d'un déluge d'eau, les cieux et la terre sont réservés pour le feu au jour du jugement.

IV. Sur ce qui est dit à la fin de ce chapitre que Noé fut surpris par le vin, il faut considérer que cela lui arriva innocemment, parce qu’il ne connaissait pas l’effet que le vin peut produire, l’usage ayant été inconnu jusqu’alors. Ainsi cet exemple, bien loin d’excuser l'intempérance montre de l'éviter très soigneusement. Ce qui est récité des fils de Noé nous apprend que Dieu bénit les enfants qui honorent leurs pères, mais qu'il maudit ceux qui manquent de respect envers eux.

CHAPITRE X.

Ce chapitre contient le dénombrement des descendants de Sem, de Cam et de Japhet, les trois fils de Noé, par le moyen desquels la terre fut peuplée après le déluge.

1 Ce sont ici les générations des enfants de Noé : Sem, Cam et Japhet, auxquels naquirent des enfants après le déluge.

2 Les enfants de Japhet sont Gomer, Magog, Madaï, Javan, Tubal, Mescech et Tiras.

3 Et les enfants de Gomer, Askenas, Riphath et Togarma.

4 Et les enfants de Javan, Elisa, Tarscis, Kittim et Dodanim.

5 C’est de ceux-là que sont descendus les peuples qui partagèrent entre eux les îles des nations, par leurs terres, chacun selon sa langue, selon leurs familles, entre leurs nations.

6 Et les enfants de Cam sont Cus, Mitsraïm, Put et Canaan.

7 Et les enfants de Cus, Séba, Havila, Sabtah, Rahma et Sebteca. Et les enfants de Rahma, Scéba et Dédan.

8 Et Cus engendra Nimrod, qui commença d’être sur la terre.

9 Il fut un puissant chasseur devant l’Éternel. De là est venu ce qu’on dit : Comme Nimrod, le puissant chasseur devant l’Éternel.

10 Et le commencement de son règne fut Babel, Erec, Accad et Calné, au pays de Scinhar.

11 Il sortit de ce pays-là en Assyrie, et il bâtit Ninive et les rues de la ville, et Calah ;

12 Et Résen, entre Ninive et Calah, qui est une grande ville.

13 Et Mitsraïm engendra Ludim, Hanamim, Lahabim, Naphtuhim,

14 Pathrusim, Casluhim (desquels sont sortis les Philistins), et Caphtorim.

15 Et Canaan engendra Sidon, son fils aîné, et Heth ;

16 Les Jébusiens, les Amorrhéens, les Guirgasciens ;

17 Les Héviens, les Harkiens, et les Siniens ;

18 Les Arvadiens, les Tsémariens et les Hamathiens. Et ensuite les familles des Cananéens se sont dispersées.

19 Et les limites des Cananéens furent depuis Sidon, quand on vient vers Guérar, jusques en Gaza, en tirant vers Sodome et Gomorre, Adma et Tséboïm, jusqu’à Lésa.

20 Ce sont là les enfants de Cam, selon leurs familles et leurs langues, leurs terres et leurs nations.

21 Et des enfants naquirent à Sem, père de tous les enfants d’Héber, et frère de Japhet, qui était le plus grand.

22 Les enfants donc de Sem sont Hélam, Assur, Arpacsad, Lud et Aram.

23 Et les enfants d’Aram, Hus, Hul, Guéther et Mas.

24 Et Arpacsad engendra Scélah, et Scélah engendra Héber.

25 Et à Héber naquirent deux fils : le nom de l’un fut Péleg ; car en son temps la terre fut partagée ; et le nom de son frère fut Joktan.

26 Et Joktan engendra Almodad, Scéleph, Hatsarmaveth, et Jérah,

27 Hadoram, Uzal, Dikla,

28 Hobal, Abimaël, Scéba,

29 Ophir, Havila et Jobab. Tous ceux-là sont les enfants de Joktan.

30 Et leur demeure était depuis Mésa, quand on vient en Séphar, montagne d’Orient.

31 Ce sont là les enfants de Sem, selon leurs familles et leurs langues, leurs terres et leurs nations.

32 Telles sont donc les familles des enfants de Noé, selon leur postérité dans leurs nations, et c’est de ceux-là que se sont formées les nations qui ont été dispersées sur la terre après le déluge.

REFLEXIONS
Quoi qu'il n'y ait que des noms d'hommes et de peuples dans ce chapitre, il ne laisse pas d'être très remarquable. Nous voyons ici :

Premièrement l'origine de toutes les nations du monde et le commencement des empires.

En second lieu, ce que Moïse y rapporte sert à établir la généalogie des patriarches desquels notre Seigneur est descendu.  Ainsi, ce chapitre nous fournit de belles et de fortes preuves de la vérité de l'histoire sainte et de la divinité de la religion. Ce que Moïse dit ici étant parfaitement conforme à ce que les histoires les plus anciennes et les plus certaines rapportent touchant les divers peuples du monde et les pays qu'ils ont habités.

CHAPITRE XI.

Moïse raconte dans ce chapitre que les hommes ayant entrepris de bâtir la ville et la tour de Babel, Dieu confondit leur langage, ce qui fut cause qu’ils se dispersèrent par toute la terre. Moïse marque aussi quels furent les descendants de Sem, fils de Noé, jusqu’à Abraham

1 Alors toute la terre avait un même langage et une même parole.

2 Mais il arriva comme ils partirent d’Orient, qu’ils trouvèrent une campagne au pays de Scinhar, où ils habitèrent.

3 Et ils se dirent l’un à l’autre : Allons, faisons des briques, et les cuisons au feu. Et ils eurent des briques au lieu de pierres, et le bitume leur fut au lieu de mortier.

4 Et ils se dirent : Venez, bâtissons-nous une ville et une tour, de laquelle le sommet soit jusqu’aux cieux, et acquérons-nous de la réputation, de peur que nous ne soyons dispersés sur toute la terre.

5 Alors l’Éternel descendit pour voir la ville et la tour que bâtissaient les fils des hommes.

6 Et l’Éternel dit : Voici, ils ne sont qu’un peuple, et tous ont un même langage, et ils commencent à travailler ; et maintenant rien ne les empêchera d’exécuter ce qu’ils ont projeté.

7 Venez donc, descendons, et confondons là leur langage, afin qu’ils ne s’entendent point les uns les autres.

8 Ainsi, l’Éternel les dispersa de là par toute la terre, et ils cessèrent de bâtir la ville.

9 C’est pourquoi son nom fut appelé Babel ; car l’Éternel y confondit le langage de toute la terre, et de là il les dispersa sur toute la terre.

10 C’est ici la postérité de Sem : Sem, âgé de cent ans, engendra Arpacsad, deux ans après le déluge.

11 Et Sem, après qu’il eut engendré Arpacsad, vécut cinq cents ans ; et il engendra des fils et des filles.

12 Et Arpacsad vécut trente-cinq ans, et il engendra Scélah.

13 Et Arpacsad, après qu’il eut engendré Scélah, vécut quatre cent trois ans ; et il engendra des fils et des filles.

14 Et Scélah ayant vécu trente ans, engendra Héber.

15 Et Scélah, après qu’il eut engendré Héber, vécut quatre cent trois ans ; et il engendra des fils et des filles.

16 Et Héber ayant vécu trente-quatre ans, engendra Péleg.

17 Et Héber, après qu’il eut engendré Péleg, vécut quatre cent trente ans ; et il engendra des fils et des filles.

18 Péleg aussi vécut trente ans, et il engendra Réhu.

19 Et Péleg, après qu’il eut engendré Réhu, vécut deux cent neuf ans ; et il engendra des fils et des filles.

20 Réhu aussi ayant vécu trente-deux ans, engendra Sérug.

21 Et Réhu, après qu’il eut engendré Sérug, vécut deux cent sept ans ; et il engendra des fils et des filles.

22 Et Sérug ayant vécu trente ans, engendra Nacor.

23 Et Sérug, après qu’il eut engendré Nacor, vécut deux cents ans ; et il engendra des fils et des filles.

24 Et Nacor, ayant vécu vingt-neuf ans, engendra Taré.

25 Et Nacor, après qu’il eut engendré Taré, vécut cent dix-neuf ans ; et il engendra des fils et des filles.

26 Taré aussi vécut soixante et dix ans, et il engendra Abram, Nacor et Haran.

27 Et c’est ici la postérité de Taré : Taré engendra Abram, Nacor et Haran ; et Haran engendra Lot.

28 Et Haran mourut en la présence de Taré, son père, au pays de sa naissance, à Ur des Caldéens.

29 Et Abram et Nacor prirent des femmes. Le nom de la femme d’Abram fut Saraï, et le nom de la femme de Nacor fut Milca, fille de Haran, père de Milca et de Jisca.

30 Mais Saraï était stérile, et elle n’avait point d’enfant.

31 Et Taré prit son fils Abram, et Lot, fils de son fils, lequel était fils de Haran, et Saraï sa belle-fille, femme d’Abram son fils ; et ils sortirent ensemble d’Ur des Caldéens, pour aller au pays de Canaan. Et ils vinrent jusqu’à Caran, et ils y demeurèrent.

32 Et les jours de Taré furent deux cent cinq ans ; puis il mourut à Caran.

REFLEXIONS
Le récit que Moïse fait de la dispersion qui arriva lorsque les descendants de Noé bâtissaient la tour de Babel nous instruit :

I. Premièrement de la suite de l’histoire sainte et de la manière dont les hommes se répandirent dans les divers pays du monde,

II. Dieu voulut disperser ainsi ceux qui prétendaient se garantir du déluge en bâtissant cette tour pour punir leur orgueil et leur impiété. Il le fit aussi afin que la terre fût plus promptement habitée et peuplée.

Pour ce qui est de la généalogie des descendants de Sem, il y faut remarquer ces deux choses :
I. L’une que quoique la vie des hommes fut alors plus courte qu'elle ne l'avait été avant le déluge, elle était cependant beaucoup plus longue qu'elle ne l'est maintenant.

II. L’autre que cette généalogie a été conservée pour faire voir qu'Abraham est descendu de Sem, fils de Noé.

CHAPITRE XII.

C’est ici que commence l'histoire du patriarche Abraham. Nous y voyons :

I. Comment il quitta sa patrie par l'ordre de Dieu pour venir au pays de Canaan que le Seigneur promit de lui donner.

II. Que la famine l'obligea de s'en aller en Égypte où Sara sa femme fut enlevée et ensuite rendue par le roi Pharaon.

1 Et l’Éternel avait dit à Abram : Sors de ton pays et de ton parentage, et de la maison de ton père, et viens au pays que je te montrerai.

2 Et je te ferai devenir une grande nation ; je te bénirai, et je rendrai ton nom grand, et tu seras bénédiction.

3 Je bénirai ceux qui te béniront, et je maudirai ceux qui te maudiront ; et toutes les familles de la terre seront bénies en toi.

4 Abram donc sortit, comme l’Éternel lui avait dit, et Lot alla avec lui. Et Abram était âgé de soixante et quinze ans quand il sortit de Caran.

5 Abram prit aussi Saraï sa femme, et Lot, fils de son frère, et tout le bien qu’ils avaient acquis, et les personnes qu’ils avaient eues à Caran ; et ils sortirent pour venir au pays de Canaan, et ils y entrèrent.

6 Et Abram passa au travers de ce pays jusqu’au lieu de Sichem, et jusqu’en la plaine de Moré, et il y avait alors des Cananéens dans ce pays.

7 Et l’Éternel apparut à Abram et lui dit : Je donnerai ce pays à ta postérité. Et Abram dressa là un autel à l’Éternel, qui lui était apparu.

8 Et il passa de là vers la montagne qui est à l’Orient de Béthel, et il y tendit ses tentes, ayant Béthel à l’Occident, et Haï à l’Orient. Il dressa encore là un autel à l’Éternel, et il invoqua le nom de l’Éternel.

9 Puis Abram partit de là, marchant toujours, et s’avançant vers le midi.

10 Mais la famine étant survenue au pays, Abram descendit en Égypte pour y demeurer quelque temps ; car la famine était grande au pays.

11 Et comme il était près d’entrer en Égypte, il dit à Saraï sa femme : Voici, je sais que tu es une belle femme ;

12 Et il arrivera que, lorsque les Égyptiens t’auront vue, ils diront : C’est la femme de cet homme-là, et ils me tueront ; mais ils te laisseront vivre.

13 Dis donc, je te prie, que tu es ma sœur, afin que je sois bien traité à cause de toi, et qu’ils me sauvent la vie à ta considération.

14 Il arriva donc, sitôt qu’Abram fut venu en Égypte, que les Égyptiens virent que cette femme était fort belle.

15 Les principaux de la cour de Pharaon la virent aussi, et la louèrent devant le roi ; et elle fut enlevée pour être menée dans la maison de Pharaon ;

16 Lequel fit du bien à Abram, à cause d’elle ; de sorte qu’il en eut des brebis, des bœufs, des ânes, des serviteurs, des servantes, des ânesses et des chameaux.

17 Mais l’Éternel frappa de grandes plaies Pharaon et sa maison, à cause de Saraï, femme d’Abram.

18 Alors Pharaon appela Abram, et lui dit : Qu’est-ce que tu m’as fait ? Que ne m’as-tu averti qu’elle était ta femme ?

19 Pourquoi as-tu dit, c’est ma sœur ? Et je l’avais prise pour être ma femme ; mais maintenant voici ta femme, prends-la, et t’en va.

20 Et il donna charge à ses gens d’aller reconduire Abram, sa femme et tout ce qui lui appartenait.

REFLEXIONS
Nous devons considérer sur ce chapitre :

I. Que Dieu appela Abraham et traita alliance avec lui dans la vue de conserver la vraie religion parmi ses descendants et de faire naître un jour le Messie de sa postérité.

II. Qu'Abraham obéit à la vocation de Dieu et qu'il crut à ses promesses, que cependant ces promesses ne s’accomplirent pas d’abord, qu’il fut exposé à plusieurs traverses, qu'il habita au pays de Canaan comme étranger et que la famine le contraignit d'aller en Égypte où il fut en danger d'être privé de sa femme. St. Paul nous montre quelles sont les réflexions que nous devons faire sur cette histoire lorsqu’il dit au chapitre XI de l’épître aux Hébreux : Par la foi Abraham, étant appelé pour aller au lieu qu’il devait posséder, partit ne sachant où il allait. Par la foi, il habita comme étranger dans la terre promise.

Ainsi, nous devons apprendre, de cet exemple d'Abraham, à suivre notre vocation, à obéir à tout ce que Dieu nous commande, quelque difficile qu'il nous paraisse, à vivre en ce monde comme des étrangers, ne cherchant point ici-bas notre véritable patrie, mais la cherchant dans le ciel et attendant comme Abraham notre père, la cité qui est à venir, de laquelle Dieu est l'architecte et le fondateur.

III. Les plaies dont Dieu frappa le roi d'Égypte, parce qu'il avait enlevé Sara dans l'intention de l'épouser, montrent que l'adultère est un crime très odieux au Seigneur. On voit même par les reproches que Pharaon fit à Abraham que ce prince savait que ce crime était très grand. Il est cependant à remarquer que le roi d'Égypte fit beaucoup de bien à Abraham et que ce patriarche emporta de grandes richesses de ce pays-là et c’est ainsi qu'il commençait à éprouver les effets de la protection et de la bénédiction de Dieu sur lui.

CHAPITRE XIII.

Abraham et Lot, étant retournés d'Égypte au pays de Canaan, se séparèrent ne pouvant demeurer dans un même lieu à cause de leurs grands biens. Lot s’établit à Sodome et Abraham demeure dans le pays de Canaan duquel Dieu lui promit de nouveau la possession.

1 Abram donc étant sorti de l’Égypte, monta, vers le midi, lui, sa femme et tout ce qu’il possédait et Lot était avec lui.

2 Et Abram était très riche en bétail, en argent et en or.

3 Et il s’en retourna par le même chemin qu’il était venu, du Midi jusqu’à Béthel, jusqu’au lieu où il avait dressé ses tentes au commencement, entre Béthel et Haï ;

4 Dans le même lieu où était l’autel qu’il y avait bâti au commencement, et où Abram avait invoqué le nom de l’Éternel.

5 Lot aussi, qui marchait avec Abram, avait des brebis, des bœufs, et des tentes.

6 Et le pays ne les pouvait porter, pour pouvoir demeurer ensemble ; car leur bien était si grand, qu’ils ne pouvaient demeurer l’un avec l’autre.

7 Ce qui excita une querelle entre les bergers du bétail d’Abram, et les bergers du bétail de Lot. En ce temps-là les Cananéens et les Phérésiens demeuraient au pays.

8 Et Abram dit à Lot : Je te prie qu’il n’y ait point de dispute entre moi et toi, ni entre mes bergers et les tiens ; car nous sommes frères.

9 Tout le pays n’est-il pas à ta disposition ? Sépare-toi, je te prie, d’avec moi : Si tu choisis la gauche, je prendrai la droite ; et si tu prends la droite, je m’en irai à la gauche.

10 Alors Lot, élevant ses yeux, vit toute la plaine du Jourdain, qui (avant que l’Éternel détruisît Sodome et Gomorre) était arrosée partout, jusqu’à ce qu’on vienne à Tsohar, comme le jardin de l’Éternel et comme le pays d’Égypte.

11 Et Lot choisit pour soi toute la plaine du Jourdain, et il alla du côté de l’Orient ; ainsi ils se séparèrent l’un d’avec l’autre.

12 Abram donc demeura au pays de Canaan ; et Lot demeura dans les villes de la plaine, et il y dressa ses tentes jusqu’à Sodome.

13 Or, les habitants de Sodome étaient méchants, et ils étaient de grands pécheurs contre l’Éternel.

14 Et l’Éternel dit à Abram (après que Lot se fut séparé d’avec lui) : Lève maintenant tes yeux, et regarde du lieu où tu es, vers le Septentrion, le Midi, l’Orient et l’Occident.

15 Car je te donnerai, et à ta postérité pour jamais, tout le pays que tu vois.

16 Et je ferai que ta postérité sera comme la poussière de la terre ; que si quelqu’un peut compter la poussière de la terre, il comptera aussi ta postérité.

17 Lève-toi donc, et promène-toi dans le pays, dans sa longueur et dans sa largeur ; car je te le donnerai.

18 Abram donc ayant remué ses tentes, vint demeurer dans les plaines de Mamré, qui est en Hébron, et il bâtit là un autel à l’Éternel.

REFLEXIONS
Les grands biens que Dieu accorda à Abraham doivent être considérés comme un effet de la bénédiction qu'il lui avait promise, ce qui nous fait voir que les promesses de Dieu s'exécutent toujours et qu'il accorde quelques fois à ceux qui le craignent les bénédictions de la vie présente. Le débat qui arriva entre les gens de Lot et ceux d'Abraham et la modération qu'Abraham fit paraître en donnant à Lot son neveu le choix d'aller où il lui plairait nous avertissent d'éviter les divisions qui naissent d'ordinaire à l’occasion des biens du monde et de nous prévenir les uns les autres pour avoir la paix en renonçant même à ce qui pourrait nous être plus avantageux. Le choix que Lot fit du pays de Sodome qui était très fertile et très agréable, mais dont les habitants étaient déjà alors fort corrompus et menacés des jugements de Dieu, nous montre qu'il ne faut pas toujours regarder aux avantages et aux commodités de la vie, qu'il est périlleux d'habiter dans les lieux où l'aise et l'abondance règnent et que l'on doit surtout fuir le commerce des méchants.

Enfin, nous voyons dans la réitération des promesses que Dieu fit à Abraham la fermeté de l'amour que Dieu porte à ses enfants et la bonté avec laquelle il soutient leur foi dans les épreuves par où il les fait passer.

CHAPITRE XIV.

C’est ici l'histoire de la guerre qu’il y eut entre le roi de Sodome et ses voisins et le roi d'Elam et ses alliés dans laquelle le roi de Sodome fut vaincu et Lot pris avec tout son bien, mais Abraham défit le roi d'Elam et délivra Lot. Comme il revenait de cette défaite, Melchisédec lui vint au-devant et lui présenta du pain et du vin et Abraham lui donna la dîme de tout le butin qu’il avait fait.

1 Il arriva, au temps d’Amraphel, roi de Scinhar, d’Arjoc, roi d’Ellasar, de Kédor-lahomer, roi d’Hélam, et de Tidhal, roi des nations,

2 Qu’ils firent la guerre contre Bérah, roi de Sodome, contre Birsah, roi de Gomorre, contre Scinab, roi d’Adma, contre Scemeber, roi de Tséboïm, et contre le roi de Bélah, qui est Tsohar.

3 Tous ceux-ci se joignirent dans la vallée de Siddim, qui est la mer Salée.

4 Ils avaient été assujettis douze ans à Kédor-lahomer ; mais au treizième ils s’étaient révoltés.

5 A la quatorzième année donc Kédor-lahomer vint, avec les rois qui s’étaient joints à lui ; et ils battirent les Réphaïns, en Hasçteroth de Carnaïm, les Zuzins en Ham ; les Emins dans la plaine de Kirjathaïm ;

6 Et les Horiens dans leur montagne de Séhir, jusqu’aux campagnes de Paran, au-dessus du désert.

7 Puis ils retournèrent et vinrent à Hen de Mispat, qui est Kadès, et ils battirent tout le pays des Hamalékites, et des Amorrhéens qui habitaient dans Hatsatson-tamar.

8 Alors le roi de Sodome, le roi de Gomorre, le roi d’Adma, le roi de Tséboïm, et le roi de Bélah, qui est Tsohar, sortirent, et rangèrent leurs troupes dans la vallée de Siddim, contre les autres rois,

9 C’est-à-dire, contre Kédor-lahomer, roi de Hélam, contre Tidhal, roi des nations, contre Amraphel, roi de Scinhar, et contre Arjoc, roi d’Ellasar, quatre rois contre cinq.

10 Or, il y avait dans la vallée de Siddim beaucoup de puits de bitume. Et les rois de Sodome et de Gomorre s’enfuirent, et y tombèrent ; et ceux de leurs gens qui s’échappèrent, s’enfuirent sur la montagne.

11 Les rois prirent donc toutes les richesses de Sodome et de Gomorre, et tous leurs vivres ; puis ils se retirèrent.

12 Ils prirent aussi Lot, fils du frère d’Abram, qui demeurait dans Sodome, et tout son bien, et ils s’en allèrent.

13 Un homme qui s’était sauvé, en vint avertir Abram, Hébreu, qui demeurait dans les plaines de Mamré Amorrhéen, frère d’Escol, et frère de Haner, qui avaient fait alliance avec Abram.

14 Quand donc Abram eut appris que son frère avait été fait prisonnier, il arma trois cents et dix-huit de ses serviteurs qui étaient nés dans sa maison ; et il poursuivit ces rois jusqu’à Dan.

15 Et ayant partagé ses troupes, il se jeta sur les rois durant la nuit, lui et ses serviteurs ; et les battit, et les poursuivit jusqu’à Hobar, qui est à la gauche de Damas.

16 Et il ramena toutes les richesses qu’on avait prises ; il ramena même Lot son frère, avec ses biens, les femmes et le peuple.

17 Et le roi de Sodome s’en alla au-devant de lui, comme il s’en retournait après la défaite de Kédor-lahomer, et des rois qui étaient avec lui, dans la vallée de la plaine, qui est la vallée royale.

18 Melchisédec aussi, roi de Salem, fit apporter du pain et du vin (et il était sacrificateur du Dieu fort, souverain).

19 Et il bénit Abram, en disant : Béni soit Abram par le Dieu fort, souverain, possesseur des cieux et de la terre.

20 Et béni soit le Dieu fort, souverain, qui a mis tes ennemis entre tes mains. Et Abram lui donna la dîme de tout ce qu’il avait pris.

21 Et le roi de Sodome dit à Abram : Donne-moi les personnes, et prends les richesses pour toi.

22 Et Abram dit au roi de Sodome : J’ai levé ma main à l’Éternel, le Dieu fort, souverain, possesseur des cieux et de la terre, disant :

23 Si je prends aucune chose qui t’appartienne, depuis le moindre fil jusques à une courroie de soulier ; afin que tu ne dises pas : J’ai enrichi Abram.

24 J’excepte seulement ce que les jeunes gens ont mangé, et la part des hommes qui sont venus avec moi, Haner, Escol et Mamré, qui prendront leur part du butin.

REFLEXIONS
Il faut considérer la défaite du roi de Sodome comme un châtiment de Dieu sur les habitants de cette ville qui étaient très corrompus et comme un avant-coureur de leur ruine. Ce qui arriva à Lot qui fut pris dans cette guerre fait voir que ceux qui demeurent avec les méchants sont souvent enveloppés dans les jugements que Dieu déploie sur eux et qu'ainsi il est dangereux de s’engager dans leur commerce.

La victoire qu’Abram remporta est une preuve de la bénédiction dont Dieu favorisait ce patriarche et de sa protection envers Lot. Cela montre aussi qu’il est permis de faire la guerre pour une cause légitime et pour une juste défense.

Enfin, ce qui est dit ici de Melchisedec, roi de Salem et sacrificateur du Dieu Souverain, prouve que le vrai Dieu était connu et adoré dans ce pays-là. Cela doit aussi nous faire souvenir de ce que St. Paul dit dans l’épître aux Hébreux, que ce Melchisedec, qui bénit Abraham et à qui ce patriarche donna la dîme de tout, représentait Jésus-Christ notre Seigneur, le roi et le sacrificateur de l'Église qui devait régner sur toutes choses et exercer un sacerdoce infiniment plus parfait que celui des sacrificateurs juifs et de Melchisedec lui-même.

CHAPITRE XV.

Dieu réitère les promesses qu'il avait faites à Abraham de lui donner un fils et une postérité nombreuse qui posséderait le pays de Canaan, et lui confirme cette promesse par un signe.

1 Après ces choses, la parole de l’Éternel fut adressée à Abram, dans une vision, disant : Abram, ne crains point ; je suis ton bouclier et ta très-grande récompense.

2 Et Abram répondit : Seigneur Éternel, que me donneras-tu ? Je passe ma vie sans avoir d’enfants, et Dammésec Elihéser est l’intendant de ma maison.

3 Abram dit encore : Voici, tu ne m’as point donné d’enfants, et dès là, le serviteur qui est né dans ma maison, sera mon héritier.

4 Et voici, la parole de l’Éternel lui fut adressée, disant : Celui-ci ne sera point ton héritier ; mais celui qui sortira de tes entrailles sera ton héritier.

5 Et après l’avoir mené dehors, il lui dit : Lève maintenant les yeux vers le ciel, et compte les étoiles, si tu les peux compter : c’est ainsi, lui dit-il, que sera ta postérité.

6 Et Abram crut à l’Éternel, et l’Éternel lui imputa cela à justice.

7 Il lui dit encore : Je suis l’Éternel, qui t’ai fait sortir d’Ur des Caldéens, afin de te donner ce pays pour le posséder.

8 Et il dit : Seigneur Éternel, à quoi connaîtrai-je que je le posséderai ?

9 Et il lui répondit : Prends une génisse de trois ans, et une chèvre de trois ans, et un bélier de trois ans, et une tourterelle, et un pigeon.

10 Il prit donc toutes ces choses, et les partagea par le milieu, et il mit chaque moitié vis-à-vis l’une de l’autre ; mais il ne partagea point les oiseaux.

11 Alors une volée d’oiseaux se jeta sur ces bêtes mortes ; mais Abram les chassa.

12 Et comme le soleil se couchait, Abram fut surpris d’un profond sommeil, et voici, il fut saisi d’une frayeur, causée par une grande obscurité qui tomba sur lui.

13 Et l’Éternel dit à Abram : Sache certainement que ta postérité habitera comme étrangère dans un pays qui ne lui appartiendra point, et qu’elle y servira aux habitants du lieu, et qu’elle y sera affligée pendant quatre cents ans.

14 Mais aussi je jugerai la nation à laquelle tes descendants seront assujettis ; et ensuite ils sortiront avec de grands biens.

15 Et toi, tu t’en iras vers tes pères en paix, dans une bonne vieillesse, et tu seras enseveli.

16 Et en la quatrième génération, ils retourneront ici ; car l’iniquité des Amorrhéens n’est pas encore venue à son comble.

17 Et lorsque le soleil fut couché, il y eut une obscurité ténébreuse, et voici, un four fumant et un brandon de feu qui passa entre ces choses qui avaient été partagées.

18 En ce jour-là, l’Éternel traita alliance avec Abram, disant : J’ai donné ce pays à ta postérité, depuis le fleuve d’Égypte jusqu’au grand fleuve, c’est-à-dire le fleuve d’Euphrate ;

19 Les Kéniens, les Kéniziens, les Kadmoniens,

20 Les Héthiens, les Phéréziens, les Réphaïns,

21 Les Amorrhéens, les Cananéens, les Guirguasciens, et les Jébusiens.

REFLEXIONS

L'on voit trois choses dans ce chapitre :

I. Que Dieu réitéra les promesses qu'il avait faites à Abraham et les confirma par un signe miraculeux.
II. Qu'Abraham ayant crû à Dieu, cela lui fut imputé à justice.

III. Que Dieu lui déclara que ces promesses ne s'accompliront pas durant sa vie et que même sa postérité serait affligée pendant quelque temps.

Les réflexions que nous devons faire sur cela sont donc :

I. Que Dieu par un effet de sa bonté a de tout temps trouvé à propos de fortifier la foi de ceux qu'il aime par des signes extérieurs, ce qu'il fait encore par les sacrements desquels nous devons faire un très grand cas,

II. Que tous ceux, qui à l'imitation d'Abraham, croient en Dieu et lui obéissent, seront justifiés comme ce Saint patriarche le fut,

III. Que les enfants de Dieu ont souvent dans ce monde les afflictions en partage et que ce ne sera qu'après cette vie qu'ils verront le parfait accomplissement des promesses que Dieu leur a faites.


CHAPITRE XVI.

On voit dans ce chapitre :

I. La naissance d'Ismaël fils d'Agar.

II. La fuite d’Agar qui sortit de la maison d’Abraham et la prédiction qu’un ange fit à Agar qu’Ismaël serait un prince puissant et qu’il aurait une postérité nombreuse.

1 Or, Saraï, femme d’Abram, ne lui avait point encore fait d’enfant ; mais elle avait une servante égyptienne, nommée Agar,

2 Et elle dit à Abram : Voici maintenant, l’Éternel m’a rendue stérile : viens, je te prie, vers ma servante ; peut-être aurai-je des enfants par elle. Et Abram obéit à la parole de Saraï.

3 Alors Saraï, femme d’Abram, prit Agar, sa servante égyptienne, et la donna pour femme à Abram son mari, après qu’il eut demeuré dix ans au pays de Canaan.

4 Il vint donc vers Agar, et elle conçut. Et Agar voyant qu’elle avait conçu, méprisa sa maîtresse.

5 Alors Saraï dit à Abram : L’outrage qu’on me fait, rejaillit sur toi. J’ai mis ma servante dans ton sein ; mais depuis qu’elle a vu qu’elle était enceinte, elle me regarde avec mépris. Que l’Éternel soit juge entre moi et toi.

6 Alors Abram répondit à Saraï : Voici, ta servante est entre tes mains, traite-la comme il te plaira. Saraï donc la maltraita et elle s’enfuit de devant elle.

7 Mais l’ange de l’Éternel la trouva auprès d’une fontaine d’eau au désert, près de la fontaine qui est au chemin de Sçur.

8 Et il lui dit : Agar, servante de Saraï, d’où viens-tu ? et où vas-tu ? Et elle répondit : Je fuis de devant Saraï, ma maîtresse.

9 Et l’ange de l’Éternel lui dit : Retourne à ta maîtresse, et t’humilie sous elle.

10 L’ange de l’Éternel lui dit encore : Je multiplierai tellement ta postérité, qu’elle ne se pourra compter, tant elle sera grande.

11 L’ange de l’Éternel lui dit aussi : Voici, tu as conçu, et tu enfanteras un fils que tu appelleras Ismaël ; car l’Éternel a entendu ta voix dans ton affliction,

12 Et il sera semblable à un âne sauvage : il lèvera sa main contre tous, et tous lèveront la main contre lui ; et il dressera ses tentes aux yeux de tous ses frères.

13 Alors elle appela le nom de l’Éternel qui lui parlait : Tu es le Dieu fort qui m’as vue. Car elle dit : N’ai-je pas aussi vu ici celui qui me voyait ?

14 C’est pourquoi on appela ce puits le puits du Vivant qui me voit. Il est entre Kadès et Béred.

15 Agar donc enfanta un fils à Abram. Et Abram appela son fils, qu’Agar lui avait enfanté, Ismaël.

16 Or, Abram était âgé de quatre-vingt-six ans, quand Agar lui enfanta Ismaël.

REFLEXIONS
Le mariage d'Abraham avec Agar doit être regardé comme une de ces choses que Dieu tolérait alors, à cause de l’état où les hommes se rencontraient, mais qui était opposées à la première institution du mariage et à cause de cela sont absolument défendues par les lois de l'Évangile. Les divisions qui arrivèrent à cette occasion dans la famille d'Abraham montrent que ces sortes de mariages avaient d’ordinaire des suites funestes.

Cependant, il faut remarquer que Dieu prit soin de l’enfant d’Agar et qu’il promit de le bénir parce qu’il était fils d'Abraham et ce fut aussi ce qui arriva, la postérité d’Ismaël ayant été très puissante et très nombreuse et ayant subsisté longtemps dans les siècles suivants, comme nous l'apprenons de l'histoire.

CHAPITRE XVII.

Dieu confirme de nouveau l'alliance qu’il avait traitée avec Abraham et les promesses qu’il lui avaient faites et pour l'en assurer, il lui change son nom. Il lui donne la loi de la circoncision, il lui promet la naissance d'Isaac, et Abraham obéissant à l'ordre de Dieu fut circoncis avec toute sa maison.

1 Puis Abram étant âgé de quatre-vingt-dix-neuf ans, l’Éternel lui apparut et lui dit : Je suis le Dieu fort, tout-puissant : Marche devant ma face, et en intégrité.

2 Et je ferai alliance avec toi, et je te multiplierai très abondamment.

3 Alors Abram tomba sur sa face ; et Dieu lui parla et lui dit :

4 Quant à, moi, voici, mon alliance est avec toi, et tu deviendras père d’une multitude de nations.

5 Et tu ne seras plus appelé Abram, mais ton nom sera Abraham ; car je t’ai établi pour être le père d’une multitude de nations.

6 Et je te ferai croître très abondamment, et je te ferai devenir des nations ; même des rois sortiront de toi.

7 J’établirai donc mon alliance entre moi et toi, et entre ta postérité après toi dans leurs âges, pour être une alliance éternelle, afin que je sois ton Dieu, et le Dieu de ta postérité après toi.

8 Et je te donnerai, et à ta postérité après toi, le pays où tu demeures comme étranger, tout le pays de Canaan, en possession perpétuelle ; et je leur serai Dieu.

9 Dieu dit encore à Abraham : Mais toi, tu garderas mon alliance, toi et ta postérité après toi, dans leurs âges.

10 C’est ici l’alliance que j’ai faite avec vous, et avec ta postérité après toi ; vous la garderez : tout mâle d’entre vous sera circoncis :

11 Vous circoncirez la chair de votre prépuce, et cela sera pour un signe de l’alliance qui est entre moi et vous.

12 Tout enfant mâle de huit jours sera circoncis parmi vous dans vos générations, tant celui qui est né en la maison, que l’esclave acheté par argent de tout étranger qui n’est point de ta race.

13 On ne manquera donc point de circoncire celui qui est né en ta maison, et celui qui est acheté de ton argent ; et mon alliance sera dans votre chair, pour être une alliance perpétuelle.

14 Et le mâle incirconcis, duquel la chair du prépuce n’aura point été circoncise, sera retranché du milieu de ses peuples, parce qu’il aura violé mon alliance.

15 Dieu dit aussi à Abraham : Quant à Saraï, ta femme, tu ne l’appelleras plus Saraï, mais son nom sera Sara.

16 Et je la bénirai ; et même je te donnerai d’elle un fils. Je la bénirai, et elle deviendra des nations ; et des rois de peuples sortiront d’elle.

17 Alors Abraham se prosterna la face en terre, et il sourit, en disant en son cœur : Naîtrait-il un fils à un homme âgé de cent ans ? Et Sara, âgée de quatre-vingt-dix ans, aurait-elle un enfant ?

18 Et Abraham dit à Dieu : Je te prie qu’Ismaël vive devant toi.

19 Et Dieu dit : Certainement, Sara ta femme t’enfantera un fils, et tu l’appelleras Isaac, et j’établirai mon alliance avec lui, pour être une alliance perpétuelle pour sa postérité après lui.

20 Je t’ai aussi exaucé touchant Ismaël : voici, je l’ai béni, et je le ferai croître et multiplier très abondamment. Il sera père de douze princes ; et je le ferai devenir une grande nation.

21 Mais j’établirai mon alliance avec Isaac, que Sara t’enfantera dans un an, en cette même saison.

22 Et après que Dieu eut achevé de parler, il remonta de devant Abraham.

23 Et Abraham prit son fils Ismaël, et tous ceux qui étaient nés en sa maison, et tous ceux qu’il avait achetés de son argent, tous les mâles qui étaient des gens de sa maison ; et il circoncit la chair de leur prépuce, en ce même jour-là, comme Dieu lui avait dit.

24 Abraham était âgé de quatre-vingt-dix-neuf ans, quand il se circoncit.

25 Et Ismaël son fils avait treize ans, lorsqu’il fut circoncis.

26 Abraham et Ismaël son fils furent circoncis en un même jour.

27 Et toutes les personnes de sa maison, tant ceux qui étaient nés en la maison, que ceux qui avaient été achetés des étrangers par argent, furent circoncis avec lui.

REFLEXIONS
La principale instruction que nous devons tirer de ce chapitre qui contient l'institution de la circoncision est celle que St. Paul nous donne au chapitre IV de l'épître aux Romains. Cet apôtre remarque que lorsqu’Abraham reçut le signe de la circoncision, il avait déjà été justifié auparavant par la foi, d'où il conclut que ce n'est ni la circoncision, ni aucune cérémonie extérieure qui rendent les hommes agréables à Dieu et qu'il n'y a qu'une foi sincère et accompagnée de l'obéissance qui produise cet effet. Cependant, cette même histoire montre qu'il ne faut pas mépriser ou négliger les signes extérieurs de l'alliance divine et en particulier les cérémonies et les sacrements que Dieu a établis pour fortifier notre foi et pour confirmer ses promesses, qu'au contraire nous devons les respecter, les observer religieusement et en faire un usage qui serve à nous affermir dans la foi et dans l'amour de Dieu et à nous exciter de plus en plus à la piété.

CHAPITRE XVIII.

Trois anges apparaissent à Abraham qui lui promettent la naissance d’Isaac et qui l'avertissent que Dieu allait détruire Sodome et Gomorre. Abraham intercède auprès du Seigneur pour les habitants de Sodome, mais inutilement, Dieu lui ayant fait comprendre que la corruption de ces gens-là était parvenue à son comble et que leur ruine était arrêtée et inévitable.

1 Puis l’Éternel apparut à Abraham dans les plaines de Mamré, comme il était assis à la porte de sa tente pendant la chaleur du jour.

2 Car, levant ses yeux, il regarda, et voici, trois hommes parurent près de lui ; et dès qu’il les eut aperçus, il courut au-devant d’eux, de la porte de sa tente, et il se prosterna en terre ;

3 Et il dit : Mon Seigneur, je te prie, si j’ai trouvé grâce à tes yeux, ne passe point, je te prie, la tente de ton serviteur.

4 Qu’on prenne, je vous prie, un peu d’eau, et lavez vos pieds ; cependant reposez-vous sous un arbre.

5 Et j’apporterai un morceau de pain, afin de fortifier votre cœur, ensuite vous passerez outre ; car c’est pour cela que vous êtes venus vers votre serviteur. Et ils dirent : Fais ce que tu as dit.

6 Abraham donc s’en alla en hâte dans la tente vers Sara, et lui dit : Hâte-toi, prends trois mesures de fleur de farine, pétris-les, et fais des gâteaux.

7 Puis Abraham courut à son troupeau, et il y prit un veau tendre et bon, et il le donna à un serviteur, qui se hâta de l’apprêter.

8 Ensuite il prit du beurre et du lait, et le veau qu’on avait apprêté, et il le mit devant eux. Il se tenait auprès d’eux sous l’arbre, et ils mangèrent.

9 Et ils lui dirent : Où est Sara ta femme ? Et il répondit : La voilà dans la tente.

10 Et un d’entre eux dit : Je ne manquerai pas de revenir vers toi dans un an, en ce même temps où nous sommes ; et voici, Sara ta femme aura un fils. Et Sara l’écoutait à la porte de la tente, laquelle était derrière lui.

11 Or, Abraham et Sara étaient vieux et avancés en âge ; et Sara n’avait plus ce que les femmes ont accoutumé d’avoir.

12 Et Sara rit en soi-même, disant : Etant vieille, aurai-je cette satisfaction ? mon seigneur étant fort âgé.

13 Et l’Éternel dit à Abraham : Pourquoi Sara a-t-elle ri, en disant : Serait-il vrai que j’aurais un enfant, étant vieille comme je suis ?

14 Y a-t-il quelque chose qui soit caché à l’Éternel ? je reviendrai vers toi en cette saison, en ce même temps où nous sommes, et Sara aura un fils.

15 Et Sara nia d’avoir ri, disant : Je n’ai point ri, car elle eut peur. Mais il dit : Cela n’est pas ainsi ; car tu as ri.

16 Et ces hommes se levèrent de là, et regardèrent vers Sodome ; et Abraham marchait avec eux, pour les conduire.

17 Et l’Éternel dit : Cacherai-je à Abraham ce que je m’en vais faire ?

18 Puisque Abraham doit certainement être une nation grande et puissante, et que toutes les nations de la terre seront bénies en lui ?

19 Car je le connais, et je sais qu’il commandera à ses enfants, et à sa maison après lui, de garder la voie de l’Éternel, pour faire ce qui est juste et droit ; afin que l’Éternel fasse venir sur Abraham tout ce qu’il lui a dit.

20 Et l’Éternel dit : Parce que le cri de Sodome et de Gomorre est augmenté, et que leur péché est très grief ;

21 Je descendrai maintenant et je verrai, s’ils ont entièrement fait toutes les choses dont le cri est venu jusqu’à moi ; et si cela n’est pas, je le saurai.

22 Ces hommes donc partant de là, allaient vers Sodome ; mais Abraham se tint encore devant l’Éternel.

23 Et Abraham s’approcha et dit : Feras-tu périr même le juste avec le méchant ?

24 Peut-être y a-t-il cinquante justes dans la ville, les feras-tu périr aussi ? Ne pardonneras-tu point à la ville, à cause de cinquante justes, s’ils y étaient ?

25 Il ne sera pas dit de toi que tu fasses mourir le juste avec le méchant, et que le juste soit traité comme le méchant. Non, cela ne sera pas dit de toi. Celui qui juge toute la terre, ne fera-t-il point justice ?

26 Et l’Éternel dit : Si je trouve en Sodome cinquante justes dans la ville, je pardonnerai à tout le lieu, pour l’amour d’eux.

27 Et Abraham répondit, disant : Voici, maintenant j’ai pris la hardiesse de parler au Seigneur, bien que je ne sois que poudre et que cendre.

28 Peut-être en manquera-t-il cinq des cinquante justes : détruiras-tu toute la ville pour cinq qui manqueraient ? Et il lui répondit : Je ne la détruirai point, si j’y trouve quarante-cinq justes.

29 Et Abraham continua de lui parler, en disant : Peut-être ne s’en trouvera-t-il que quarante ? Et il dit : Je ne détruirai point la ville à cause de ces quarante.

30 Et Abraham dit : Je prie le Seigneur de ne s’irriter pas, si je parle encore : Peut-être s’en trouvera-t-il trente ? Et il dit : Je ne la détruirai point, si j’y en trouve trente.

31 Et Abraham dit : Voici maintenant, j’ai pris la hardiesse de parler au Seigneur : Peut-être s’en trouvera-t-il vingt ? Et il dit : Je ne la détruirai point à cause de ces vingt.

32 Et Abraham dit : Je prie que le Seigneur ne se fâche point ; je parlerai encore une seule fois : Peut-être s’y en trouvera-t-il dix ? Et il dit : Je ne la détruirai point à cause de ces dix.

33 Et l’Éternel s’en alla, quand il eut cessé de parler à Abraham. Et Abraham retourna en son lieu.

REFLEXIONS
Ce chapitre nous présente quatre réflexions principales :

I. La première est celle que St. Paul fait dans l’épître aux Hébreux, sur ce qu'Abraham reçut les trois anges qui lui apparurent : N’oubliez pas, dit-il l’hospitalité, car par elle, quelques-uns ont logé des anges chez eux sans le savoir.

II. La deuxième réflexion est qu’il s’est écoulé plusieurs années sans que le fils que Dieu avait promis à Abraham naquît, mais que les anges lui annoncèrent qu’Isaac naîtrait cette année-là. C’est ainsi que les promesses de Dieu se trouvent toujours véritables quoiqu'il diffère de les exécuter.
III. Il est à remarquer en troisième lieu que Dieu étant sur le point de détruire Sodome voulut le faire connaître à Abraham afin que ce patriarche reconnût que cette ruine procédait de Dieu et qu’il fût engagé par là à craindre toujours le Seigneur, à se confier en ses promesses et à faire régner la piété dans sa famille. On voit par-là que Dieu se communique à ceux qui le servent fidèlement. Cela nous montre aussi que la considération des jugements de Dieu doit nous inciter à le craindre, que le devoir des pères est de recommander surtout à leurs enfants de marcher dans les voies du Seigneur et que Dieu bénit la postérité des hommes droits.

IV. La quatrième réflexion regarde l’intercession d’Abraham en faveur de ceux de Sodome et le refus que Dieu fit de leur pardonner parce qu’il n’y avait pas dix justes dans cette ville. Apprenons de là que nous devons prier les uns pour les autres et tâcher en particulier de détourner la colère de Dieu de dessus ceux qui en sont menacés, que Dieu a beaucoup d'égard aux prières et à la piété des justes et qu'il épargne quelque fois les villes et les peuples pour l’amour d’eux, mais que lorsque le nombre des gens de bien est fort diminué et que le crime et l’impiété prévalent, les prières des justes sont inutiles et que rien ne garantit les pécheurs de la vengeance céleste.

 CHAPITRE XIX.

Ce chapitre contient l'histoire de la destruction de Sodome et des lieux voisins qui furent consumés par le feu du ciel. Lot ayant été préservé de cette destruction se retira à Tsohar avec ses deux filles.

1 Or, sur le soir les deux anges vinrent à Sodome. Et Lot, qui était assis à la porte de Sodome, les ayant vus, se leva pour aller au-devant d’eux, et il se prosterna le visage en terre.

2 Et il leur dit : Voici, je vous prie, Messieurs, retirez-vous maintenant dans la maison de votre serviteur, et y logez cette nuit ; lavez aussi vos pieds, et vous vous lèverez de bon matin, et vous continuerez votre chemin. Non, dirent-ils, mais nous passerons cette nuit dans la rue.

3 Mais il les pressa tant qu’ils se retirèrent chez lui. Et quand ils furent entrés dans sa maison, il leur fit un festin, et fit cuire des pains sans levain, et ils mangèrent.

4 Mais avant qu’ils s’allassent coucher, les hommes de la ville, les hommes, dis-je, de Sodome, environnèrent la maison, depuis les plus jeunes jusqu’aux vieillards, tout le peuple, depuis un bout jusqu’à l’autre.

5 Et appelant Lot, ils lui dirent : Où sont ces hommes qui sont venus cette nuit chez toi ? Fais-les sortir, afin que nous les connaissions.

6 Alors Lot sortit de sa maison, pour leur parler à la porte, et ayant fermé la porte après soi,

7 Il leur dit : Je vous prie, mes frères, ne leur faites point de mal.

8 Voici, j’ai deux filles qui n’ont point encore connu d’homme ; je vous les amènerai, et vous les traiterez comme il vous plaira, pourvu que vous ne fassiez point de mal à ces hommes, parce qu’ils sont venus à l’ombre de mon toit.

9 Et ils lui dirent : Retire-toi de là. Ils dirent encore : Cet homme seul est venu pour habiter ici comme étranger, et il nous jugera ! Maintenant nous te traiterons plus mal qu’eux. Et ils faisaient violence à Lot, et s’approchèrent pour rompre la porte.

10 Mais ces hommes avançant leurs mains, firent rentrer Lot dans la maison, et fermèrent la porte.

11 Ils frappèrent ensuite d’éblouissement les hommes qui étaient à la porte de la maison, depuis le plus petit jusqu’au plus grand ; de sorte qu’ils se lassèrent à chercher la porte.

12 Alors ces hommes dirent à Lot : Qui as-tu encore ici qui t’appartienne ; ou un gendre, ou des fils ou des filles, ou quelque autre de tes proches dans la ville ? Fais-les sortir de ce lieu.

13 Car nous allons détruire ce lieu, parce que le cri des péchés de ses habitants s’est élevé devant l’Éternel, et il nous a envoyés pour le détruire.

14 Lot donc sortit et parla à ses gendres, qui devaient prendre ses filles, et leur dit : Levez-vous, et sortez de ce lieu ; car l’Éternel va détruire la ville. Mais il semblait à ses gendres qu’il se moquait.

15 Et sitôt que l’aube du jour fut levée, les anges pressèrent Lot, disant : Lève-toi, prends ta femme et tes deux filles, qui se trouvent ici, de peur que tu ne périsses dans la punition que je vais faire de la ville.

16 Et comme il tardait, ces hommes le prirent par la main ; ils prirent aussi par la main sa femme et ses deux filles, parce que l’Éternel l’épargnait ; et ils l’emmenèrent et le mirent hors de la ville.

17 Or, dès qu’ils les eurent fait sortir de la ville, l’un d’eux dit : Sauve ta vie, ne regarde point derrière toi, et ne t’arrête en aucun endroit de la plaine ; sauve-toi sur la montagne, de peur que tu ne périsses.

18 Et Lot leur répondit : Non, Seigneur, je te prie ;

19 Voici, ton serviteur a maintenant trouvé grâce devant toi, et tu as signalé ta miséricorde envers moi en me sauvant la vie. Mais je ne me pourrai sauver sur la montagne, que le mal ne m’atteigne, et que je ne meure.

20 Voici, je te prie, il y a ici près une ville où je puis m’enfuir, et elle est petite ; je te prie, que je m’y sauve. N’est-elle pas petite ? et mon âme vivra.

21 Et il lui dit : Voici, je t’accorde encore cette grâce, de ne détruire point la ville dont tu as parlé.

22 Hâte-toi, sauve-toi là ; car je ne pourrai rien faire jusqu’à ce que tu y sois entré. C’est pour cette raison que cette ville fut appelée Tsohar.

23 Comme le soleil se levait sur la terre, Lot entra dans Tsohar.

24 Alors l’Éternel fit pleuvoir des cieux, sur Sodome et sur Gomorre, du soufre et du feu, de la part de l’Éternel ;

25 Et il détruisit ces villes-là, et toute la plaine, et tous les habitants des villes, et le germe de la terre.

26 Mais la femme de Lot regarda derrière soi, et elle devint une statue de sel.

27 Et Abraham se levant de bon matin, vint au lieu où il s’était tenu devant l’Éternel.

28 Et regardant vers Sodome et Gomorre, et vers toute la terre de cette plaine-là, il vit monter de la terre une fumée comme la fumée d’une fournaise.

29 Lorsque Dieu détruisait les villes de la plaine, il se souvint d’Abraham, et il fit partir Lot, afin qu’il ne fût point dans cette ruine, quand il détruisit les villes où Lot habitait.

30 Et Lot monta de Tsohar, et habita sur la montagne avec ses deux filles, car il craignait de demeurer dans Tsohar ; et il se retira dans une caverne avec ses deux filles.

31 Et l’aînée dit à la plus jeune : Notre père est vieux, et il n’y a personne sur la terre pour venir vers nous, selon la coutume de tous les pays.

32 Viens, donnons du vin à notre père, et couchons avec lui, afin que nous conservions la race de notre père.

33 Elles donnèrent donc du vin à boire à leur père cette nuit-là. Et l’aînée vint et coucha avec son père ; mais il ne s’aperçut point, ni quand elle se coucha, ni quand elle se leva.

34 Et le lendemain l’aînée dit à la plus jeune : Voici, j’ai couché la nuit passée avec mon père ; donnons-lui encore cette nuit du vin à boire ; puis va, et couche avec lui, et nous conserverons la race de notre père.

35 En cette nuit-là donc elles donnèrent encore du vin à boire à leur père. Et la plus jeune se leva et coucha avec lui ; mais il ne s’aperçut point, ni quand elle se coucha, ni quand elle se leva.

36 Ainsi les deux filles de Lot conçurent de leur père.

37 L’aînée enfanta un fils, et appela son nom Moab. C’est lui qui est le père des Moabites jusqu’à ce jour.

38 Et la plus jeune aussi enfanta un fils, et appela son nom Ben-Hammi. C’est lui qui est le père des enfants de Hammon jusqu’à ce jour.

REFLEXIONS
Nous avons à remarquer sur la mémorable histoire de la destruction de Sodome et des autres villes voisines :

I. Premièrement que ce qui entraîna les habitants de ces villes-là dans ces crimes affreux, ce fut, comme le dit un prophète, l’orgueil, l’abondance, l’aise et l’oisiveté, aussi bien que la dureté envers les misérables. Ainsi, cet exemple fait voir combien il est dangereux d’être trop à son aise et de se livrer aux plaisirs et en particulier à quels excès la sensualité et l'impureté peuvent porter les hommes.

II. Ce terrible jugement que Dieu exerça sur Sodome est une preuve du jugement et de la condamnation qu’il réserve à tous les impies et en particulier à ceux qui se livrent à des passions infâmes. C'est ce que St. Pierre nous enseigne lorsqu'il dit : Que si Dieu a condamné à une entière destruction les villes de Sodome et de Gomorre, les réduisant en cendre et les mettant en exemple pour ceux qui vivraient dans l'impiété, il réserve aussi tous les injustes pour être punis au jour du jugement et principalement ceux qui suivent les désirs de la chair et les cupidités infâmes.

III. Le même apôtre remarque sur cette histoire : Que Dieu délivra le juste Lot de l'embrasement de Sodome, que cet homme de bien qui habitait parmi ces abominables affligeait tous les jours son âme juste à cause de ce qu’il voyait et de ce qu’il entendait de leurs méchantes actions et que c’est ainsi que Dieu sait délivrer de la tentation et de l'affliction ceux qui l'honorent.

IV. On voit dans cette histoire que les gendres de Lot furent enveloppés dans la destruction de Sodome pour s'être moqué des avertissements que Lot leur avait donnés et que sa femme fut changée en une statue de sel parce qu'elle tourna ses yeux et son cœur du côté de cette ville d'où elle était sortie. Ces deux exemples nous apprennent à profiter des avertissements que Dieu nous fait donner, à craindre ses menaces et à le suivre quand il nous appelle, sans regarder aux choses du monde. C’est à quoi notre Seigneur nous exhorte lorsqu’il dit dans l’Évangile : Souvenez-vous de la femme de Lot. Enfin, ce qui arriva à Lot lui-même et à ses deux filles après qu’il fut échappé de la ruine de Sodome nous montre que nous devons être toujours et partout sur nos gardes, éviter toutes les occasions de pécher et nous éloigner particulièrement de l'intempérance à cause des suites funestes qu’elle a ordinairement.

 CHAPITRE XX.

Abraham étant allé demeurer à Guerar, Abimelec, roi de ce lieu-là, lui enlève sa femme et la lui rend ensuite par le commandement de Dieu.

 1 Abraham s’en alla de là au pays du Midi, et demeura entre Kadès et Sçur, et habita comme étranger à Guérar.

2 Et Abraham dit de Sara sa femme : C’est ma sœur. Abimélec donc, roi de Guérar, envoya des gens pour enlever Sara.

3 Mais Dieu, pendant la nuit, apparut en songe à Abimélec, et lui dit : Voici, tu es mort, à cause de la femme que tu as prise ; car elle a un mari.

4 Or, Abimélec ne s’était point approché d’elle. Il répondit donc : Seigneur, puniras-tu aussi de mort la nation juste ?

5 Ne m’a-t-il pas dit : C’est ma sœur ? Elle-même aussi n’a-t-elle pas dit : C’est mon frère ? J’ai fait ceci dans l’intégrité de mon cœur, et avec des mains pures.

6 Et Dieu lui dit en songe : Je sais aussi que tu l’as fait dans l’intégrité de ton cœur ; aussi n’ai-je pas permis que tu ne péchasses contre moi ; et c’est pour cela que je ne t’ai point permis de la toucher.

7 Maintenant donc, rends la femme à cet homme ; car il est prophète, et il priera pour toi, et tu vivras. Mais si tu ne la rends pas, sache que tu mourras certainement, et tout ce qui est à toi.

8 Et Abimélec se leva de bon matin, et appela tous ses serviteurs, et il leur fit entendre toutes ces choses ; et ils furent saisis de crainte.

9 Puis, Abimélec appela Abraham et lui dit : Que nous as-tu fait ? Et en quoi t’ai-je offensé, que tu aies fait venir sur moi et mon royaume un si grand péché ? Tu m’as fait des choses qui ne se doivent pas faire.

10 Abimélec dit aussi à Abraham : Qu’as-tu vu, qui t’ait obligé de faire cela ?

11 Et Abraham répondit : Je l’ai fait, parce que je disais en moi-même : Sans doute il n’y a point de crainte de Dieu en ce lieu-ci, et ils me tueront à cause de ma femme.

12 Mais aussi, à la vérité, elle est ma sœur, fille de mon père, bien qu’elle ne soit point fille de ma mère ; et elle m’a été donnée pour femme.

13 Or, il est arrivé que quand Dieu m’a conduit çà et là, hors de la maison de mon père, je lui ai dit : c’est ici la faveur que tu me feras : Dans tous les lieux où nous viendrons, dis de moi : C’est mon frère.

14 Alors Abimélec prit des brebis, des bœufs, des serviteurs et des servantes, et il les donna à Abraham, et lui rendit Sara sa femme.

15 Et il lui dit : Voici, mon pays est à ta disposition ; habite où il te plaira.

16 Et il dit à Sara : J’ai donné à ton frère mille pièces d’argent ; voici, il t’est un voile sur les yeux devant tous ceux qui sont avec toi, et devant tous les autres. C’est ainsi qu’elle fut reprise.

17 Et Abraham pria Dieu ; et Dieu guérit Abimélec, sa femme et ses servantes, et elles enfantèrent.

18 Car l’Éternel avait entièrement rendu stérile toute la maison d’Abimélec, à cause de Sara, femme d’Abraham.

REFLEXIONS
I. Ce qui arriva à Abraham lorsqu'Abimelec lui enleva sa femme et la punition que Dieu envoya à cause de cela à ce prince nous fait voir qu'Abraham était exposé à bien des traverses, mais que Dieu l'accompagnait partout et le couvrait de sa protection.

II. Il parait en second lieu de cette histoire que le vrai Dieu était connu dans le pays où Abraham était alors et que même on y avait quelque crainte de la divinité, c'est ce que l'apparition de Dieu à Abimelec et la réponse de ce roi prouvent clairement.

III. L'obéissance d'Abimelec qui rendit Sara aussitôt que Dieu lui eut fait connaître qu'elle était femme d'Abraham et l'horreur que ce prince avait pour l'adultère montrent qu'il craignait d'offenser Dieu et ce roi s'élèvera en jugement contre tant de princes chrétiens qui, étant si clairement avertis de la volonté de Dieu, n'y ont aucun égard et s'abandonnent au péché et en particulier à toutes sortes d'impuretés et de dissolutions.

IV. Enfin, la guérison que Dieu accorda à Abimelec, après qu'il eut rendu Sara et qu'Abraham eut prié pour lui, nous apprend que Dieu pardonne les péchés commis par ignorance, qu'il fait cesser le châtiment aussitôt qu'on évite de pécher et que les prières et l'intercession des gens de bien ont une grande efficace devant lui.

CHAPITRE XXI.

Ce chapitre raconte :

I. La naissance d'Isaac. II. L’occasion pour laquelle Ismaël fut chassé de la maison d'Abraham avec Agar sa mère et la manière dont Dieu conserva la vie à Ismaël. III. L’alliance d'Abraham avec le roi Abimelec.

1 Et l’Éternel visita Sara, comme il l’avait dit, et il lui fit ainsi qu’il en avait parlé.

2 Sara donc conçut, et enfanta un fils à Abraham en sa vieillesse, dans la saison que Dieu lui avait dit.

3 Et Abraham appela son fils (qui lui était né, et que Sara lui avait enfanté) Isaac.

4 Et Abraham circoncit son fils Isaac âgé de huit jours, comme Dieu lui avait commandé.

5 Or, Abraham était âgé de cent ans, quand Isaac, son fils, lui naquit.

6 Et Sara dit : Dieu m’a donné un sujet de rire ; tous ceux qui l’apprendront, riront avec moi.

7 Elle dit aussi : Qui eût dit à Abraham que Sara allaiterait des enfants ? car je lui ai enfanté un fils en sa vieillesse.

8 Et l’enfant crût, et fut sevré. Et Abraham fit un grand festin au jour qu’Isaac fut sevré.

9 Et Sara vit que le fils d’Agar, Égyptienne, qu’elle avait enfanté à Abraham, se moquait.

10 Et elle dit à Abraham : Chasse cette servante et son fils ; car le fils de cette servante n’héritera point avec mon fils, avec Isaac.

11 Et cela déplut fort à Abraham, à l’occasion de son fils.

12 Mais Dieu dit à Abraham : N’aie point de chagrin à l’occasion de cet enfant, ni de ta servante. Dans toutes les choses que te dira Sara, obéis à sa parole ; car c’est en Isaac que ta postérité sera appelée de ton nom.

13 Et, toutefois, je ferai aussi devenir le fils de la servante une nation, parce qu’il est de ta race.

14 Alors Abraham se leva de bon matin et prit du pain et une bouteille d’eau, et il les donna à Agar, en les mettant sur son épaule ; il lui donna aussi son enfant et la renvoya. Et elle se mit en chemin, et fut errante au désert de Béer-scébah.

15 Or, quand l’eau de la bouteille eut manqué, elle mit son enfant sous un arbrisseau.

16 Et elle s’éloigna de lui à la distance d’un trait d’arc, et s’assit vis-à-vis ; car elle dit : Que je ne voie point mourir cet enfant. Et s’étant assise vis-à-vis, elle éleva sa voix, et pleura.

17 Et Dieu entendit la voix du jeune garçon, et l’ange de Dieu appela des cieux Agar, et lui dit : Qu’as-tu, Agar ? Ne crains point, car Dieu a entendu la voix du jeune garçon, du lieu où il est.

18 Lève-toi, lève ce jeune garçon, et prends-le par la main ; car je le ferai devenir une grande nation.

19 Et Dieu ouvrit ses yeux ; et elle, ayant vu un puits d’eau, s’y en alla, et remplit la bouteille d’eau, et donna à boire à ce jeune garçon.

20 Et Dieu fut avec ce jeune garçon, qui devint grand, et habita au désert ; et il fut tireur d’arc.

21 Et il demeura au désert de Paran. Et sa mère lui prit une femme du pays d’Égypte.

22 Et il arriva qu’en ce temps-là Abimélec, accompagné de Picol, chef de son armée, parla à Abraham, disant : Dieu est avec toi dans toutes les choses que tu fais.

23 Maintenant donc, jure-moi par le nom de Dieu que tu ne me mentiras point, ni à mes enfants, ni aux enfants de mes enfants, et que tu me traiteras, et le pays auquel tu as habité comme étranger, avec la même bonté avec laquelle je t’ai traité.

24 Et Abraham répondit : Je te le jurerai.

25 Mais Abraham fit ses plaintes à Abimélec, à l’occasion d’un puits d’eau dont les serviteurs d’Abimélec s’étaient emparés par violence.

26 Et Abimélec dit : Je n’ai point su qui a fait cela ; tu ne m’en as point aussi averti, et je n’en ai point ouï parler jusqu’à ce jour.

27 Alors Abraham prit des brebis et des bœufs, et les donna à Abimélec, et ils firent alliance ensemble.

28 Et Abraham mit à part sept jeunes brebis de sa bergerie.

29 Et Abimélec dit à Abraham : Que veulent dire ces sept brebis que tu as mises à part ?

30 Et il répondit : C’est que tu prendras ces sept jeunes brebis de ma main, afin qu’elles me servent de témoignage, que j’ai creusé ce puits.

31 C’est pourquoi on appela ce lieu-là Béer-scébah ; car tous deux y jurèrent.

32 Ils traitèrent donc alliance en Béer-scébah. Puis Abimélec se leva avec Picol, chef de son armée, et ils retournèrent au pays des Philistins.

33 Et Abraham planta une chênaie en Béer-scébah, et il invoqua là le nom de l’Éternel, le Dieu fort d’éternité.

34 Et Abraham habita longtemps comme étranger au pays des Philistins.

REFLEXIONS
I. La première réflexion qu’il faut faire sur ce chapitre regarde la naissance d’Isaac qui naquit à Abraham quoique ce patriarche et Sara sa femme fussent d'un âge fort avancé. On voit dans cet événement l’accomplissement des promesses que Dieu avait faites à Abraham de lui donner un fils qui serait son héritier et qui aurait part à l'alliance divine. On y remarque de plus la vertu de la foi, puisque comme St. Paul le dit dans l’épître aux Hébreux, ce fut par la foi aux promesses de Dieu qu’Abraham et Sara eurent ce fils qui leur avait été promis. II. Sur ce que Dieu voulut qu'Ismaël sortit de la maison d'Abraham et qu'il ne fut pas son héritier, St. Paul remarque que tous ceux qui descendaient d’Abraham n’étaient pas réputés ses enfants et n’appartenaient pas à l'élection divine, que Dieu fait part de ses grâces à qui bon lui semble et dans la mesure qu'il le trouve à propos et que la naissance charnelle, nom plus que la simple profession de religion ne servent de rien à ceux qui n'ont pas une véritable foi. Il est cependant à remarquer que Dieu prit soin d’Ismaël et qu’il le bénit parce qu’il descendait d’Abraham bien qu’il fût exclu des avantages qui avaient été promis à Isaac. Dieu distribue ses faveurs dans un degré différent et il ne laisse pas de faire du bien à ceux-là même qui sont exclus de certains privilèges particuliers.

III. Enfin, l'alliance qu'Abraham traita avec Abimelec montre qu'il est permis aux personnes qui craignent Dieu de contracter des alliances pour leur sûreté et que ces alliances doivent être gardées inviolablement.

CHAPITRE XXII.

Ce chapitre contient l'histoire du sacrifice d'Abraham, et le dénombrement des enfants de Nacor son frère.

1 Il arriva après ces choses que Dieu éprouva Abraham et lui dit : Abraham ; et il répondit : Me voici.

2 Dieu lui dit encore : Prends maintenant ton fils, ton unique, celui que tu aimes, savoir, Isaac, et va-t’en au pays de Morija, pour l’offrir là en holocauste, sur une des montagnes que je te dirai.

3 Abraham donc s’étant levé de bon matin, bâta son âne, et prit deux de ses serviteurs avec lui, et Isaac son fils. Et ayant fendu le bois pour l’holocauste, il se mit en chemin et s’en alla au lieu que Dieu lui avait dit.

4 Au troisième jour, Abraham levant ses yeux, vit le lieu de loin.

5 Et il dit à ses serviteurs : Demeurez ici avec l’âne. Nous marcherons, l’enfant et moi, jusque-là, et nous adorerons l’Eternel ; ensuite nous reviendrons à vous.

6 Et Abraham prit le bois de l’holocauste, et le mit sur Isaac son fils, et prit le feu en sa main, et un couteau, et ils s’en allèrent tous deux ensemble.

7 Alors Isaac parla à Abraham son père, et dit : Mon père. Abraham répondit : Me voici, mon fils. Et il dit : Voici le feu et le bois ; mais où est la bête pour l’holocauste ?

8 Et Abraham répondit : Mon fils, Dieu se pourvoira lui-même pour l’holocauste. Et ils marchaient tous deux ensemble.

9 Et étant venus au lieu que Dieu lui avait dit, Abraham bâtit là un autel, et rangea le bois, et il lia Isaac son fils et le mit sur le bois qu’il avait dressé sur l’autel.

10 Puis Abraham, avançant sa main, prit le couteau pour égorger son fils.

11 Mais l’ange de l’Eternel lui cria des cieux, disant : Abraham, Abraham. Et il répondit : Me voici.

12 Et il lui dit : Ne mets pas ta main sur l’enfant, et ne lui fais point de mal ; car maintenant j’ai connu que tu crains Dieu, puisque tu n’as point épargné ton fils, ton unique, pour moi.

13 Et Abraham, levant ses yeux, regarda, et voici, derrière lui un bélier qui était retenu à un buisson par les cornes. Alors Abraham alla prendre le bélier et l’offrit en holocauste à la place de son fils.

14 Et Abraham appela ce lieu-là, l’Eternel y pourvoira. C’est pourquoi on dit aujourd’hui : Il y sera pourvu sur la montagne de l’Eternel.

15 Et l’ange de l’Eternel cria des cieux à Abraham pour la seconde fois,

16 disant : J’ai juré par moi-même, dit l’Eternel, parce que tu as fait cela, et que tu n’as point épargné ton fils, ton unique ;

17 certainement, je te bénirai, et je multiplierai très abondamment ta postérité, comme les étoiles des cieux, et comme le sable qui est sur le bord de la mer, et ta postérité possédera la porte de ses ennemis.

18 Et toutes les nations de la terre seront bénies en ta postérité, parce que tu as obéi à ma voix.

19 Ainsi Abraham retourna vers ses serviteurs ; et ils se levèrent et s’en allèrent ensemble en Béer-sçébah ; car Abraham habitait en Béer-sçébah.

20 Or, après ces choses-là, quelqu’un vint rapporter à Abraham, disant : Voici, Milca a aussi enfanté des enfants à Nacor ton frère ;

21 savoir, Huts son premier-né, Buz son frère, et Kémuel, père d’Aram ;

22 et Késed, Hazo, Pildas, Jidlaph, et Béthuël.

23 Et Béthuël a engendré Rébecca. Milca enfanta ces huit à Nacor, frère d’Abraham.

24 Et sa concubine, nommée Réuma, enfanta aussi Tébah, Gaham, Tahas et Mahaca.

REFLEXIONS
Il faut considérer avec une grande attention cette belle histoire. Nous y voyons premièrement :
I. La vérité de ce que St. Paul et St. Jacques nous enseignent, qu'Abraham fit paraître sa foi par ses œuvres lorsque Dieu l'éprouva et lui commanda d'offrir son fils unique. Par-là, nous voyons bien clairement que la véritable foi porte ceux qu'elle anime à faire tout ce que Dieu leur ordonne, qu'ainsi nous ne saurions plaire à Dieu, ni être justifié, si la foi ne produit en nous l'obéissance à ses commandements et la pratique des bonnes œuvres.

II. Cet admirable exemple de l'obéissance d'Abraham qui exécuta les ordres que Dieu lui avait donnés et qui obéit dans une chose aussi difficile que celle-ci nous montre qu'il faut aimer Dieu par-dessus tout, être prêts à lui sacrifier ce que nous avons de plus cher, nous soumettre à sa volonté, même dans les épreuves les plus rudes et les plus fâcheuses et nous confier toujours en sa providence.

III. Il faut faire une attention particulière aux assurances réitérées que Dieu donna de sa faveur à Abraham, en lui faisant dire par son ange, après que ce patriarche eut fait son devoir dans cette occasion : Maintenant je connais que tu crains Dieu, parce que tu n 'as point épargné ton fils unique, parce que tu as fait cela, certainement je te bénirai.

Quoi que nous nous devions tout entiers à Dieu et que ce que nous faisons pour lui ne mérite aucune récompense, il ne laisse pas d'avoir pour agréable ce que nous tâchons de faire pour lui marquer que nous l'aimons et de le récompenser abondamment. Enfin, les témoignages qu'Abraham donna de son amour envers Dieu, en lui offrant Isaac, doit nous faire penser à cet amour infini que Dieu nous a marqué en livrant à la mort son fils unique Jésus-Christ notre Seigneur et nous inciter à l'aimer et à lui en rendre nos plus ardentes actions de grâce. 

CHAPITRE XXIII.

Sara étant morte, Abraham achète des Héthiens un champ pour l'enterrer. 

1 Or, Sara vécut cent vingt-sept ans ; ce sont là les années de sa vie.

2 Et elle mourut en Kirjath-Arbah, qui est Hébron, au pays de Canaan. Et Abraham y vint pour en faire le deuil, et pour la pleurer.

3 Et s’étant levé de devant son mort, il parla aux Héthiens, disant :

4 Je suis étranger et habitant parmi vous ; donnez-moi une possession où j’aie droit de sépulcre parmi vous, afin que j’enterre mon mort, et que je l’ôte de devant mes yeux.

5 Et les Héthiens répondirent à Abraham, et lui dirent :

6 Mon seigneur, écoute-nous : Tu es parmi nous un grand prince : enterre ton mort dans celui de nos sépulcres qui te plaira le plus. Nul de nous ne te refusera son sépulcre, afin que tu y enterres ton mort.

7 Alors Abraham se leva, et se prosterna devant le peuple du pays, c’est-à-dire, devant les Héthiens ;

8 Et il leur dit : S’il vous plaît que j’enterre mon mort, et que je l’ôte de devant mes yeux, écoutez-moi, et intercédez pour moi envers Héphron, fils de Tsohar ;

9 Afin qu’il me donne sa caverne de Macpéla, qui est à l’extrémité de son champ. Qu’il me la cède devant vous, pour le prix qu’elle vaut ; et que je la possède, pour en faire un sépulcre.

10 Or Héphron était assis parmi les Héthiens. Héphron donc, Héthien, répondit à Abraham (en la présence des Héthiens qui l’écoutaient, savoir, de tous ceux qui entraient par la porte de sa ville), disant :

11 Non, mon seigneur, écoute-moi : Je te donne le champ, je te donne aussi la caverne qui y est : je te la donne en présence des enfants de mon peuple ; enterres-y ton mort.

12 Et Abraham se prosterna devant le peuple du pays ;

13 et il parla à Héphron, devant tout le peuple du pays, et dit : Mais s’il te plaît, je te prie, écoute-moi : Je te donnerai l’argent du champ ; reçois-le de moi et j’y enterrerai mon mort.

14 Et Héphron répondit à Abraham, disant :

15 Mon seigneur, écoute-moi : La terre vaut quatre cents sicles d’argent entre moi et toi ; mais qu’est-ce que cela ? Enterre donc ton mort.

16 Et Abraham ayant entendu Héphron, lui paya l’argent dont il avait parlé, en présence des Héthiens, savoir, quatre cents sicles d’argent, qui avaient cours entre les marchands.

17 Et le champ d’Héphron, qui était à Macpéla, au-devant de Mamré, tant le champ que la caverne qui y était, et tous les arbres qui étaient dans le champ, et dans tous ses confins tout autour,

18 fut acquis en propriété à Abraham, en présence des Héthiens, savoir, de tous ceux qui entraient par la porte de la ville.

19 Et après cela Abraham enterra Sara sa femme dans la caverne du champ de Macpéla, au-devant de Mamré, qui est Hébron, au pays de Canaan.

20 Le champ donc et la caverne qui y est, fut assuré par les Héthiens à Abraham, afin qu’il le possédât pour y faire son sépulcre. 

REFLEXIONS
Ce qui est dit dans ce chapitre nous apprend premièrement qu'on ne doit pas négliger les devoirs de la sépulture et qu’il ne faut pas s’affliger excessivement pour les morts. Mais la principale réflexion que cette histoire nous présente est qu'Abraham voulut que sa femme fût enterrée dans le pays de Canaan et qu'il y acheta un sépulcre. C’est là une marque de sa foi et de la ferme persuasion où il était que Dieu donnerait ce pays à sa postérité. Nous devons apprendre de là à nous confier aux promesses de Dieu et en particulier à celles qu'il nous a faites de ressusciter nos corps et qui ont été confirmées d'une manière si expresse par la sépulture et par la résurrection de Jésus-Christ. 

CHAPITRE XXIV.

C'est ici l'histoire du mariage d'Isaac avec Rebecca, fille de Béthuel et petite-fille de Nacor, frère d'Abraham. 

1 Et Abraham devint vieux et avancé en âge ; et l’Éternel avait béni Abraham en toutes choses.

2 Abraham donc dit au plus ancien des serviteurs de sa maison, qui avait le gouvernement de tout ce qui lui appartenait : Mets, je te prie, ta main sous ma cuisse ;

3 Et je te ferai jurer par l’Éternel, le Dieu des cieux, et le Dieu de la terre, que tu ne prendras point de femme pour mon fils, des filles des Cananéens, parmi lesquels j’habite.

4 Mais tu t’en iras en mon pays et vers mon parentage, et tu y prendras une femme à mon fils Isaac.

5 Et ce serviteur lui répondit : Peut-être que la femme ne voudra point me suivre en ce pays. Me faudra-t-il nécessairement ramener ton fils au pays d’où tu es sorti ?

6 Abraham lui dit : Garde-toi bien d’y ramener mon fils.

7 L’Éternel, le Dieu des cieux, qui m’a pris de la maison de mon père, et du pays de mon parentage, et qui m’a parlé, et juré, disant : Je donnerai à ta postérité ce pays, enverra lui-même son ange devant toi, et tu prendras une femme de ce pays-là pour mon fils.

8 Que si la femme ne veut pas te suivre, tu seras quitte de ce serment que je te fais faire. Quoi qu’il en soit, ne ramène point-là mon fils.

9 Alors le serviteur mit la main sous la cuisse d’Abraham son maître, et s’engagea par serment à faire ce qu’il avait dit.

10 Et le serviteur ayant pris dix chameaux d’entre ceux de son maître, se mit en chemin ; car il avait tout le bien de son maître en son pouvoir. Il partit donc, et s’en alla en Mésopotamie, en la ville de Nacor.

11 Et il fit reposer les chameaux sur leurs genoux hors de la ville, près d’un puits d’eau, sur le soir, au temps que celles qui allaient puiser de l’eau, sortaient.

12 Et il dit : Ô Éternel, Dieu d’Abraham mon maître, fais que j’aie une heureuse rencontre aujourd’hui, et sois favorable à mon seigneur Abraham.

13 Voici, je suis près de cette fontaine, et les filles des habitants de la ville sortiront pour puiser de l’eau.

14 Fais donc que la jeune fille à laquelle je dirai : Baisse, je te prie, ta cruche, afin que je boive ; et qui me répondra : Bois, et même je donnerai à boire à tes chameaux, soit celle que tu as destinée à ton serviteur Isaac ; et je connaîtrai par-là que tu as été favorable à mon seigneur.

15 Et avant qu’il eût achevé de parler, voici, Rébecca, fille de Béthuël, fils de Milca, femme de Nacor, frère d’Abraham, sortait, ayant sa cruche sur son épaule.

16 Et la jeune fille était très-belle à voir ; elle était vierge, et nul homme ne l’avait connue. Elle descendit donc à la fontaine, et ayant rempli sa cruche, elle remontait.

17 Alors le serviteur courut au-devant d’elle, et lui dit : Donne-moi, je te prie, un peu de l’eau de ta cruche à boire.

18 Et elle lui dit : Mon seigneur, bois. Et incontinent elle ôta sa cruche de dessus son épaule, et la prit en sa main, et elle lui donna à boire.

19 Et après qu’elle eut achevé de lui donner à boire, elle dit : J’en puiserai aussi pour tes chameaux, jusqu’à ce qu’ils aient tous bu.

20 Et ayant vidé promptement sa cruche dans l’abreuvoir, elle courut encore au puits pour en puiser de l’autre, et elle en puisa pour tous ses chameaux.

21 Et cet homme s’étonnait de ce qu’elle faisait, sans rien dire, voulant savoir si l’Éternel aurait fait prospérer son voyage ou non.

22 Et quand les chameaux eurent achevé de boire, cet homme prit une bague d’or, qui pesait un demi-sicle, et deux bracelets pour mettre sur les mains de cette fille, pesant dix sicles d’or.

23 et il lui dit : De qui es-tu fille ? Je te prie, apprends-le-moi. Y a-t-il dans la maison de ton père de la place pour me loger ?

24 Et elle lui répondit : Je suis fille de Béthuël, fils de Milca, qu’elle a enfanté à Nacor.

25 Et elle lui dit aussi : Il y a chez nous beaucoup de paille et de fourrage, et aussi de la place pour y loger.

26 Et cet homme s’inclina et se prosterna devant l’Éternel ;

27 et il dit : Béni soit l’Éternel, le Dieu d’Abraham mon maître, qui a toujours été miséricordieux et véritable envers mon seigneur. Lorsque j’étais en chemin, l’Éternel m’a conduit en la maison des frères de mon seigneur.

28 Et la jeune fille courut, et rapporta ces paroles dans la maison de sa mère.

29 Or, Rébecca avait un frère nommé Laban, qui courut dehors vers cet homme près de la fontaine.

30 Car aussitôt qu’il eut vu la bague et les bracelets aux mains de sa sœur, et qu’il eut entendu les paroles de Rébecca sa sœur, qui avait dit : Cet homme m’a ainsi parlé, il le vint trouver ; et voici, il était près des chameaux vers la fontaine.

31 Et il lui dit : Entre, béni de l’Éternel ; pourquoi te tiens-tu dehors ? J’ai préparé la maison, et un lieu pour tes chameaux.

32 L’homme donc entra dans la maison, et on déharnacha les chameaux, et on leur donna de la paille et du fourrage ; on donna aussi de l’eau, tant pour laver les pieds de cet homme, que les pieds de ceux qui étaient avec lui.

33 Et on lui présenta à manger. Mais il dit : Je ne mangerai point, que je n’aie dit ce que j’ai à dire. Et Laban dit : Parle.

34 Il dit donc : Je suis serviteur d’Abraham.

35 Or, l’Éternel a comblé de bénédictions mon seigneur, et il est devenu grand ; car il lui a donné des brebis, des bœufs, de l’argent, de l’or, des serviteurs, des servantes, des chameaux et des ânes.

36 Et Sara, femme de mon seigneur, lui a enfanté dans sa vieillesse un fils, auquel il a donné tout ce qu’il a.

37 Et mon seigneur m’a fait jurer, en disant : Tu ne prendras point de femme à mon fils, des filles des Cananéens, dans le pays desquels j’habite.

38 Mais tu iras à la maison de mon père, et vers ma parenté, et tu y prendras une femme pour mon fils.

39 Et je dis à mon seigneur : Peut-être que la femme ne me suivra pas.

40 Et il me répondit : L’Éternel, devant la face duquel j’ai marché, enverra son ange avec toi, et fera prospérer ton voyage, et tu prendras une femme à mon fils, de ma parenté, et de la maison de mon père.

41 Si tu vas vers ma parenté, et si on ne te la donne pas, tu seras quitte de l’exécration du serment que je te fais faire.

42 Je suis donc venu aujourd’hui à la fontaine, et j’ai dit : Ô Éternel, Dieu de mon seigneur Abraham, si maintenant tu fais prospérer le voyage que j’ai entrepris,

43 voici, je me tiendrai près de la fontaine : qu’il arrive donc que la fille qui sortira pour y puiser, et à qui je dirai : Donne-moi, je te prie, à boire un peu de l’eau de ta cruche ;

44 et qui me répondra : Bois, et même j’en puiserai pour tes chameaux, soit la femme que l’Éternel a destinée au fils de mon seigneur.

45 Avant que j’eusse achevé de parler en mon cœur, voici, Rébecca est sortie, ayant sa cruche sur son épaule, et elle est descendue à la fontaine, et a puisé de l’eau. Et je lui ai dit : Donne-moi, je te prie, à boire.

46 Et incontinent elle a ôté sa cruche de dessus son épaule, et elle m’a dit : Bois, et même je donnerai à boire à tes chameaux. J’ai donc bu, et elle a aussi donné à boire aux chameaux.

47 Et je l’ai interrogée, en disant : De qui es-tu fille ? Elle a répondu : Je suis fille de Béthuël, fils de Nacor, que Milca lui a enfanté. Alors je lui ai mis une bague sur le front, et des bracelets aux mains.

48 Ensuite je me suis incliné et prosterné devant l’Éternel, et j’ai béni l’Éternel, le Dieu de mon maître Abraham, qui m’a conduit par le droit chemin, afin que je prisse la fille du frère de mon seigneur pour son fils,

49 Maintenant donc, si vous êtes véritablement portés à faire cette grâce à mon seigneur, déclarez-le-moi ; sinon, faites-le-moi aussi savoir ; et je me tournerai à droite, ou à gauche.

50 Et Laban et Béthuël répondirent, disant : Cette affaire est procédée de l’Éternel ; nous ne te pouvons dire ni bien ni mal.

51 Voici, Rébecca est entre tes mains, prends-la et t’en va, et qu’elle soit la femme du fils de ton seigneur, comme l’Éternel en a parlé.

52 Et aussitôt que le serviteur d’Abraham eut ouï leurs paroles, il se prosterna en terre devant l’Éternel.

53 Le serviteur tira ensuite des bagues d’argent et d’or, et des habits, et les donna à Rébecca ; il donna aussi des présents exquis à son frère et à sa mère.

54 Et ils mangèrent et burent, lui et les gens qui étaient avec lui, et ils y logèrent cette nuit. Et quand ils furent levés de bon matin, le serviteur dit : Renvoyez-moi à mon seigneur.

55 Et le frère et la mère lui dirent : Que la fille demeure avec nous au moins dix jours, et après elle s’en ira.

56 Et il leur dit : Ne me retardez point, puisque l’Éternel a fait prospérer mon voyage. Renvoyez-moi, que je m’en aille à mon seigneur.

57 Alors ils dirent : Appelons la fille, et sachons de sa propre bouche quel est son sentiment.

58 Ils appelèrent donc Rébecca, et lui dirent : Veux-tu aller avec cet homme ? Et elle répondit : J’irai.

59 Ainsi ils laissèrent aller Rébecca leur sœur, et sa nourrice, avec le serviteur d’Abraham, et ses gens.

60 Et ils bénirent Rébecca, et lui dirent : Tu es notre sœur ; sois fertile en mille et mille générations, et que ta postérité possède la porte de ses ennemis.

61 Et Rébecca, et ses servantes, se levèrent et montèrent sur les chameaux, et suivirent cet homme-là. Ce serviteur donc prit Rébecca, et s’en alla.

62 Or, Isaac revenait du puits du Vivant qui me voit ; car il demeurait au pays du Midi.

63 Et Isaac était sorti aux champs sur le soir pour prier ; et levant les yeux, il regarda, et voici des chameaux qui venaient.

64 Rébecca aussi levant les yeux, vit Isaac, et se jeta en bas de dessus le chameau ;

65 (car elle avait dit au serviteur : Qui est cet homme-là qui vient le long du champ au-devant de nous ? Et le serviteur avait répondu : C’est mon seigneur) ; et elle prit un voile, et s’en couvrit.

66 Et le serviteur récita à Isaac toutes les choses qu’il avait faites.

67 Alors Isaac mena Rébecca dans la tente de Sara sa mère ; et il la prit pour sa femme, et il l’aima. Ainsi Isaac se consola de la mort de sa mère.

REFLEXIONS
La principale observation qu'il y ait à faire sur cette histoire est d'y remarquer la foi et la piété d'Abraham qui ne voulut pas que son fils épousât une femme cananéenne et idolâtre, mais qui voulut le marier dans sa famille. On y voit aussi la piété de son serviteur dans les prières qu'il adressa à Dieu pour le succès de son voyage et dans les louanges et les actions de grâce qu'il lui présenta après qu'il eut réussi dans son dessein. Ceci doit nous servir d'instruction et d'exemple et nous apprendre que toutes les entreprises et en particulier les mariages doivent se faire selon Dieu et suivant les règles de la religion et de la piété afin d'obtenir par ce moyen sa bénédiction.

CHAPITRE XXV.

Il est parlé dans ce chapitre :

I. Du mariage d'Abraham avec Kétura sa seconde femme ;

II. De la mort d’Abraham ;

III. Des descendants d'Ismaël et de sa mort ;

IV. De la naissance d'Esaü et de Jacob, les fils d’Isaac ;

V. Et enfin de la manière dont Ésaü vendit son droit d'aînesse à Jacob son frère. 

1 Or Abraham prit une autre femme, nommée Kétura,

2 qui lui enfanta Zimram, Joksçan, Médan, Madian, Jisçbak, et Sçuah.

3 Et Joksçan engendra Scéba et Dédan ; et les enfants de Dédan furent Assçurim, Létusçim, et Léummim.

4 Et les enfants de Madian furent Hépha, Hépher, Hanoc, Abidah, Eldaha. Tous ceux-là sont enfants de Kétura.

5 Et Abraham donna tout ce qui lui appartenait à Isaac.

6 Mais il fit des présents aux fils de ses concubines, et les sépara, durant sa vie, de son fils Isaac, les envoyant vers le Levant, au pays d’Orient.

7 Et tout le temps que vécut Abraham, fut de cent soixante et quinze ans.

8 Abraham donc, ayant perdu ses forces, mourut dans une heureuse vieillesse, étant fort âgé et rassasié de jours ; et il fut recueilli vers ses peuples.

9 Et Isaac et Ismaël, ses fils, l’enterrèrent en la caverne de Macpéla, au champ d’Héphron, fils de Tsohar, Héthien, qui est vis-à-vis de Mamré ;

10 qui est le champ qu’Abraham avait acheté des Héthiens. Ce fut donc là que fut enterré Abraham, avec Sara sa femme.

11 Or, après la mort d’Abraham, Dieu bénit Isaac son fils. Et Isaac habitait près du puits du Vivant qui me voit.

12 Voici le dénombrement des enfants d’Ismaël, fils d’Abraham, qu’Agar l’Égyptienne, servante de Sara, avait enfanté à Abraham.

13 Et voici les noms dont ils ont été nommés dans leurs générations : le premier-né d’Ismaël, Nébajoth ; puis Kédar, Adbéel, Mibsam ;

14 Misçmah, Duma, Massa ;

15 Hadar, Téma, Jétur, Naphis, et Kedma.

16 Ce sont là les enfants d’Ismaël, et ce sont là leurs noms, selon leurs villages, et selon leurs châteaux, ayant été les douze princes de leurs peuples.

17 Et le temps de la vie d’Ismaël fut de cent trente-sept ans. Après quoi, ayant perdu ses forces, il mourut, et fut recueilli vers ses peuples.

18 Et ses enfants habitèrent depuis Havila jusqu’à Scur, qui est vis-à-vis de l’Egypte, quand on vient vers Assur. Car le pays qui était échu à Ismaël était à la vue de tous ses frères.

19 Voici quelles furent aussi les générations d’Isaac, fils d’Abraham : Abraham engendra Isaac.

20 Et Isaac était âgé de quarante ans quand il épousa Rébecca, fille de Béthuël, Syrien, de Paddan-Aram, sœur de Laban Syrien.

21 Et Isaac pria instamment l’Éternel pour sa femme, parce qu’elle était stérile. Et l’Éternel fut fléchi par ses prières ; et Rébecca sa femme conçut.

22 Mais les enfants s’entre-poussaient dans son ventre ; et elle dit : S’il est ainsi, pourquoi suis-je ? Et elle alla consulter l’Éternel.

23 Et l’Éternel lui dit : Deux nations sont dans ton ventre ; et deux peuples sortiront de tes entrailles et seront divisés. Un de ces peuples sera plus fort que l’autre ; et le plus grand servira au moindre.

24 Et lorsque le temps qu’elle devait accoucher fut arrivé, voici, il y avait deux jumeaux en son ventre.

25 Celui qui sortit le premier était roux, et tout velu, comme un manteau de poil ; et ils l’appelèrent Esaü.

26 Et après sortit son frère, tenant de sa main le talon d’Esaü ; c’est pourquoi il fut appelé Jacob. Et Isaac était âgé de soixante ans, quand ils naquirent.

27 Depuis, les enfants devinrent grands, et Esaü était un habile chasseur, et homme de campagne ; mais Jacob était un homme simple, se tenant dans les tentes.

28 Et Isaac aimait Esaü ; car la venaison était sa viande ; mais Rébecca aimait Jacob.

29 Or, comme Jacob cuisait du potage, Esaü survint des champs, étant fort las.

30 Et Esaü dit à Jacob : Donne-moi à manger, je te prie, de ce roux-là ; car je suis fort las. C’est pour cela qu’on l’appela Edom.

31 Mais Jacob lui dit : Vends-moi aujourd’hui ton droit d’aînesse.

32 Et Esaü répondit : Voici, je m’en vais mourir ; de quoi me servira le droit d’aînesse ?

33 Et Jacob dit : Jure-moi aujourd’hui. Et il lui jura ; ainsi il vendit son droit d’aînesse à Jacob.

34 Et Jacob donna à Esaü du pain, et le potage de lentilles ; et il mangea, et but, et se leva, et s’en alla. Ainsi Esaü méprisa son droit d’aînesse. 

REFLEXIONS
St. Paul remarque sur la mort d'Abraham, qu'il mourut, aussi bien que les autres patriarches, sans avoir vu l'accomplissement des promesses de Dieu et ayant été étranger et voyageur sur la terre, ce qui fait voir que Dieu leur réservait la patrie céleste. La multiplication de la postérité d'Ismaël prouve la vérité des promesses qui avaient été faites à Abraham.

Le choix que Dieu fit de Jacob et de sa postérité, préférablement à Ésaü son frère aîné et à ses descendants nous enseigne, comme St. Paul le remarque dans l'épître aux Romains, que Dieu est libre dans la distribution de ses grâces, qu'il les répand sur ceux qu'il trouve à propos et que tous ceux qui descendaient des patriarches n'étaient pas pour cela réputés le peuple de Dieu.

Enfin, le mépris qu'Ésaü fit de son droit d'aînesse en le vendant à Jacob, par un principe de sensualité et par une humeur profane, doit nous apprendre à estimer par-dessus toutes choses la grâce de Dieu et à ne pas préférer les biens et les plaisirs de la terre aux biens spirituels et célestes. C'est à quoi St. Paul nous exhorte lorsqu'il dit : Que nul ne soit fornicateur ou profane comme Ésaü, lequel pour une viande vendit son droit d'aînesse. 

CHAPITRE XXVI.

Isaac se retire à cause de la famine au pays des Philistins où Dieu lui réitère ses promesses et lui fait ressentir des effets de sa protection et de sa faveur. Il est ensuite obligé de quitter ce pays-là, à cause que les Philistins lui portaient envie et il vint à Béersçébah; il y bâtit un autel au Seigneur et il y fait alliance avec Abimelec roi de Guérar.

1 Or, il y eut une famine au pays, outre la première famine qui avait été du temps d’Abraham. Et Isaac s’en alla vers Abimélec, roi des Philistins, à Guérar.

2 Car l’Éternel lui était apparu, et lui avait dit : Ne descends point en Egypte ; demeure au pays que je te dirai.

3 Fais quelque séjour dans ce pays, et je serai avec toi, et je te bénirai. Car je te donnerai et à ta postérité tous ces pays-ci, et je ratifierai le serment que j’ai fait à ton père Abraham.

4 Et je multiplierai ta postérité comme les étoiles des cieux, et je donnerai à ta postérité ces pays ; et toutes les nations de la terre seront bénies en ta postérité ;

5 parce qu’Abraham a obéi à ma voix, et a gardé ce que je lui avais ordonné, mes commandements, mes statuts et mes lois.

6 Isaac donc demeura à Guérar.

7 Et quand les gens du lieu s’enquirent qui était sa femme, il répondit : C’est ma sœur ; car il craignait de dire : C’est ma femme ; de peur, disait-il, que peut-être les habitants du lieu ne me tuent à cause de Rébecca ; car elle était belle à voir.

8 Or, il arriva, après qu’il y eut passé quelques jours, qu’Abimélec, roi des Philistins, regardait par la fenêtre, et voici, il vit Isaac qui se jouait avec Rébecca.

9 Alors Abimélec appela Isaac, et lui dit : Certainement, voici, c’est ta femme ; et comment as-tu dit : C’est ma sœur ? Et Isaac lui répondit : Parce que j’ai dit en moi-même : Il est à craindre que je ne meure à cause d’elle.

10 Et Abimélec dit : Que nous as-tu fait ? Il s’en est peu fallu que quelqu’un du peuple n’ait couché avec ta femme, et que tu ne nous aies fait tomber dans un grand péché.

11 Abimélec donc fit une ordonnance à tout le peuple, disant : Celui qui touchera cet homme ou sa femme sera certainement puni de mort.

12 Et Isaac sema en cette terre-là, et il recueillit cette année-là le centuple car l’Éternel le bénit.

13 Cet homme donc devint grand, et son bien allait toujours en augmentant, jusqu’à ce qu’il fût devenu fort riche.

14 Et il eut des troupeaux de brebis et de bœufs, et un grand nombre de serviteurs ; ce qui fit que les Philistins lui portèrent envie ;

15 tellement qu’ils bouchèrent les puits que les serviteurs de son père avaient creusés, du temps de son père Abraham ; et ils les remplirent de terre.

16 Abimélec aussi dit à Isaac : Retire-toi d’avec nous ; car tu es devenu beaucoup plus puissant que nous.

17 Isaac donc partit de là, et s’établit dans la vallée de Guérar, et habita là.

18 Et Isaac creusa encore les puits d’eau qu’on avait creusés du temps d’Abraham son père, et que les Philistins avaient bouchés après la mort d’Abraham ; et il leur donna les mêmes noms desquels son père les avait appelés.

19 Les serviteurs d’Isaac donc creusèrent dans cette vallée, et y trouvèrent un puits d’eau vive.

20 Mais les bergers de Guérar eurent quelque démêlé avec les bergers d’Isaac, disant : L’eau est à nous ; c’est pourquoi, il appela le puits Hések, parce qu’ils avaient contesté avec lui au sujet de ce puits.

21 Ensuite ils creusèrent un autre puits, pour lequel aussi ils se querellèrent ; et il l’appela Sitnah.

22 C’est pourquoi, il partit de là, et creusa un autre puits, pour lequel ils ne disputèrent point ; c’est pourquoi il l’appela Réhoboth, disant : Depuis que maintenant l’Éternel nous a mis au large, nous fructifierons dans ce pays.

23 Et de là il monta à Béer-scébah.

24 Et l’Éternel lui apparut en la même nuit, et lui dit : Je suis le Dieu d’Abraham ton père, ne crains point, car je suis avec toi, et je te bénirai, et je multiplierai ta postérité à cause d’Abraham mon serviteur.

25 Alors il bâtit là un autel, et ayant invoqué le nom de l’Éternel, il y dressa ses tentes ; et les serviteurs d’Isaac y creusèrent un puits.

26 Et Abimélec vint à lui de Guérar, et Ahuzat, son ami, et Picol, chef de son armée.

27 Mais Isaac leur dit : Pourquoi venez-vous vers moi, puisque vous me haïssez, et que vous m’avez chassé d’avec vous ?

28 Et ils répondirent : Nous avons vu clairement que l’Éternel est avec toi, et nous avons dit : Qu’il y ait maintenant un serment avec imprécation entre nous ; c’est-à-dire, entre nous et toi ; et nous traiterons alliance avec toi :

29 Si jamais tu nous fais aucun mal, comme nous ne t’avons point touché, et comme nous ne t’avons fait que du bien, t’ayant laissé aller en paix, toi, qui es maintenant béni de l’Éternel !

30 Et il leur fit un festin, et ils mangèrent et burent.

31 Et ils se levèrent de bon matin, et ils s’engagèrent l’un l’autre par serment. Puis Isaac les renvoya, et ils s’en allèrent d’avec lui en paix.

32 Il arriva en ce même jour, que les serviteurs d’Isaac vinrent lui parler de ce puits qu’ils avaient creusé, lui disant : Nous avons trouvé de l’eau.

33 Et il l’appela Scibah. C’est pour cela que la ville a été nommée Béer-scébah jusqu’à ce jour.

34 Or, Ésaü, âgé de quarante ans, épousa Judith, fille de Bééri, Héthien, et Basmath, fille d’Elon, Héthien ;

35 qui causèrent une fort grande amertume d’esprit à Isaac et à Rébecca. 

REFLEXIONS
Nous voyons dans la vie d’Isaac, de même que dans celle d'Abraham, un mélange de prospérité et d’adversités. Les grandes richesses d’Isaac et l’alliance qu'il traita avec Abimelec sont des effets de la bénédiction du Seigneur sur ce patriarche. Mais les dangers auxquels il fut exposé dans le pays des Philistins et les fréquentes contestations qu'on lui suscita sont des adversités par ou Dieu l'éprouvait et voulait l'obliger à se retirer de ce pays-là. Tous les hommes et les enfants de Dieu en particulier ont tantôt la prospérité et tantôt l’adversité en partage, mais en quelque lieu et en quelque état que les gens de bien se trouvent, Dieu les accompagne toujours de sa protection et de sa faveur et il les délivre de toutes leurs afflictions. 

CHAPITRE XXVII.

Moïse raconte comment Jacob obtint par surprise la bénédiction qu’Isaac son père voulait donner à Ésaü ; ce qu’Ésaü ayant appris, il en eut une vive douleur et résolu de tuer Jacob son frère. Ce qui obligea Rebecca d'envoyer Jacob en Mésopotamie.

1 Et il arriva, quand Isaac fut devenu vieux, et que ses yeux furent si ternis qu’il ne pouvait plus voir, qu’il appela son fils aîné, et lui dit : Mon fils ; et il lui répondit : Me voici.

2 Et il lui dit : Voici maintenant, je suis fort âgé, et je ne sais point le jour de ma mort.

3 Maintenant donc, je te prie, prends tes armes, ton carquois et ton arc, et va-t’en aux champs, et prends-moi de la venaison.

4 Et apprête-m’en des viandes d’appétit, comme je les aime ; et apporte-les-moi, afin que je mange, et que mon âme te bénisse avant que je meure.

5 Or, Rébecca écoutait, pendant qu’Isaac parlait à Ésaü son fils. Ésaü donc s’en alla aux champs pour prendre à la chasse quelque chose qu’il pût apporter.

6 Et Rébecca parla à Jacob son fils et lui dit : Voici : j’ai entendu ton père, qui parlait à Ésaü ton frère, et qui lui disait :

7 Apporte-moi de la venaison, et apprête-m’en des viandes d’appétit, afin que j’en mange ; et je te bénirai devant l’Éternel, avant que de mourir.

8 Maintenant donc, mon fils, obéis à ma parole, et fais ce que je vais te commander.

9 Va maintenant à la bergerie, et prends là deux des meilleurs chevreaux, et j’en apprêterai des viandes d’appétit pour ton père, comme il les aime.

10 Et tu les porteras à ton père, afin qu’il les mange et qu’il te bénisse avant sa mort.

11 Et Jacob répondit à Rébecca sa mère : Voici, Ésaü mon frère est fort velu, et je n’ai point de poil ;

12 si mon père vient à me tâter, il me regardera comme un homme qui l’a voulu tromper, et j’attirerai sur moi sa malédiction et non point sa bénédiction.

13 Et sa mère lui dit : Mon fils, que cette malédiction que tu crains, soit sur moi ; obéis seulement à ma parole, et va prendre ce que je t’ai dit.

14 Il s’en alla donc, et il le prit, et l’apporta à sa mère, et sa mère en apprêta des viandes d’appétit, comme son père les aimait.

15 Puis Rébecca prit les plus riches habits d’Ésaü son fils aîné, qu’elle gardait dans la maison, et elle en revêtit Jacob son cadet.

16 Et elle couvrit de peaux de chevreaux les mains de son fils, et son cou qui était sans poil.

17 Ensuite elle donna à son fils Jacob ces viandes d’appétit, et le pain qu’elle avait apprêté.

18 Il vint donc vers son père, et lui dit : Mon père. Et il répondit : Me voici ; qui es-tu, mon fils ?

19 Et Jacob dit à son père : Je suis Ésaü, ton fils aîné ; j’ai fait ce que tu m’avais commandé. Lève-toi, je te prie, et assieds-toi, et mange de ma chasse, afin que ton âme me bénisse.

20 Et Isaac dit à son fils : Qu’est ceci ? Comment en as-tu pu trouver sitôt, mon fils ? Et il dit : L’Éternel ton Dieu m’en a fait rencontrer.

21 Et Isaac dit à Jacob : Mon fils, approche-toi, je te prie, et je te tâterai, afin que je sache si tu es mon fils Ésaü même, ou si tu ne l’es pas.

22 Jacob donc s’approcha de son père Isaac, qui, l’ayant tâté, dit : Cette voix est la voix de Jacob ; mais ces mains sont les mains d’Ésaü.

23 Et il le méconnut ; car ses mains étaient velues, comme les mains de son frère Ésaü ; et il le bénit.

24 Il dit donc : Es-tu mon fils Ésaü même ? Il répondit : Je le suis.

25 Il lui dit aussi : Apporte-moi à manger de ta chasse, afin que mon âme te bénisse. Et il lui en apporta et il en mangea. Il lui apporta aussi du vin, et il but.

26 Puis, Isaac son père lui dit : Approche-toi, je te prie, et viens me baiser, mon fils.

27 Et il s’approcha de lui, et le baisa. Et Isaac ayant senti l’odeur de ses habits, le bénit, en disant : Voici, l’odeur de mon fils est comme l’odeur d’un champ que l’Éternel a béni.

28 Que Dieu te donne de la rosée des cieux, et de la graisse de la terre, et une grande abondance de froment et du meilleur vin ;

29 que les peuples te servent, et que les nations se prosternent devant toi ! Sois le maître de tes frères, et que les fils de ta mère se prosternent devant toi ! Quiconque te maudira, soit maudit, et quiconque te bénira, soit béni !

30 Et il arriva, aussitôt qu’Isaac eut achevé de bénir Jacob, Jacob étant à peine sorti de devant son père Isaac, que son frère Ésaü revint de la chasse.

31 Il apprêta aussi des viandes d’appétit ; et les ayant apportées à son père, il lui dit : Que mon père se lève, et mange de la chasse de son fils, afin que ton âme me bénisse.

32 Et Isaac son père lui dit : Qui es-tu ? Et il dit : Je suis ton fils aîné, Ésaü.

33 Et Isaac sentit une extraordinaire émotion, et il dit : Qui est, et où est donc celui qui a pris de la chasse, et m’en a apporté, et j’ai mangé de tout ce qu’il m’a présenté, avant que tu vinsses ? Et je l’ai béni, et aussi sera-t-il béni.

34 Et aussitôt qu’Ésaü eut entendu les paroles de son père, il jeta un cri fort grand et très-amer. Et il dit à son père : Donne-moi aussi ta bénédiction, mon père !

35 Mais il dit : Ton frère m’est venu surprendre, et il a emporté ta bénédiction.

36 Et Ésaü dit : C’est avec raison qu’on l’a appelé Jacob ; car il m’a déjà supplanté deux fois : Il m’a enlevé mon droit d’aînesse, et voici, maintenant il a emporté ma bénédiction. Ensuite il dit : N’as-tu point réservé de bénédiction pour moi ?

37 Et Isaac répondit à Ésaü, et lui dit : Voici, je l’ai établi ton seigneur, et je lui ai donné tous ses frères pour serviteurs ; et je l’ai fourni de froment et du meilleur vin. Et que te ferai-je donc, mon fils ?

38 Et Ésaü dit à son père : N’as-tu qu’une bénédiction, mon père ? Bénis-moi aussi, mon père. Et Ésaü, élevant sa voix, pleura.

39 Et Isaac son père répondit, et lui dit : Voici, ta demeure sera dans un terroir gras, arrosé de la rosée des cieux d’en haut.

40 Et tu vivras par ton épée, et tu serviras à ton frère ; mais le temps viendra, qu’étant devenu maître, tu briseras son joug, et le secoueras de dessus ton cou.

41 Et Ésaü haïssait Jacob à cause de la bénédiction que son père lui avait donnée, et il dit en son cœur : Les jours du deuil de mon père approchent ; et alors je tuerai Jacob mon frère.

42 Et on rapporta à Rébecca les discours d’Ésaü, son fils aîné ; et elle envoya appeler Jacob, son second fils, et elle lui dit : Voici, Ésaü ton frère se console dans l’espérance qu’il a de te tuer.

43 Maintenant donc, mon fils, obéis à ma parole : Lève-toi, et sauve-toi à Caran, vers Laban, mon frère ;

44 et demeure avec lui quelque temps, jusqu’à ce que la fureur de ton frère se passe,

45 et que sa colère s’apaise envers toi, et qu’il ait oublié les choses que tu lui as faites. J’enverrai ensuite pour te tirer de là. Pourquoi serais-je privée de vous deux en un même jour ?

46 Et Rébecca dit à Isaac : La vie m’est devenue ennuyeuse, à cause de ces Héthiennes. Si Jacob prend pour femme quelqu’une de ces Héthiennes, comme sont les filles de ce pays, à quoi me sert la vie ? 

REFLEXIONS
Il faut remarquer sur cette histoire que Jacob obtint la bénédiction de son père par une tromperie et que cependant Dieu permit que cela arrivât ainsi et qu’il voulut que cette bénédiction eût lieu parce qu’Ésaü en était indigne et parce que les promesses qui avaient été faites à Abraham et à Isaac devaient s’accomplir en Jacob. C’est ainsi que Dieu permet souvent des choses qu’il n’approuve pas et qu’il se sert des péchés que les hommes commettent pour l'exécution de ses desseins, bien qu’il ne soit pas l’auteur de ces péchés-là.

Pour ce qui est de l’affliction qu’Ésaü fit paraître lorsqu'il vit que son père ne voulait pas changer, ni révoquer la bénédiction qu’il avait donnée à Jacob, elle ne peut être regardée comme une repentance salutaire parce qu'elle ne procédait que de son humeur charnelle et de la jalousie et du dépit dont il était animé contre son frère, lequel il voulut même tuer et à cause de cela. Cette affliction fut inutile. Voici la réflexion que St. Paul fait sur ce sujet : Que nul ne soit impur ou profane comme Ésaü, qui voulant demander la bénédiction fut rejeté, quoiqu’il l’eût demandée avec larmes. C’est là un exemple dont nous devons profiter et où nous avons une image du désespoir dont les méchants seront travaillés lorsqu’ils se verront exclus du royaume de Dieu. Enfin, la retraite de Jacob, qui s'en alla en Mésopotamie pour fuir la colère d’Esaü son frère, nous enseigne à éviter prudemment les dangers et à céder pour un temps à la malice et à l’injustice de ceux qui cherchent à nous nuire. Au reste, cette fuite de Jacob, qui fut une rude épreuve pour lui et pour Isaac son père et qui semblait être un obstacle à son bonheur, fut un moyen dont la providence se servit pour le rendre plus heureux, plus riche et plus puissant qu'il ne l'aurait été dans la maison paternelle, comme la suite de cette histoire le montrera. Voilà comment Dieu fait quelquefois tourner en bien ce qu’on regarde comme un grand malheur et c’est ce qui doit être pour les gens de bien un puissant motif à se reposer sur la providence de Dieu.

CHAPITRE XXVIII.

Jacob s'en va en Mésopotamie par l'ordre d'Isaac son père pour s'y marier dans la famille de Laban frère de sa mère. Dieu lui apparait en chemin pendant la nuit, dans la vision d’une échelle qui s'étendait de la terre au ciel et il lui promet de le bénir, de quoi Jacob témoigna sa reconnaissance en adorant Dieu dans ce lieu-là et en faisant le vœu de lui donner la dîme de tout ce qu’il posséderait. 

1 Isaac donc appela Jacob, et le bénit, et lui fit ce commandement : Ne prends point une femme d’entre les filles de Canaan.

2 Lève-toi, va en Paddan-Aram, à la maison de Béthuel, père de ta mère, et de là prends-toi une femme des filles de Laban, frère de ta mère.

3 Et que le Dieu fort, tout-puissant, te bénisse ; qu’il te fasse croître, et qu’il multiplie ta race, afin que tu deviennes une assemblée de peuples.

4 Et qu’il te donne la bénédiction d’Abraham, à toi et à ta postérité avec toi, afin que tu obtiennes en héritage le pays où tu as été étranger, que Dieu a donné à Abraham.

5 Isaac donc fit partir Jacob, qui s’en alla en Paddan-Aram, vers Laban, fils de Béthuel, Syrien, frère de Rébecca, mère de Jacob et d’Ésaü.

6 Et Ésaü vit qu’Isaac avait béni Jacob, et qu’il l’avait envoyé en Paddan-Aram, afin qu’il prît une femme de ce pays-là pour lui, et qu’il lui avait fait ce commandement, en le bénissant : Ne prends point de femme d’entre les filles de Canaan ;

7 et que Jacob avait obéi à son père et à sa mère, et s’en était allé en Paddan-Aram.

8 Ésaü voyant donc que les filles de Canaan déplaisaient à Isaac son père,

9 s’en alla vers les Ismaélites, et prit pour femme (outre les autres qu’il avait) Mahalath, fille d’Ismaël, fils d’Abraham, sœur de Nébajoth.

10 Jacob donc partit de Béer-scébah, et s’en alla à Caran.

11 Et il se rencontra en un certain lieu, où il passa la nuit, parce que le soleil était couché. Il prit donc des pierres du lieu, et en fit son chevet, et il s’endormit au même lieu.

12 Alors il songea, et dans son songe il vit une échelle qui était appuyée sur la terre, et dont le haut touchait jusqu’aux cieux, et les anges de Dieu montaient et descendaient par cette échelle.

13 Il vit aussi l’Éternel qui se tenait sur l’échelle, et qui lui dit : Je suis l’Éternel, le Dieu d’Abraham ton père, et le Dieu d’Isaac ; je te donnerai et à ta postérité la terre sur laquelle tu dors.

14 Et ta postérité sera comme la poussière de la terre ; et tu t’étendras de l’Occident à l’Orient, et du Septentrion au Midi ; et toutes les familles de la terre seront bénies en toi et en ta postérité.

15 Et voici, je suis avec toi, et je te garderai partout où tu iras ; et je te ramènerai en ce pays ; car je ne t’abandonnerai point, que je n’aie fait ce que je t’ai dit.

16 Et quand Jacob fut réveillé de son sommeil, il dit : Certainement l’Éternel est en ce lieu-ci, et je n’en savais rien !

17 Et il eut peur, et dit : Que ce lieu est vénérable ! C’est ici la maison de Dieu, et c’est ici la porte des cieux.

18 Et Jacob se leva de bon matin, et prit la pierre dont il avait fait son chevet, et la dressa pour monument, et il versa de l’huile sur le sommet de cette pierre.

19 Et il appela ce lieu-là Béthel, au lieu qu’auparavant cette ville s’appelait Luz.

20 Et Jacob fit un vœu, en disant : Si Dieu est avec moi, et s’il me garde dans le voyage que je fais ; s’il me donne du pain à manger, et des habits pour me vêtir ;

21 et si je retourne en paix à la maison de mon père : certainement, l’Éternel me sera Dieu ;

22 et cette pierre que j’ai dressée comme un monument, sera la maison de Dieu ; et je te donnerai entièrement la dîme de tout ce que tu m’auras donné. 

REFLEXIONS
L'ordre qu'Isaac donna à Jacob son fils d'aller en Mésopotamie pour s'y marier et les prières qu'il fit pour le succès de son voyage sont des preuves de la piété de ce Saint patriarche et de la ferme confiance qu'il avait aux promesses de Dieu. On voit l'effet de ces prières d'Isaac dans ce qui arriva à Jacob aussitôt qu'il fut parti pour aller en Mésopotamie et surtout dans la vision de cette échelle qui lui apparut en songe pour l'assurer que Dieu serait avec lui partout où il irait. Cet exemple fait voir que le Seigneur accompagne ses enfants en tous lieux et qu'il emploie ses anges pour leur sureté et pour leur défense.

Il faut faire attention après cela à la piété de Jacob qui ne demanda à Dieu que du pain pour manger et des habits pour se couvrir et fit vœu de consacrer à Dieu le lieu où il eut cette vision et la dîme de tout son bien.

Imitons un si bel exemple, soyons contents pourvu que Dieu nous donne la nourriture et les vêtements et faisons-nous un devoir inviolable de lui témoigner notre piété et notre reconnaissance, soit en lui consacrant quelque portion de nos biens, soit par tous les autres moyens qui peuvent être en notre pouvoir. 

CHAPITRE XXIX.

Jacob arrive chez Laban son oncle et il épouse ses deux filles Léa et Rachel. 

1 Jacob donc se mit en chemin, et s’en alla au pays des Orientaux.

2 Et il regarda, et voici, il vit un puits dans un champ, et là même trois troupeaux de brebis qui se reposaient près du puits ; car on y abreuvait les troupeaux ; et il y avait une grosse pierre sur l’ouverture du puits.

3 Et lorsque tous les troupeaux étaient assemblés, on roulait la pierre de dessus l’ouverture du puits, et on y abreuvait les troupeaux ; et ensuite on remettait la pierre en son lieu, sur l’ouverture du puits.

4 Et Jacob leur dit : Mes frères, d’où êtes-vous ? Et ils répondirent : Nous sommes de Caran.

5 Et il leur dit : Ne connaissez-vous point Laban, fils de Nacor ? Et ils répondirent : Nous le connaissons.

6 Il leur dit : Se porte-t-il bien ? Ils lui répondirent : Il se porte bien ; et voici Rachel sa fille, qui vient avec le troupeau.

7 Et il dit : Voilà, il est encore grand jour, il n’est pas temps de ramener les troupeaux : abreuvez les troupeaux, et les ramenez paître.

8 Ils répondirent : Nous ne pouvons le faire, jusqu’à ce que tous les troupeaux soient assemblés, et qu’on ait ôté la pierre de dessus l’ouverture du puits, afin d’abreuver les troupeaux.

9 Et comme il parlait encore avec eux, Rachel arriva avec le troupeau de son père ; car elle était bergère.

10 Et sitôt que Jacob eut vu Rachel, fille de Laban, frère de sa mère, et le troupeau de Laban, frère de sa mère, il s’approcha, il roula la pierre de dessus l’ouverture du puits, et il abreuva le troupeau de Laban, frère de sa mère.

11 Et Jacob baisa Rachel, et élevant sa voix, il pleura.

12 Et Jacob apprit à Rachel qu’il était frère de son père, et qu’il était fils de Rébecca ; et elle courut le rapporter à son père.

13 Et aussitôt que Laban eut appris des nouvelles de Jacob, fils de sa sœur, il courut au-devant de lui, l’embrassa, et le baisa, et le fit venir dans sa maison ; et Jacob récita à Laban tout ce qui lui était arrivé.

14 Et Laban lui dit : Certainement, tu es mon os et ma chair ; et il demeura avec lui un mois entier.

15 Après quoi, Laban dit à Jacob : Me serviras-tu sans aucune récompense, parce que tu es mon frère ? Dis-moi, quel sera ton salaire.

16 Or, Laban avait deux filles, dont l’aînée s’appelait Léa, et la plus jeune Rachel.

17 Mais Léa avait les yeux tendres, et Rachel avait la taille belle, et elle était belle à voir.

18 Et Jacob aimait Rachel ; et il dit : Je te servirai sept ans pour Rachel, ta plus jeune fille.

19 Et Laban répondit : Il vaut mieux que je te la donne, que si je la donnais à un autre ; demeure avec moi.

20 Jacob donc servit sept ans pour Rachel, qui ne lui semblèrent que comme peu de jours, parce qu’il l’aimait.

21 Et Jacob dit à Laban : Donne-moi ma femme ; car mon temps est accompli, et je viendrai vers elle.

22 Laban donc assembla tous les gens du lieu, et fit un festin.

23 Mais quand le soir fut venu, il prit Léa sa fille, et l’amena à Jacob, qui vint vers elle.

24 Et Laban donna Zilpa, sa servante, à Léa, sa fille, pour servante.

25 Mais au matin, voici, Jacob reconnut que c’était Léa ; et il dit à Laban : Qu’est-ce que tu m’as fait ? N’ai-je pas servi chez toi pour Rachel ? Et pourquoi m’as-tu trompé ?

26 Laban répondit : On ne fait pas ainsi dans ce lieu, de donner la plus jeune avant l’aînée.

27 Achève la semaine de celle-ci, et nous te donnerons aussi l’autre, pour le service que tu feras encore chez moi sept autres années.

28 Jacob donc fit ainsi, et il acheva la semaine de Léa, et Laban lui donna aussi à femme Rachel sa fille.

29 Et Laban donna Bilha, sa servante, à Rachel, sa fille, pour servante.

30 Il vint donc aussi vers Rachel, et il aima plus Rachel que Léa, et il servit chez Laban encore sept autres années.

31 Et l’Éternel voyant que Léa était haïe, la rendit féconde ; mais Rachel était stérile.

32 Et Léa conçut et enfanta un fils, qu’elle appela Ruben. Car elle dit : Parce que l’Éternel a regardé mon affliction, maintenant mon mari m’aimera.

33 Elle conçut encore, et enfanta un fils, et dit : Parce que l’Éternel a entendu que j’étais haïe, il m’a encore donné ce fils ; et elle l’appela Siméon.

34 Et elle conçut encore, et enfanta un fils, et dit : Maintenant mon mari sera plus uni à moi ; car je lui ai donné trois fils ; c’est pourquoi on l’appela Lévi.

35 De plus, elle conçut et accoucha d’un fils, et dit : A présent je louerai l’Éternel ; c’est pourquoi, elle l’appela Juda, et elle cessa d’avoir des enfants. 

REFLEXIONS
La principale observation qu'il y ait à faire sur ce chapitre, c’est que Dieu, selon ses promesses, accompagna Jacob dans son voyage, qu’il le conduisit heureusement dans la maison de Laban, où il se maria et qu’il lui donna par ce moyen plusieurs enfants qui furent les chefs et les pères du peuple d’Israël. Cependant il faut se souvenir que les mariages de Jacob, qui épousa plusieurs femmes, étant contraires à la première institution du mariage, Dieu ne les approuvait point, quoi qu’il les tolérât et les permit, pour des raisons prises du naturel des hommes de ce temps-là et des desseins de la providence. C‘est pourquoi aussi ces désordres qui se commettaient alors dans les mariages ont été abolis par la loi de Jésus-Christ qui a rétabli en leur entier les lois du mariage et de la chasteté, comme nous le voyons dans l’Évangile. 

CHAPITRE XXX.

Moïse rapporte la naissance des enfants que Jacob eut de ses femmes. Ensuite Jacob après avoir demeuré plusieurs années chez Laban son beau-père voulut s'en retourner dans son pays, mais Laban l'engagea à demeurer encore avec lui moyennant un salaire dont ils convinrent.

 1 Alors Rachel, voyant qu’elle ne donnait point d’enfant à Jacob, porta envie à Léa, sa sœur, et dit à Jacob : Donne-moi des enfants, autrement je suis morte.

2 Et Jacob se mit fort en colère contre Rachel, et dit : Te suis-je au lieu de Dieu ? Qui t’a empêché d’avoir des enfants ?

3 Et elle dit : Voici ma servante Bilha ; viens vers elle, et elle enfantera sur mes genoux, et j’aurai des enfants par elle.

4 Elle lui donna donc Bilha, sa servante, pour femme ; et Jacob vint vers elle.

5 Et Bilha conçut et enfanta un fils à Jacob.

6 Et Rachel dit : Dieu a jugé en ma faveur, et il a aussi exaucé ma voix, en me donnant un fils ; et elle l’appela Dan.

7 Et Bilha, servante de Rachel, conçut encore et enfanta un second fils à Jacob.

8 Et Rachel dit : J’ai fortement lutté contre ma sœur ; aussi ai-je eu la victoire ; et elle donna à cet enfant le nom de Nephthali.

9 Alors Léa, voyant qu’elle avait cessé d’avoir des enfants, prit Zilpa sa servante, et la donna à Jacob pour femme.

10 Et Zilpa, servante de Léa, enfanta un fils à Jacob.

11 Et Léa dit : Une troupe est arrivée ; et elle l’appela Gad.

12 Zilpa, servante de Léa, enfanta encore un second fils à Jacob.

13 Et Léa dit : C’est pour me rendre bienheureuse ; car les filles me diront bienheureuse ; et elle l’appela Ascer.

14 Et Ruben étant allé aux champs, au temps de la moisson des blés, y trouva des mandragores, et les apporta à Léa, sa mère. Et Rachel dit à Léa : Donne-moi, je te prie, des mandragores de ton fils.

15 Et elle lui répondit : Est-ce peu de chose que tu m’aies ôté mon mari, que tu veuilles encore prendre les mandragores de mon fils ? Et Rachel dit : Que Jacob dorme donc cette nuit avec toi, pour les mandragores de ton fils.

16 Lors donc que Jacob revint des champs au soir, Léa alla au-devant de lui, et lui dit : Tu viendras vers moi, car je t’ai loué pour les mandragores de mon fils ; et il dormit avec elle cette nuit-là.

17 Et Dieu exauça Léa, et elle conçut, et enfanta à Jacob un cinquième fils.

18 Et elle dit : Dieu m’a récompensée, après que j’ai donné ma servante à mon mari ; et elle l’appela Issacar.

19 Et Léa conçut encore, et donna un sixième fils à Jacob.

20 Et Léa dit : Dieu m’a donné un bon douaire ; maintenant mon mari demeurera avec moi ; car je lui ai donné six enfants. Elle l’appela Zabulon.

21 Ensuite elle enfanta une fille, et elle l’appela Dina.

22 Et Dieu se souvint de Rachel, et Dieu l’ayant exaucée, la rendit féconde.

23 Alors elle conçut et enfanta un fils, et dit : Dieu a ôté mon opprobre.

24 Et elle l’appela Joseph, en disant : L’Eternel me donne encore un autre fils.

25 Et après que Rachel eut enfanté Joseph, Jacob dit à Laban : Donne-moi mon congé, afin que je retourne en mon lieu, et en mon pays.

26 Donne-moi mes femmes et mes enfants pour lesquels je t’ai servi, et je m’en irai ; car tu sais le service que je t’ai rendu.

27 Et Laban lui répondit : Ecoute, je te prie, si j’ai trouvé grâce devant toi : j’ai reconnu par expérience que l’Eternel m’a béni à cause de toi.

28 Il lui dit aussi : Prescris-moi le salaire que tu exiges de moi, et je te le donnerai.

29 Et il lui répondit : Tu sais comme je t’ai servi, et ce qu’est devenu ton bétail avec moi.

30 Car tu avais peu de chose, avant que je vinsse ; mais ton bien s’est fort accru, et l’Eternel t’a béni aussitôt que j’ai mis le pied chez toi ; et maintenant, quand ferai-je aussi quelque chose pour ma maison ?

31 Et Laban lui dit : Que te donnerai-je ? Et Jacob répondit : Tu ne me donneras rien ; mais si tu fais ceci, je paîtrai encore tes troupeaux, et je les garderai.

32 Je passerai aujourd’hui parmi tes troupeaux, et je mettrai à part toutes les brebis picotées et tachetées, et tous les agneaux roux, et les chèvres tachetées et picotées entre les chèvres ; et ce sera là mon salaire.

33 Et à l’avenir, ma justice me rendra témoignage, quand tu viendras reconnaître mon salaire. Tout ce qui ne sera point picoté ou tacheté entre les chèvres, et tout ce qui ne sera point roux entre les agneaux, sera tenu pour un larcin, s’il est trouvé chez moi.

34 Alors Laban lui dit : Je le veux, je le souhaite ; que la chose soit comme tu l’as dit.

35 Et en ce jour-là il sépara les boucs marquetés et tachetés, et toutes les chèvres picotées et tachetées, toutes celles où il y avait du blanc, et tous les agneaux roux ; et il les mit entre les mains de ses fils.

36 Et il mit l’espace de trois journées de chemin entre lui et Jacob. Et Jacob paissait le reste des troupeaux de Laban.

37 Mais Jacob prit des verges vertes, de peuplier, de coudrier, et de châtaignier, et il en ôta les écorces, en découvrant le blanc qui était aux verges.

38 Et il mit les verges, qu’il avait pelées au-devant des troupeaux, dans les auges et les abreuvoirs où les brebis venaient boire ; et elles entraient en chaleur, quand elles venaient boire.

39 Les brebis donc entraient en chaleur à la vue des verges, et elles faisaient des brebis marquetées, picotées et tachetées.

40 Et Jacob partagea les agneaux, et fit que les brebis du troupeau de Laban avaient en vue les brebis marquetées, et tout ce qui était roux ; et il mit ses troupeaux à part, et ne les mit point auprès des troupeaux de Laban.

41 Et il arrivait que toutes les fois que les brebis hâtives venaient en chaleur, Jacob mettait les verges dans les abreuvoirs, devant les yeux du troupeau, afin qu’elles entrassent en chaleur, en regardant les verges.

42 Mais quand les brebis étaient tardives, il ne les mettait point. Et les tardives appartenaient à Laban ; mais les hâtives étaient pour Jacob.

43 Ainsi cet homme s’accrut fort en biens, et il eut de grands troupeaux, des servantes et des serviteurs, des chameaux et des ânes. 

REFLEXIONS
Sur ce chapitre, de même que sur le précédent, il faut remarquer que :

I. Ce grand nombre d’enfants qui naquirent à Jacob servirent à rendre sa postérité extrêmement nombreuse, quoique cependant Dieu n'approuvât pas tous les mariages qu’il avait contractés ainsi qu’il a déjà été dit. On voit même, par la jalousie et les divisions qu’il y avait entre les femmes de Jacob, aussi bien que par les mœurs déréglées de la plupart de ses enfants, que ces sortes de mariages avaient des suites fâcheuses.

II. On doit remarquer, que quoique Laban fut mal intentionné contre Jacob et qu'il ne le retint que pour son intérêt, Dieu bénit Jacob encore plus qu'auparavant et qu'il augmenta considérablement ses biens et ses troupeaux. Au reste, les moyens dont Jacob se servit pour multiplier ses troupeaux n'auraient pas été légitimes si Dieu, pour le récompenser des injustices que Laban lui faisait, ne l’eut autorisé à les mettre en usage, ainsi que cela est dit dans le chapitre suivant. Dieu, pour accomplir ce qu’il a résolu, permet quelquefois que les hommes emploient des moyens qui ne seraient pas innocents en d'autres circonstances, il tire le bien du mal et le péché même contribue à l’exécution de ses desseins, mais cela n’autorise en aucune façon à faire ce qui est mauvais. Et les chrétiens surtout, qui sont beaucoup plus éclairés que les hommes ne l'étaient du temps des patriarches, ne doivent jamais se départir de ce que les règles les plus exactes de la piété, de la pureté et de la justice prescrivent. 

CHAPITRE XXXI.

Jacob, ayant demeuré vingt ans chez Laban son beau-père, s'en retourne en Canaan par le commandement de Dieu avec sa famille et tout son bien, sans le dire à Laban. Laban en ayant été averti le poursuivit, mais Dieu l'empêcha de faire aucun mal à Jacob, tellement qu’il le laissa aller en paix et que même ils traitèrent alliance l'un avec l'autre. 

1 Après cela, Jacob entendit les discours des enfants de Laban, qui disaient : Jacob a pris tout ce qui appartenait à notre père ; et il a acquis toutes ses richesses de ce qui était à notre père.

2 Et Jacob remarqua que le visage de Laban n’était plus tel à son égard qu’il était auparavant.

3 Et l’Éternel dit à Jacob : Retourne au pays de tes pères, et vers ton parentage, et je serai avec toi.

4 Jacob donc envoya appeler Rachel et Léa, pour venir aux champs vers ses troupeaux.

5 Et il leur dit : Je connais que le visage de votre père n’est plus tel à mon égard qu’il était autrefois ; cependant le Dieu de mon père a été avec moi ;

6 Et vous savez que j’ai servi votre père de toutes mes forces.

7 Mais votre père s’est moqué de moi, et a changé mon salaire dix fois ; néanmoins, Dieu ne lui a point permis de me faire aucun mal.

8 Quand il me disait ainsi : Les picotées seront ton salaire ; alors toutes les brebis ont fait des agneaux picotés. Et quand il disait : Les marquetées seront ton salaire ; alors toutes les brebis faisaient des agneaux marquetés.

9 Dieu donc a ôté le bétail à votre père et me l’a donné.

10 Car il arriva au temps que les brebis entraient en chaleur, que je levai mes yeux et vis en songe que les boucs qui couvraient les chèvres étaient marquetés, picotés et tachetés.

11 Et l’ange de Dieu me dit en songe : Jacob. Et je répondis : Me voici.

12 Et il dit : Lève maintenant tes yeux, et regarde : tous les boucs, qui couvrent les chèvres, sont marquetés, picotés et tachetés. Car j’ai vu ce que te fait Laban.

13 Je suis le Dieu fort de Béthel, où tu oignis la pierre que tu dressas pour monument, quand tu me fis là un vœu. Maintenant donc, lève-toi, sors de ce pays, et retourne au pays de ton parentage.

14 Alors Rachel et Léa répondirent et lui dirent : Avons-nous encore quelque portion et quelque héritage dans la maison de notre père ?

15 Ne nous a-t-il pas traitées comme des étrangères, puisqu’il nous a vendues, et que même il a entièrement mangé notre argent.

16 Car toutes les richesses que Dieu a ôtées à notre père, nous appartenaient et à nos enfants. Maintenant donc, fais ce que Dieu t’a dit.

17 Ainsi Jacob se leva, et fit monter ses enfants et ses femmes sur des chameaux.

18 Et il emmena tout son bétail et le bien qu’il avait acquis, et tout ce qu’il possédait, et qu’il avait acquis en Paddan-Aram, pour venir vers Isaac, son père, au pays de Canaan.

19 Or, comme Laban était allé tondre ses brebis, Rachel déroba les marmousets qui étaient à son père.

20 Et Jacob se déroba de Laban le Syrien ; car il ne lui dit point qu’il voulait s’enfuir.

21 Il s’enfuit donc avec tout ce qui lui appartenait, et il partit, et passa le fleuve, et s’avança vers la montagne de Galaad.

22 Et au troisième jour on rapporta à Laban que Jacob s’en était enfui.

23 Alors il prit ses frères avec lui, et le poursuivit durant sept jours, et l’atteignit à la montagne de Galaad.

24 Mais Dieu apparut à Laban, le Syrien, en songe, la nuit, et lui dit : Prends garde de ne rien dire à Jacob, ni en bien ni en mal.

25 Laban donc atteignit Jacob. Et Jacob avait planté ses tentes sur la montagne. Et Laban tendit aussi les siennes avec ses frères sur la montagne de Galaad.

26 Et Laban dit à Jacob : Qu’as-tu fait ? Tu t’es dérobé de moi ; tu as emmené mes filles comme des prisonnières de guerre.

27 Pourquoi t’es-tu enfui en cachette, et t’es-tu dérobé de moi, sans m’en donner avis, car je t’eusse conduit avec joie et chansons, au son des tambours et de la harpe.

28 Tu ne m’as pas seulement laissé baiser mes fils et mes filles. Tu en as usé follement.

29 J’avais en main le pouvoir de vous faire du mal ; mais le Dieu de votre père m’a parlé la nuit passée, et m’a dit : Prends garde de ne rien dire à Jacob, ni en bien ni en mal.

30 Or, maintenant, je vois que tu t’es retiré si promptement, parce que tu souhaitais avec passion de revoir la maison de ton père ; mais pourquoi m’as-tu dérobé mes dieux ?

31 Et Jacob répondant, dit à Laban : Je me suis retiré, parce que je craignais ; car je disais en moi-même, qu’il fallait prendre garde que tu ne me ravisses tes filles.

32 Mais, que celui que tu trouveras avoir tes dieux, ne vive point. Reconnais devant nos frères, s’il y a quelque chose qui t’appartienne chez moi, et prends-le. Car Jacob ignorait que Rachel les eût dérobés.

33 Alors Laban vint dans la tente de Jacob et dans celle de Léa, et dans la tente des deux servantes, et il ne les trouva point. Or, étant sorti de la tente de Léa, il entra dans la tente de Rachel.

34 Mais Rachel prit les idoles, et les ayant mises dans le bât d’un chameau, elle s’assit dessus. Et Laban fouilla dans toute la tente, et ne les trouva point.

35 Et elle dit à son père : Que mon seigneur ne se fâche point de ce que je ne puis me lever devant lui ; car j’ai ce que les femmes ont accoutumé d’avoir. Et il fouilla ; mais il ne trouva point les marmousets.

36 Et Jacob se mit en colère, et querella Laban, et prenant la parole, il lui dit : Quel est mon crime ? Quel est mon péché, pour me poursuivre ainsi avec tant de chaleur ?

37 Tu as fouillé tout mon ménage : qu’as-tu trouvé de tous les meubles de ta maison ? Fais-le voir ici devant mes frères, et devant les tiens, et qu’ils soient juges entre nous deux.

38 J’ai été avec toi ces vingt ans passés ; tes brebis et tes chèvres n’ont point avorté ; je n’ai point mangé les moutons de tes troupeaux.

39 Que s’il y en a eu qui aient été déchirées par les bêtes sauvages, je ne te les ai point rapportées ; j’en ai moi-même porté le dommage ; et tu me les redemandais, même ce qui avait été dérobé, soit de jour, soit de nuit.

40 Le hâle   consumait le jour, et la gelée pendant la nuit ; et le sommeil fuyait de mes yeux.

41 Je t’ai servi ces vingt ans passés dans ta maison ; quatorze ans pour tes deux filles, et six pour tes troupeaux, et tu m’as changé dix fois mon salaire.

42 Si le Dieu de mon père, le Dieu d’Abraham, et la frayeur d’Isaac n’eût été pour moi, sans doute tu m’eusses maintenant renvoyé à vide. Mais Dieu a regardé mon affliction et le travail de mes mains ; et il t’a repris la nuit passée.

43 Et Laban répondit à Jacob et dit : Ces filles sont mes filles, ces enfants sont mes enfants, et ces troupeaux sont mes troupeaux, et tout ce que tu vois est à moi. Et que ferais-je aujourd’hui à mes filles, ou aux enfants qu’elles ont enfantés ?

44 Maintenant donc, viens, traitons ensemble une alliance qui serve de témoignage entre toi et moi.

45 Et Jacob prit une pierre, et la dressa pour monument.

46 Et il dit à ses frères : Amassez des pierres. Et ayant apporté des pierres, ils en firent un monceau, et mangèrent sur ce monceau de pierres.

47 Et Laban l’appela Jégar-Sahadutha, et Jacob l’appela Galhed.

48 Après cela Laban dit : Ce monceau sera aujourd’hui témoin entre moi et toi ; c’est pourquoi il fut nommé Galhed.

49 Il fut aussi appelé Mitspa, parce que Laban dit : Que l’Éternel veille sur moi et sur toi, quand nous nous serons retirés l’un de l’autre.

50 Si tu maltraites mes filles, et si tu prends une autre femme que mes filles, il n’y aura personne qui en soit témoin entre nous. Regarde, Dieu sera témoin entre moi et toi.

51 Et Laban dit encore à Jacob : Regarde ce monceau de pierres, vois le monument que j’ai dressé entre moi et toi.

52 Ce monceau et ce monument seront témoins que je ne passerai point ce monceau de pierres pour aller à toi ; et qu’aussi tu ne passeras point ce monceau et ce monument pour me venir faire du mal.

53 Que le Dieu d’Abraham et le Dieu de Nacor, le Dieu de leur père, juge entre nous ! Et Jacob jura par la Frayeur d’Isaac son père.

54 Et Jacob offrit un sacrifice sur la montagne ; et il invita ses frères pour manger du pain. Ils mangèrent donc du pain, et passèrent la nuit sur la montagne.

55 Et Laban se levant de bon matin, baisa ses fils et ses filles, et les bénit et s’en alla. Ainsi Laban s’en retourna chez lui. 

REFLEXIIONS

I. La première, que Dieu, selon ses promesses, accorda à Jacob de grandes richesses pendant qu'il demeura chez Laban son beau-père.

II. La seconde, que Dieu ordonna à Jacob de retourner au pays de Canaan qu'il devait posséder,
l’ayant auparavant préparé lui et sa famille à quitter la Mésopotamie par l'injustice et la dureté avec laquelle Laban en avait usé à leur égard.

III. La troisième, que Laban irrité du départ de Jacob avait eu d’abord intention de lui nuire, mais que Dieu lui ayant défendu de faire aucun mal à Jacob, ils se réconcilièrent et qu’ils firent alliance ensemble. C’est ainsi que Dieu bénit ceux qu’il aime, qu’il les conduit, qu'il les préserve des dangers qui les menacent et qu’il apaise en leur faveur le cœur de leurs ennemis.

V. Il faut encore remarquer que Rachel, en partant de chez son père, prit avec elle les marmousets ou les idoles qu’il y avait dans la maison, de quoi Laban lui fit de grands reproches. Cela montre que, quoique le vrai Dieu fût connu dans la famille de Laban, l’idolâtrie commençait à s'y établir et qu'ainsi il était nécessaire que Jacob et sa famille se retirassent de ce pays-là et qu'il revint dans le lieu où Isaac son père demeurait pour y servir Dieu avec pureté.

CHAPITRE XXXII.

Jacob, apprenant qu’Ésaü son frère venait à lui avec quatre cents hommes, implore le secours de Dieu et envoie des présents à Ésaü pour l'apaiser. Un ange lutte avec Jacob, le bénit, lui donne le nom d'Israël et l'assure que Dieu le protègerait.

1 Et Jacob continua son chemin, et les anges de Dieu lui vinrent au-devant.

2 Et aussitôt que Jacob les eut vus, il dit : C’est ici le camp de Dieu ; et il appela ce lieu-là Mahanajim.

3 Et Jacob envoya des messagers devant lui vers Ésaü, son frère, au pays de Séhir, au territoire de l’Idumée.

4 Et il leur donna ce commandement, disant : Vous parlerez ainsi à Ésaü, mon seigneur : Ainsi a dit ton serviteur Jacob : J’ai habité comme étranger chez Laban, et j’y ai demeuré jusqu’à présent.

5 Et j’ai des bœufs, des ânes, des brebis, des serviteurs et des servantes ; et j’envoie des gens pour l’annoncer à mon seigneur, afin de trouver grâce devant lui.

6 Et les messagers retournèrent à Jacob, disant : Nous sommes venus vers ton frère Ésaü ; et le voici qui vient au-devant de toi, ayant quatre cents hommes avec soi.

7 Alors Jacob eut une grande peur, et il fut fort en peine ; c’est pourquoi ayant partagé le peuple qui était avec lui, et les brebis, et les bœufs, et les chameaux, en deux bandes, il dit :

8 Si Ésaü vient attaquer une de ces bandes, et la frappe, l’autre, qui demeurera de reste, échappera.

9 Jacob dit aussi : Ô Dieu de mon père Abraham, Dieu de mon père Isaac ! Ô Éternel, qui m’as dit : Retourne en ton pays, et au lieu de ta naissance, et je te ferai du bien ;

10 je suis trop petit au prix de toutes tes faveurs et de la vérité que tu as gardée dans tes promesses envers ton serviteur ; car j’ai passé avec mon bâton ce fleuve du Jourdain ; mais, maintenant, je retourne avec ces deux bandes.

11 Je te prie, délivre-moi de la main de mon frère Ésaü ; car je crains qu’il ne vienne et qu’il ne me frappe, et qu’il ne mette à mort la mère avec les enfants.

12 Cependant, tu as dit : Certainement, je te ferai du bien, et je ferai devenir ta postérité comme le sable de la mer, qu’on ne saurait compter à cause de son grand nombre.

13 Et il passa la nuit en ce lieu-là, et il prit de ce qui lui vint à la main pour en faire un présent à Ésaü son frère :

14 deux cents chèvres, vingt boucs, deux cents brebis, vingt moutons,

15 trente femelles de chameaux qui allaitaient, avec leurs petits, quarante jeunes vaches, dix jeunes taureaux, vingt ânesses et dix ânons.

16 Et il mit entre les mains de ses serviteurs chaque troupeau à part, et leur dit : Passez devant moi, et faites qu’il y ait de la distance entre un troupeau et l’autre.

17 Et il donna cet ordre au premier, disant : Quand Ésaü, mon frère, te rencontrera et te demandera : A qui es-tu, et où vas-tu, et à qui sont ces choses qui sont devant toi ?

18 alors tu diras : Je suis à ton serviteur Jacob ; c’est un présent qu’il envoie à Ésaü mon seigneur, et il vient lui-même après nous.

19 Il fit le même commandement au second, et le même au troisième, et le même à tous ceux qui allaient après les troupeaux, disant : Vous tiendrez ces discours à Ésaü, quand vous le rencontrerez ;

20 et vous direz : Voici, même ton serviteur Jacob est derrière nous. Car il disait : Je l’apaiserai par ce présent qui ira devant moi, et après cela, je verrai sa face ; peut-être qu’il me regardera favorablement.

21 Le présent donc marcha devant lui ; mais il demeura cette nuit-là avec sa troupe.

22 Et s’étant levé cette nuit-là, il prit ses deux femmes et ses deux servantes et ses onze enfants, et il passa le gué de Jabbok.

23 Il les prit donc, et leur fit passer le torrent. Il fit aussi passer tout ce qu’il avait.

24 Or, Jacob étant demeuré seul, un homme lutta avec lui, jusqu’à ce que l’aube du jour fût levée.

25 Et quand cet homme-là vit qu’il ne pouvait le vaincre, il toucha l’endroit de l’emboîture de sa hanche ; ainsi l’emboîture de l’os de la hanche de Jacob fut démise pendant que l’homme luttait avec lui.

26 Et cet homme lui dit : Laisse-moi, car l’aube du jour est levée. Mais il dit : Je ne te laisserai point, que tu ne m’aies béni.

27 Et il lui dit : Quel est ton nom ? Et il répondit : Jacob.

28 Alors il dit : Ton nom ne sera plus Jacob, mais Israël ; car tu as été le plus fort.

29 Et Jacob l’interrogea, disant : Je te prie, apprends-moi ton nom. Et il répondit : Pourquoi demandes-tu mon nom ? Et il le bénit là.

30 Et Jacob nomma le lieu, Péniel ; car, dit-il, j’ai vu Dieu face à face, et mon âme a été délivrée.

31 Et le soleil se leva, aussitôt qu’il eut passé Péniel ; et il était boiteux d’une hanche.

32 C’est pourquoi jusqu’à ce jour les enfants d’Israël ne mangent point du muscle retirant, qui est à l’endroit de l’emboîture de la hanche, parce que cet homme-là toucha l’endroit de l’emboîture de la hanche de Jacob, à l’endroit du muscle retirant.

REFLEXIONS

I. L'exemple de Jacob qui, dans la crainte où il était qu'Ésaü ne le maltraitât, implore le secours du Seigneur et tâche d'apaiser son frère par sa soumission, nous apprend à recourir à Dieu dans les dangers et à joindre la prudence à la prière en faisant tous nos efforts pour adoucir ceux qui sont irrités contre nous et pour les porter à la réconciliation.

II. Il paraît que Jacob était fort riche en bétail, puisque dans le présent qu'il fit à son frère, il y avait un si grand nombre de chameaux et d'animaux domestiques.

III. Comme Jacob rendit grâce à Dieu avec beaucoup d'humilité et de reconnaissance de la protection et de toutes les bénédictions qu'il lui avait accordées jusqu'alors, nous devons à son imitation remercier Dieu et nous humilier devant lui dans le sentiment de ses grâces envers nous et de notre indignité.

IV. Pour ce qui est de la lutte de Jacob avec l'ange, il faut savoir que Dieu voulait assurer par-là Jacob qu'il n'avait rien à craindre de son frère Ésaü et qu'il serait plus fort que tous ceux qui voudraient lui nuire, ce fut pour la même raison que l'ange donna à Jacob le nom d'Israël qui signifie celui qui a prévalu luttant avec Dieu.

Cependant, il est à remarquer que l'ange rendit Jacob boiteux afin qu'il eût en cela pendant toute sa vie une preuve de ce qui lui était arrivé dans cette occasion et qu'il reconnut que, celui avec qui il avait lutté, était un ange de Dieu et que s'il en avait été vainqueur, c'était parce que Dieu l'avait bien voulu ainsi.

V. Enfin, il faut remarquer sur cette histoire avec le prophète Osée, que ce fut en pleurant, en priant et en demandant grâce que ce patriarche fut le plus fort dans cette lutte, par où nous voyons quelle est l'efficace de la prière lorsqu'elle est faite avec foi, avec ardeur et avec persévérance.

CHAPITRE XXXIII.

Moïse récite premièrement ce qui se passa dans l'entrevue de Jacob et d’Ésaü, et en second lieu l'arrivée de Jacob en Sichem où il bâtit un autel au Seigneur.

1 Et Jacob levant les yeux, regarda. Et voici, Ésaü venait, et quatre cents hommes avec lui. Alors il divisa ses enfants en trois bandes, sous Léa, sous Rachel, et sous les deux servantes.

2 Et il mit à la tête les servantes avec leurs enfants ; Léa et ses enfants après, et Rachel et Joseph au dernier rang.

3 Et il passa devant eux, et se prosterna en terre sept fois, jusqu’à ce qu’il se fût approché de son frère.

4 Mais Ésaü courut au-devant de lui et l’embrassa, et se jetant sur son cou, il le baisa, et ils pleurèrent.

5 Et levant ses yeux, il vit les femmes et les enfants, et il dit : Qui sont ceux-là ? Sont-ils à toi ? Et il répondit : Ce sont les enfants que Dieu, par sa grâce, a donnés à ton serviteur.

6 Et les servantes s’approchèrent, elles et leurs enfants, et se prosternèrent.

7 Léa aussi s’approcha, et ses enfants, et ils se prosternèrent. Et ensuite Joseph et Rachel s’approchèrent, et ils se prosternèrent aussi.

8 Et il dit : Que veux-tu faire avec tout ce camp que j’ai rencontré ? Et il répondit : C’est pour trouver grâce devant mon seigneur.

9 Et Ésaü dit : J’en ai abondamment, mon frère. Garde ce qui est à toi.

10 Et Jacob répondit : Non, je te prie, si maintenant j’ai trouvé grâce devant toi, reçois ce présent de ma main ; car j’ai vu ta face, comme si j’eusse vu la face de Dieu ; et tu as été apaisé envers moi.

11 Reçois, je te prie, le présent qui t’a été offert ; car Dieu m’en a donné par sa grâce, et j’ai de tout. Il le pressa donc tant qu’il le prit.

12 Et Ésaü dit : Partons et marchons, et je marcherai devant toi.

13 Et Jacob dit : Mon seigneur sait que ces enfants sont tendres, et je suis chargé de brebis et de vaches qui allaitent ; que si on les presse d’un seul jour, tout le troupeau mourra.

14 Je te prie, que mon seigneur marche devant ton serviteur ; et je m’en irai tout doucement, au pas du bétail qui est devant moi, et de ces petits enfants, jusqu’à ce que j’arrive chez mon seigneur à Séhir.

15 Et Ésaü dit : Je te prie que je fasse demeurer avec toi quelques-uns des gens qui sont avec moi. Et il répondit : Pourquoi cela ? Je te prie que je trouve grâce avec mon seigneur.

16 Ainsi Ésaü s’en retourna ce jour-là à Séhir, par le même chemin qu’il était venu.

17 Et Jacob s’en alla à Succoth, et il y bâtit une maison pour soi, et il y fit des cabanes pour son bétail ; c’est pourquoi il nomma le lieu Succoth.

18 Et Jacob arriva en bonne santé à la ville de Sichem, au pays de Canaan, venant de Paddan-Aram ; et il se campa devant la ville.

19 Ensuite il acheta, de la main des enfants d’Hémor, père de Sichem, une portion du champ dans lequel il avait dressé sa tente, et il en paya cent pièces d’argent.

20 Et il dressa là un autel, qu’il appela : Le Dieu fort, le Dieu d’Israël.

REFLEXIONS
On voit dans ce chapitre comment Jacob apaisa son frère Ésaü, par son respect et par sa soumission et comment Dieu le garantit et le conduisit heureusement au pays de Canaan. Nous devons reconnaître ici que Dieu exauce et délivre ceux qui se confient en lui, qu’il change en leur faveur le cœur de leurs ennemis et que la douceur et l'humilité ont beaucoup de force pour adoucir les personnes irritées. Le soin qu'eut Jacob de bâtir un autel dans le lieu où il s’établit est un effet de sa piété. À son imitation, nous devons nous acquitter avec soin des devoirs de la religion et témoigner par ce moyen à Dieu notre reconnaissance pour tous les biens qu'il nous faits.

CHAPITRE XXXIV.

Sichem enlève Dina fille de Jacob et l'obtient en mariage à condition que tous les habitants de la ville de Sichem soient circoncis, ce qui ayant été fait, deux des fils de Jacob prirent ce temps-là pour tuer les habitants de Sichem.

1 Or Dina, qui était la fille que Léa avait enfantée à Jacob, sortit pour voir les filles du pays.

2 Et Sichem, fils d’Hémor, Hévien, prince du pays, la vit, et la ravit, et coucha avec elle, et lui fit violence.

3 Et son cœur demeura fortement attaché à Dina, fille de Jacob, et il aima la jeune fille, et lui parla selon son cœur.

4 Sichem aussi parla à Hémor son père, et lui dit : Prends cette fille, et fais que je l’aie pour femme.

5 Or, Jacob apprit qu’il avait violé Dina sa fille, et ses fils étaient avec son bétail aux champs. Ainsi Jacob se tut jusqu’à ce qu’ils fussent revenus.

6 Alors Hémor, père de Sichem, vint pour parler à Jacob.

7 Et aussitôt que les enfants de Jacob eurent appris ce qui était arrivé, ils revinrent des champs, et furent extrêmement fâchés et fort irrités, à cause de l’action infâme que cet homme avait commise contre Israël, en couchant avec la fille de Jacob, ce qui ne se devait point faire.

8 Et Hémor leur parla et leur dit : Sichem, mon fils, a beaucoup d’affection pour votre fille : donnez-la-lui, je vous prie, pour femme.

9 Et alliez-vous avec nous ; donnez-nous vos filles, et prenez nos filles pour vous.

10 et habitez avec nous ; et le pays sera à votre disposition. Demeurez-y, et y trafiquez, et le possédez.

11 Sichem aussi dit au père et aux frères de la fille : Que je trouve grâce devant vous, et je donnerai tout ce que vous me direz.

12 Imposez-moi un grand douaire, et de grands présents, et je les donnerai comme vous me direz ; et donnez-moi la jeune fille pour femme.

13 Alors les enfants de Jacob répondirent à Sichem et à Hémor, son père ; et parlant à dessein de les tromper, parce qu’il avait violé Dina leur sœur,

14 ils leur dirent : Nous ne pouvons faire cela, ni donner notre sœur à un homme incirconcis ; car ce nous serait un opprobre.

15 Mais nous consentirons à ce que vous voulez, sous cette condition, si vous devenez semblables à nous, en circoncisant tous les mâles qui sont parmi vous.

16 Alors nous vous donnerons nos filles, et nous prendrons les vôtres pour nous ; et nous habiterons avec vous, et nous ne serons plus qu’un peuple.

17 Mais si vous ne voulez pas écouter la demande que nous vous faisons, d’être circoncis, nous prendrons notre fille, et nous nous en irons.

18 Et leurs discours plurent à Hémor et à Sichem, fils d’Hémor.

19 Et le jeune homme ne différa point à faire ce qu’on lui avait proposé ; car la fille de Jacob lui agréait beaucoup ; et il était le plus considéré de tous ceux de la maison de son père.

20 Hémor donc et Sichem son fils vinrent à la porte de leur ville, et parlèrent aux gens de leur ville, et leur dirent :

21 Ces gens-ci sont fort paisibles : ils sont avec nous ; qu’ils habitent au pays, et qu’ils y trafiquent. Et voici, le pays est d’une assez grande étendue pour eux ; nous prendrons pour nos femmes leurs filles, et nous leur donnerons les nôtres.

22 Mais ils ne consentiront d’habiter avec nous pour n’être qu’un seul peuple, qu’à cette condition, que tout mâle qui est parmi nous, soit circoncis comme ils sont circoncis.

23 Leur bétail, et leurs biens, et toutes leurs bêtes, ne seront-ils pas à nous ? Donnons-leur seulement cette satisfaction, et qu’ils demeurent avec nous.

24 Et tous ceux qui sortaient par la porte de leur ville, obéirent à Hémor et à Sichem son fils, et tout mâle qui sortait par la porte de leur ville fut circoncis.

25 Et il arriva au troisième jour, lorsqu’ils étaient dans la douleur, que deux des enfants de Jacob, Siméon et Lévi, frères de Dina, ayant pris leur épée, entrèrent hardiment dans la ville, et tuèrent tous les mâles.

26 Ils tuèrent aussi au tranchant de l’épée Hémor et Sichem son fils ; et ils prirent Dina de la maison de Sichem, et ils sortirent.

27 Et les enfants de Jacob se jetèrent sur ceux qui avaient été tués, et pillèrent la ville, parce qu’ils avaient violé leur sœur.

28 Et ils prirent leurs troupeaux, leurs ânes, et ce qui était dans la ville et aux champs ;

29 et tous leurs biens, et tous leurs petits-enfants, et ils emmenèrent prisonnières leurs femmes, et les pillèrent ; et ils prirent tout ce qui était dans les maisons.

30 Alors Jacob dit à Siméon et à Lévi : Vous m’avez troublé, en me mettant en mauvaise odeur parmi les habitants du pays, tant Cananéens que Phérésiens ; et pour ce qui est de moi, nous sommes en petit nombre ; ils s’assembleront donc contre moi, et ils me frapperont, et ils me détruiront, moi et ma maison.

31 Et ils répondirent : Devions-nous souffrir qu’on fît de notre sœur comme d’une prostituée ?

REFLEXIONS
Voici les instructions que cette histoire nous donne :

I. Ce qui arriva à Dina en allant voir les Sichémites nous apprend à fuir les occasions de tomber dans la tentation ou d'y faire tomber les autres.

II. La vengeance que les fils de Jacob tirèrent de l'outrage fait à leur sœur doit être regardée comme une perfidie et une action lâche, cruelle et même impie puisqu'ils se servirent du prétexte de la religion pour tuer les Sichémites, aussi fut-elle blâmée par Jacob qui reprocha cette violence à ses fils même au lit de la mort.

III. Il faut remarquer que quoique cette action fût injuste, Dieu la permit afin de punir Sichem du crime qu'il avait commis.

IV. Nous voyons ici que l'impureté a souvent des suites funestes et qu'il est très dangereux de suivre les mouvements de la vengeance.

V. Enfin, il faut considérer cet événement comme une épreuve que Dieu envoya à Jacob et comme un moyen dont la providence se servit pour empêcher que ce patriarche ne s'arrêtât pour lors dans ce pays-là.

CHAPITRE XXXV.

Jacob ôte les idoles de sa maison et va à Béthel où il bâtit un autel au Seigneur et où Dieu lui réitère les promesses qu’il avait faites. Après cela, il part de Béthel. Rachel sa femme meurt en enfantant Benjamin et il arrive à Hébron avec toute sa famille vers son père Isaac dont la mort est rapportée ici. 

1 Or, Dieu dit à Jacob : Lève-toi, monte à Béthel, et demeure là, et y dresse un autel au Dieu fort, qui t’apparut lorsque tu fuyais de devant Ésaü ton frère.

2 Jacob donc dit à sa famille et à tous ceux qui étaient avec lui : Ôtez les dieux des étrangers qui sont au milieu de vous, et purifiez-vous et changez de vêtements ;

3 et levons-nous et montons à Béthel, et je ferai là un autel au Dieu fort, qui m’a répondu au jour de ma détresse, et qui a été avec moi pendant mon voyage.

4 Alors ils donnèrent à Jacob tous les dieux des étrangers qu’ils avaient et les bagues qui étaient pendues à leurs oreilles, et il les enterra sous un chêne, qui était auprès de Sichem.

5 Ensuite ils partirent. Et Dieu frappa de terreur les villes qui étaient autour d’eux, tellement qu’ils ne poursuivirent point les enfants de Jacob.

6 Ainsi Jacob, et tout le peuple qui était avec lui, vint à Luz, qui est au pays de Canaan, et qui est appelée Béthel.

7 Et il y bâtit un autel, et il appela ce lieu-là : Le Dieu fort de Béthel ; car Dieu lui était apparu là, lorsqu’il fuyait de devant son frère.

8 Alors mourut Débora, la nourrice de Rébecca ; et elle fut ensevelie au-dessous de Béthel, sous un chêne, qui fut appelé Allonbacuth.

9 Et Dieu apparut encore à Jacob, lorsqu’il venait de Paddan-Aram ; et il le bénit,

10 et il lui dit : Ton nom est Jacob ; mais tu ne seras plus appelé Jacob ; car ton nom sera Israël ; et il appela son nom Israël.

11 Dieu lui dit aussi : Je suis le Dieu fort, tout-puissant : Augmente et multiplie. Une nation, même une multitude de nations naîtront de toi, des rois même sortiront de toi.

12 Et je te donnerai le pays que j’ai donné à Abraham et à Isaac, et je le donnerai à ta postérité après toi.

13 Et Dieu remonta d’avec lui, du lieu où il lui avait parlé.

14 Et Jacob dressa un monument au lieu où Dieu lui avait parlé, un monument de pierres, et il fit dessus une aspersion, et y répandit de l’huile.

15 Jacob donc appela le lieu où Dieu lui avait parlé : Béthel.

16 Et ils partirent de Béthel, et il y avait encore quelque petit espace de pays pour venir à Ephrat, lorsque Rachel enfanta ; et elle fut dans un grand travail.

17 Et comme elle avait beaucoup de peine à accoucher, la sage-femme lui dit : Ne crains point, car tu auras encore un fils.

18 Et en expirant, car elle mourut, elle nomma l’enfant Bénoni ; mais son père l’appela Benjamin.

19 C’est ainsi que mourut Rachel, et elle fut ensevelie au chemin d’Ephrat, qui est Béthléhem.

20 Et Jacob dressa un monument sur sa sépulture ; et c’est le monument de la sépulture de Rachel, qui subsiste encore aujourd’hui.

21 Après cela, Israël partit, et il dressa ses tentes au-delà de Migdal-Héder.

22 Et il arriva pendant qu’Israël demeurait en ce pays-là, que Ruben vint et coucha avec Bilha, concubine de son père ; et Israël en fut averti. Or, Jacob avait douze fils.

23 Les fils de Léa étaient : Ruben, premier-né de Jacob, Siméon, Lévi, Juda, Issacar et Zabulon.

24 Les fils de Rachel : Joseph et Benjamin.

25 Les fils de Bilha, servante de Rachel : Dan et Nephthali.

26 Les fils de Zilpa, servante de Léa : Gad et Ascer. Ce sont là les enfants de Jacob qui lui naquirent en Paddan-Aram.

27 Et Jacob vint à Isaac son père, en la plaine de Mamré en Kirjatharbah, qui est Hébron, où Abraham et Isaac avaient habité comme étrangers.

28 Et le temps que vécut Isaac, fut cent quatre-vingts ans.

29 Ainsi Isaac ayant perdu ses forces, mourut, et fut recueilli avec ses peuples, âgé et rassasié de jours, et Ésaü et Jacob, ses fils, l’ensevelirent.

REFLEXIONS
Ce qu’il faut remarquer dans ce chapitre, c’est :

I. Que les fréquents changements d’habitation de Jacob et les afflictions dont Dieu le visita, particulièrement par la mort de Rachel, montre que les patriarches n’avaient point d’état fixe dans le pays de Canaan, ni de bonheur assuré sur la terre et que leur patrie était le ciel.

II. Nous voyons ici que partout où Jacob allait, Dieu lui apparaissait et lui réitérait ses promesses et les assurances de sa protection, ce qui doit nous faire reconnaitre que Dieu est partout avec ceux qui le craignent et qu'il ne retire jamais son amour de dessus eux.

III. Nous avons un bel exemple de piété et de reconnaissance dans le soin que Jacob eut de bannir l’idolâtrie de sa famille en faisant enterrer les idoles que les gens portaient avec eux et d’accomplir le vœu qu’il avait fait de servir Dieu à Béthel où Dieu lui apparut lorsqu'il alla en Mésopotamie.

IV. Le crime infâme que Ruben commit et qui est rapporté dans ce chapitre fut un grand sujet d’affliction pour Jacob son père et qui lui en fit des reproches avant que de mourir, et qui l'en punit en lui ôtant son droit d’aînesse.

V. Enfin, Moïse nous a appris qu’Isaac parvint à un âge extrêmement avancé et qu'il eut la consolation avant sa mort de revoir Jacob son fils comblé des bénédictions du Ciel. Ce fut là une preuve bien sensible de l’amour de Dieu envers Isaac et une douce récompense que Dieu accorda en ce monde à sa piété.

CHAPITRE XXXVI.

Ce chapitre contient le dénombrement des descendants d'Esaü, frère de Jacob.

1 Ce sont ici les générations d’Ésaü, qui est Edom.

2 Ésaü prit ses femmes des filles de Canaan ; savoir, Hada, fille d’Elon, Héthien, et Aholibama, fille de Hana, et petite-fille de Tsibhon, Hévien.

3 Il prit aussi Basmath, fille d’Ismaël, sœur de Nébajoth.

4 Et Hada enfanta à Ésaü Eliphaz, et Basmath enfanta Réhuel.

5 Et Aholibama enfanta Jéhus, et Jahlam et Korah. Ce sont là les enfants d’Ésaü, qui lui naquirent au pays de Canaan.

6 Et Ésaü prit ses femmes et ses fils, et ses filles, et toutes les personnes de sa maison, et tous ses troupeaux, et ses bêtes, et tout le bien qu’il avait acquis au pays de Canaan ; et il s’en alla en un autre pays, loin de Jacob, son frère.

7 Car leurs biens étaient si grands, qu’ils n’eussent pas pu demeurer ensemble, et le pays où ils habitaient comme étrangers, ne les eût pas pu contenir, à cause de leurs troupeaux.

8 Ainsi Ésaü habita sur la montagne de Séhir. Ésaü est Édom.

9 Ce sont ici les générations d’Ésaü, père des Iduméens, sur la montagne de Séhir.

10 Ce sont ici les noms des enfants d’Ésaü : Eliphaz, fils de Hada, femme d’Ésaü ; Réhuel, fils de Basmath, femme d’Ésaü.

11 Et les enfants d’Éliphaz furent Théman, Omar, Tsépho, Gatham et Kénaz.

12 Et Timnah fut concubine d’Éliphaz, fils d’Ésaü, et enfanta Hamalek à Éliphaz. Ce sont là les enfants de Hada, femme d’Ésaü.

13 Et ce sont ici les enfants de Réhuel : Nahath, Zérah, Sçamma et Miza. Ceux-ci furent enfants de Basmath, femme d’Ésaü.

14 Et ceux-ci furent les enfants d’Aholibama, fille de Hana, petite-fille de Tsibhon, et femme d’Ésaü, qui enfanta à Ésaü Jéhus, Jahlam et Korah.

15 Ce sont ici les ducs des enfants d’Ésaü : des enfants d’Éliphaz, premier-né d’Ésaü, le duc Théman, le duc Omar, le duc Tsépho, le duc Kénaz ;

16 le duc Korah, le duc Gatham, le duc Hamalek. Ce sont là les ducs d’Éliphaz au pays d’Édom, qui furent enfants de Hada.

17 Et ce sont ici les ducs des enfants de Réhuel, fils d’Ésaü : Le duc Nahath, le duc Zérah, le duc Sçamma, et le duc Miza. Ce sont là les ducs sortis de Réhuel, au pays d’Édom, qui furent enfants de Basmath, femme d’Ésaü.

18 Et ce sont ici les ducs des enfants d’Aholibama, femme d’Ésaü : Le duc Jéhus, le duc Jahlam, le duc Korah, qui sont les ducs sortis d’Aholibama, fille de Hana, femme d’Ésaü.

19 Ce sont là les enfants d’Ésaü, qui est Édom, et ce sont là leurs ducs.

20 Ce sont ici les enfants de Séhir, Horien, qui avaient habité au pays : Lotan, Sçobal, Tsibhon et Hana,

21 Disçon, Etser et Disçan, qui sont les ducs des Horiens, enfants de Séhir au pays d’Édom.

22 Et les enfants de Lotan furent Hori et Héman ; et Timnah était sœur de Lotan.

23 Et ce sont ici les enfants de Sçobal : Halvan, Manahath, Hébal, Sépho, et Onam.

24 Et ce sont ici les enfants de Tsibhon : Aja et Hana. Ce Hana est celui qui trouva les mulets au désert, quand il paissait les ânes de Tsibhon son père.

25 Et ce sont ici les enfants de Hana : Disçon et Aholibama, fille de Hana.

26 Et ce sont ici les enfants de Disçon : Hemdan, Esçban, Jithran et Kéran.

27 Et ce sont ici les enfants d’Etser : Bilhan, Zahavan et Hakan.

28 Et ce sont ici les enfants de Disçan : Huts et Aran.

29 Ce sont ici les ducs des Horiens : Le duc Lotan, le duc Sçobal, le duc Tsibhon, le duc Hana ;

30 le duc Disçon, le duc Etser, le duc Disçan. Ce sont là les ducs des Horiens, comme ils étaient établis au pays de Séhir.

31 Et ce sont ici les rois qui ont régné au pays d’Édom, avant qu’aucun roi régnât sur les enfants d’Israël :

32 Bélah donc, fils de Béhor, régna en Édom, et le nom de sa fille était Dinhaba.

33 Et Bélah mourut ; et Jobab, fils de Zérah, de Botsra, régna en sa place.

34 Et Jobab mourut ; et Husçam, du pays des Thémanites, régna en sa place.

35 Et Husçam mourut ; et Hadad, fils de Badad, régna en sa place ; et il défit Madian au territoire de Moab ; et le nom de sa ville était Havith.

36 Et Hadad mourut ; et Samla de Masréka régna en sa place.

37 Et Samla mourut ; et Sçaül de Réhoboth du fleuve, régna en sa place.

38 Et Sçaül mourut ; et Bahal-hanan, fils de Hacbor, régna en sa place.

39 Et Bahal-hanan, fils de Hacbor, mourut ; et Hadar régna en sa place ; et le nom de sa ville était Pahu, et le nom de sa femme Méhétabéel, qui était fille de Matred, et petite-fille de Mézahab.

40 Et ce sont ici les noms des ducs d’Ésaü, selon leurs familles, selon leurs lieux, selon leurs noms : Le duc Timnah, le duc Halva, le duc Jéteth,

41 le duc Aholibama, le duc Ela, le duc Pinon,

42 le duc Kénaz, le duc Théman, le duc Mibtsar,

43 le duc Magdiel et le duc Hiram. Ce sont là les ducs d’Édom, selon leurs demeures au pays de leur possession. C’est Ésaü qui fut le père des Iduméens. 

REFLEXIONS
Il parait de ce chapitre, qu'après qu'Ésaü se fut séparé de Jacob son frère, il acquit de grands biens et qu'il eut une postérité nombreuse et puissante qui subsistât longtemps dans un état florissant quoi qu’il n’eût pas part à l’alliance divine comme Jacob. Ce fut ainsi que les promesses qui lui avaient été faites par Isaac son père s’accomplirent. Dieu qui dispense ses bénédictions selon son bon plaisir ne les répand pas sur tous les hommes dans la même mesure, mais qu’il n’y a personne qu’il en prive entièrement.

CHAPITRE XXXVII.

C’est ici que commence l'histoire de Joseph l'un des fils de Jacob.

I. Nous voyons dans ce chapitre que Joseph eut des songes qui marquaient l’élévation où il parviendrait un jour.

II. Que ses frères, poussés par la jalousie et par la haine qu’ils avaient contre lui, voulurent le faire mourir, qu'ils le vendirent pour être mené en Égypte et qu'ils firent croire à Jacob leur père que Joseph avait été déchiré par des bêtes.

1 Or, Jacob demeura au pays où son père avait habité comme étranger, c’est-à-dire au pays de Canaan.

2 Et voici ce qui arriva dans la famille de Jacob. Joseph, étant âgé de dix-sept ans, paissait les troupeaux avec ses frères, et était jeune garçon entre les enfants de Bilha et entre les enfants de Zilpa, femmes de son père. Et Joseph rapporta à leur père leurs méchants discours.

3 Or, Israël aimait Joseph plus que tous ses autres fils, parce qu’il l’avait eu en sa vieillesse ; et il lui fit une robe bigarrée.

4 Et ses frères, voyant que leur père l’aimait plus qu’eux tous, le haïssaient, et ne pouvaient lui parler sans aigreur.

5 Et Joseph eut un songe qu’il récita à ses frères, ce qui fit qu’ils le haïrent encore beaucoup plus.

6 Il leur dit donc : Écoutez, je vous prie, le songe que j’ai eu.

7 Voici, nous liions des gerbes au milieu d’un champ, et alors il me sembla que ma gerbe se leva et se tint debout, et que vos gerbes l’environnèrent et se prosternèrent devant ma gerbe.

8 Alors ses frères lui dirent : Régnerais-tu donc sur nous ? Et ils le haïrent encore plus pour ses songes et pour ses paroles.

9 Il eut encore un autre songe, et il leur dit : Voici, j’ai eu encore un songe : Il me semblait que le soleil et la lune, et onze étoiles se prosternaient devant moi.

10 Et quand il le récita à son père, et à ses frères, son père le reprit et lui dit : Que veut dire ce songe que tu as eu ? Faudra-t-il que nous venions, moi, ta mère et tes frères, nous prosterner en terre devant toi ?

11 Et ses frères eurent de l’envie contre lui ; mais son père retenait ses discours.

12 Or, ses frères s’en allèrent paître les troupeaux de leur père à Sichem.

13 Et Israël dit à Joseph : Tes frères ne paissent-ils pas les troupeaux à Sichem ? Viens, que je t’envoie vers eux. Et il lui répondit : Me voici.

14 Et il lui dit : Va maintenant, vois si tes frères et les troupeaux se portent bien, et rapporte-moi ce qui se passe. Ainsi il l’envoya de la vallée d’Hébron, et il vint jusqu’à Sichem.

15 Et un homme le trouva errant par les champs ; et cet homme l’interrogea, et lui dit : Que cherches-tu ?

16 Et il répondit : Je cherche mes frères ; je te prie, enseigne-moi où ils paissent.

17 Et l’homme dit : Ils sont partis d’ici ; et j’ai entendu qu’ils disaient : Allons à Dothaïn. Joseph donc alla après ses frères, et il les trouva à Dothaïn.

18 Et ils le virent de loin. Et avant qu’il s’approchât d’eux, ils conspirèrent contre lui pour le mettre à mort.

19 Et ils se dirent l’un à l’autre : Voici, ce maître songeur vient.

20 Maintenant donc, venez, tuons-le, et le jetons dans une de ces fosses, et nous dirons qu’une mauvaise bête l’a dévoré ; et nous verrons ce que deviendront ses songes.

21 Ruben entendit cela et le délivra de leurs mains, disant : Ne lui ôtons point la vie.

22 Ruben leur dit encore : Ne répandez point le sang : jetez-le dans cette fosse qui est au désert, et ne mettez point la main sur lui. Il disait cela, afin qu’il le délivrât de leurs mains, pour le rendre à son père.

23 Aussitôt donc que Joseph fut venu à ses frères, ils le dépouillèrent de sa robe, de cette robe bigarrée qui était sur lui.

24 Et ils le saisirent et le jetèrent dans la fosse. Or, la fosse était vide, et il n’y avait point d’eau.

25 Ensuite ils s’assirent pour manger du pain. Et levant les yeux, ils regardèrent, et voici une troupe d’Ismaélites qui passaient et qui venaient de Galaad ; et leurs chameaux portaient des drogues, et du baume, et de la myrrhe, et ils allaient porter ces choses en Egypte.

26 Et Juda dit à ses frères : De quoi nous servira-t-il de tuer notre frère, et de cacher son sang ?

27 Venez, et vendons-le à ces Ismaélites, et ne mettons point notre main sur lui ; car il est notre frère et notre chair. Et ses frères lui obéirent.

28 Et comme les marchands madianites passaient, ils tirèrent et firent remonter Joseph de la fosse, et ils le vendirent aux Ismaélites vingt pièces d’argent ; et ces gens-là emmenèrent Joseph en Egypte.

29 Et Ruben retourna à la fosse, et voici, Joseph n’y était plus. Alors il déchira ses vêtements.

30 Et il retourna vers ses frères, et il dit : L’enfant ne se trouve point, et moi, moi, où irai-je ?

31 Et ils prirent la robe de Joseph, et ayant tué un bouc d’entre les chèvres, ils trempèrent la robe dans le sang du bouc.

32 Ensuite ils envoyèrent la robe bigarrée à leur père, et lui firent dire : Nous avons trouvé ceci ; reconnais maintenant si c’est la robe de ton fils ou non.

33 Et il la reconnut, et dit : C’est la robe de mon fils ; une mauvaise bête l’a dévoré ; certainement, Joseph a été déchiré.

34 Et Jacob déchira ses vêtements, et il mit un sac sur ses reins, et il pleura son fils plusieurs jours.

35 Et tous ses fils et toutes ses filles vinrent pour le consoler ; mais il rejeta toute consolation, et il dit : Certainement, je descendrai vers mon fils dans le sépulcre en pleurant. C’est ainsi que son père le pleurait.

36 Et les Madianites le vendirent en Egypte à Potiphar, eunuque de Pharaon, prévôt de l’hôtel.

REFLEXIONS
L'histoire de Joseph est l'une des plus belles et des plus remarquables de l'Écriture sainte et où l'on découvre le plus sensiblement que la providence conduit tous les événements avec une sagesse admirable, et que toutes choses concourent ensemble au bien de ceux qui aiment Dieu.

I. Dieu voulut marquer longtemps à l'avance, par les songes de Joseph, la gloire où il serait élevé, afin que, ni lui, ni ses frères ne pussent douter que cette élévation ne vint de Dieu.

II. On voit dans la haine dont les frères de Joseph étaient animés contre lui que la vertu et l'innocence sont souvent exposées à l'envie et à la jalousie et que les passions font commettre de très grands crimes.

III. La conduite des frères de Joseph, tant envers lui qu'envers leur père, à qui ils causèrent une si grande affliction, fait voir qu'ils étaient la plupart extrêmement méchants et dénaturés, c'est ce qu'on remarque aussi en plusieurs endroits de ce livre.

IV. Il est à remarquer que Dieu sauva cependant la vie à Joseph par le moyen de Ruben et de Juda et que Dieu voulut qu'il se trouvât alors des marchands qui emmenèrent Joseph en Égypte où il devait être élevé à une grande puissance. Nous devons reconnaître dans cette histoire que les voies de la providence sont admirables et qu'elle se sert de la malice même des hommes pour l'exécution de ses desseins, ce qui doit servir de consolation à tous les gens de bien qui sont exposés à la souffrance par l'injustice des méchants.

CHAPITRE XXXVIII.

Moïse rapporte dans ce chapitre le mariage de Juda et l'inceste qu'il commit avec Tamar sa belle-fille. 

1 Il arriva qu’en ce temps-là Juda descendit d’avec ses frères, et se retira vers un homme Hadullamite, nommé Hira.

2 Et Juda y vit la fille d’un Cananéen, nommé Sçuah ; et il la prit et vint vers elle.

3 Et elle conçut et enfanta un fils, et on le nomma Her.

4 Et elle conçut encore, et enfanta un fils, et elle le nomma Onan.

5 Elle enfanta encore un fils, et elle le nomma Scéla. Et Juda était à Kézib, quand elle accoucha de celui-ci.

6 Et Juda fit épouser à Her, son premier-né, une fille nommée Tamar.

7 Mais Her, le premier-né de Juda, était méchant devant l’Éternel, et l’Éternel le fit mourir.

8 Alors Juda dit à Onan : Viens vers la femme de ton frère, et prends-la pour femme comme étant son beau-frère, et suscite des enfants à ton frère.

9 Mais Onan sachant que les enfants ne seraient pas à lui, se souillait toutes les fois qu’il venait vers la femme de son frère, afin qu’il ne donnât pas des enfants à son frère.

10 Et ce qu’il faisait déplu à l’Éternel ; c’est pourquoi il le fit mourir.

11 Et Juda dit à Tamar sa belle-fille : Demeure veuve dans la maison de ton père, jusqu’à ce que Sçéla, mon fils, soit grand. Car Juda disait : Il faut prendre garde qu’il ne meure, aussi bien que ses frères. Ainsi Tamar s’en alla, et demeura dans la maison de son père.

12 Et après plusieurs jours, la fille de Sçuah, femme de Juda, mourut. Juda depuis s’étant consolé, monta vers les tondeurs de ses brebis à Timnath, avec Hira, Hadullamite, son intime ami.

13 Et quelqu’un fit savoir à Tamar ce qui se passait, et lui dit : Voici, ton beau-père monte à Timnath, pour tondre ses brebis.

14 Alors elle quitta ses habits de veuve, et se couvrit d’un voile, et s’en enveloppa, et s’assit dans un carrefour qui était sur le chemin tirant à Timnath, parce qu’elle voyait que Scéla était devenu grand, et qu’elle ne lui avait point été donnée pour femme.

15 Et quand Juda la vit, il s’imagina que c’était une prostituée, car elle avait couvert son visage.

16 Et il se détourna vers elle au chemin où elle était, et il dit : Permets, je te prie, que je vienne vers toi ; car il ne savait pas que ce fût sa belle-fille. Elle répondit : Que me donneras-tu, afin que tu viennes vers moi ?

17 Et il dit : Je t’enverrai un chevreau du troupeau. Et elle répondit : Ce sera donc à cette condition, que tu me donnes des gages, jusqu’à ce que tu m’envoies ce chevreau.

18 Et il dit : Quel gage est-ce que je te donnerai ? Et elle répondit : Ton cachet, ton mouchoir et ton bâton, que tu as en ta main. Et il les lui donna, et il vint vers elle ; et elle conçut de lui.

19 Ensuite elle se leva et s’en alla, et ayant quitté son voile, elle reprit ses habits de veuve.

20 Et Juda envoya un chevreau du troupeau par l’Hadullamite, son intime ami, afin qu’il reprît le gage qu’il avait donné à cette femme, mais il ne la trouva point.

21 Et il interrogea les hommes du lieu où elle avait été, disant : Où est cette femme de mauvaise vie qui était dans le carrefour sur le chemin ? Et ils répondirent : Il n’y a point eu ici de femme débauchée.

22 Et il retourna à Juda, et lui dit : Je ne l’ai point trouvée, et même les gens du lieu m’ont dit : Il n’y a point eu ici de femme de mauvaise vie.

23 Et Juda dit : Qu’elle garde le gage, de peur que nous ne tombions dans le mépris. Voici, je lui ai envoyé ce chevreau ; mais tu ne l’as point trouvée.

24 Or il arriva qu’environ trois mois après, on fit un rapport à Juda, disant : Tamar, ta belle-fille, est tombée dans la paillardise, et voici, elle est même enceinte. Et Juda dit : Faites-la sortir, et qu’elle soit brûlée.

25 Et comme on la faisait sortir, elle envoya dire à son beau-père : Je suis enceinte de l’homme auquel appartiennent ces choses. Elle dit aussi : Reconnais, je te prie, à qui est ce cachet, ce mouchoir, et ce bâton.

26 Alors Juda les ayant reconnus, dit : Elle est plus juste que moi : c’est parce que je ne l’ai point donnée à Sçéla mon fils. Et il ne la connut plus.

27 Et comme elle était sur le point d’accoucher, il parut qu’il y avait deux jumeaux dans son ventre ;

28 Et dans le temps qu’elle enfantait l’un deux donna la main, et la sage-femme la prit, et y lia un fil d’écarlate, disant : Celui-ci sort le premier.

29 Mais cet enfant ayant retiré sa main, voici, son frère sortit. Et elle dit : Quelle brèche as-tu faite ? La brèche soit sur toi. Et on le nomma Pharez.

30 Ensuite son frère sortit, qui avait sur la main le fil d’écarlate, et on le nomma Zara.

REFLEXIONS
On continue à voir dans ce chapitre que Jacob avait des enfants dont la conduite était très déréglée. Les enfants qui ont des pères vertueux n'héritent pas toujours de leur piété et il peut se trouver des personnes vicieuses parmi ceux qui ont l'avantage de connaître Dieu et de vivre dans son alliance. Cette histoire montre aussi que la sensualité et l’impureté entraînent les hommes dans de grands crimes et que Dieu déteste toute sorte de souillure. On y remarque de plus que les méchants et les hypocrites condamnent les autres avec beaucoup de sévérité pendant qu'ils sont eux-mêmes autant et plus coupables. Juda voulait qu'on brûlât sa belle-fille et lui-même s’était souillé d’un crime infâme. Au reste, les deux enfants que Tamar mit au monde sont compris dans la généalogie de Jésus-Christ, comme cela se voit au premier chapitre de l’Évangile selon St. Matthieu.

CHAPITRE XXXIX.

Joseph étant au service de Potiphar, Dieu le bénit, en sorte que son maître le fit intendant de sa maison. Mais parce qu'il ne voulut pas consentir aux désirs infâmes de la femme de Potiphar, elle l'accusa et il fut mis en prison où Dieu continua de prendre soin de lui.

1 Quand on eut amené Joseph en Egypte, Potiphar, eunuque de Pharaon, prévôt de l’hôtel, Egyptien, l’acheta des Ismaélites, qui l’y avaient amené.

2 Et l’Eternel était avec Joseph ; il prospérait dans toutes ses affaires, et il demeurait dans la maison de son maître Egyptien.

3 Et son maître vit que l’Eternel était avec lui, et que l’Eternel faisait prospérer toutes choses entre ses mains.

4 Joseph donc trouva grâce devant son maître, et il le servait, et son maître l’établit sur sa maison, et lui remit en main tout ce qui lui appartenait.

5 Et il arriva, depuis qu’il lui eut remis le soin de sa maison et de tout ce qu’il avait, que l’Éternel bénit la maison de cet Egyptien à cause de Joseph. Et la bénédiction de l’Éternel fut sur toutes les choses qui étaient à lui, tant dans sa maison, qu’aux champs.

6 Et il remit tout ce qui était à lui entre les mains de Joseph, tellement qu’il ne s’informait de rien, sinon du pain qu’il mangeait. Or, Joseph était de belle taille, et beau à voir.

7 Il arriva donc après ces choses, que la femme de son maître jeta les yeux sur Joseph et lui dit : Couche avec moi.

8 Mais il le refusa, et il dit à la femme de son maître : Voici, mon maître ne prend aucune connaissance des choses qui sont dans sa maison, et il m’a remis en main tout ce qui lui appartient.

9 Il n’y en a point de plus grand dans cette maison que moi, et il ne m’a rien interdit que toi, parce que tu es sa femme. Comment ferais-je un si grand mal, et pécherais-je contre Dieu ?

10 Et bien qu’elle en parlât à Joseph tous les jours, cependant il ne voulut point l’écouter, ni coucher auprès d’elle, ni être avec elle.

11 Mais il arriva un jour qu’il était venu à la maison pour faire ce qu’il avait à faire, et qu’il n’y avait aucun des domestiques dans la maison,

12 qu’elle le prit par sa robe et lui dit : Couche avec moi ; mais il lui laissa sa robe entre les mains, et s’enfuit et sortit du logis.

13 Alors, aussitôt qu’elle eut vu qu’il lui avait laissé sa robe, et qu’il s’était enfui dehors,

14 elle appela les gens de la maison, et leur parla, disant : Voyez, on nous a amené un homme hébreu pour nous déshonorer ; il est venu à moi pour coucher avec moi ; mais j’ai crié à haute voix.

15 Et aussitôt qu’il a entendu que j’ai élevé ma voix et que j’ai crié, il m’a laissé son habit, et il s’est enfui, et est sorti du logis.

16 Et elle garda l’habit de Joseph, jusqu’à ce que son maître fût revenu à la maison.

17 Alors elle lui parla en ces termes, disant : Le serviteur hébreu, que tu nous as amené, est venu à moi, pour me déshonorer.

18 Mais comme j’ai élevé ma voix, et que j’ai crié, il m’a laissé son habit, et s’est enfui dehors.

19 Aussitôt que le maître de Joseph eut entendu les paroles de sa femme, qui lui dit : Ton serviteur m’a fait ce que je t’ai dit, il entra dans une grande colère.

20 Ainsi le maître de Joseph le prit, et le mit dans une étroite prison, dans le lieu où les prisonniers du roi étaient renfermés. Il fut donc là en prison.

21 Mais l’Éternel fut avec Joseph, et il étendit sa bonté sur lui, et il lui fit trouver grâce envers le maître de la prison.

22 Et le maître de la prison remit à Joseph le soin de tous les prisonniers qui étaient dans la prison ; et il ne se faisait rien que par son ordre.

23 Et le maître de la prison ne revoyait rien de tout ce que Joseph avait entre les mains, parce que l’Éternel était avec lui, et que l’Éternel le faisait prospérer en tout ce qu’il entreprenait.

REFLEXIONS
Nous voyons ici que Joseph ne fut pas plutôt arrivé en Égypte qu’il s’attira par sa sagesse et par sa fidélité la confiance de son maître et qu'il y éprouva cette bénédiction de Dieu qui accompagne toutes les personnes vertueuses. Mais il y fut aussi exposé à une tentation dangereuse à laquelle cependant il résista par la crainte qu’il avait de pécher contre Dieu. La piété et la chasteté que Joseph fit paraître dans cette occasion sont un exemple qui doit avoir beaucoup de force sur l'esprit des chrétiens pour les détourner du péché et surtout de l’impureté. L’on voit dans ce qui arriva à Joseph lorsqu’il fut accusé par la femme de son maître et mis en prison que les personnes impudiques se portent facilement au mensonge, à la vengeance et à toutes sortes de crimes et que l'innocence est quelquefois calomniée et opprimée.
Mais les douceurs que Joseph trouva dans sa prison nous montrent que Dieu est toujours avec les justes et que, lors même qu'ils sont persécutés le plus injustement, il ne les abandonne jamais.

CHAPITRE XL.

Joseph explique les songes de deux officiers de Pharaon, qui étaient en prison avec lui. Il prédit à l'un d'eux qu'il serait rétabli dans sa charge et à l'autre qu’on le ferait mourir et il pria le premier de le tirer de prison. Ce que Joseph avait prédit arriva, mais cet officier qui sortit de prison, oublia Joseph en sorte qu'il demeura encore deux ans emprisonné.

1 Après ces choses, il arriva que l’échanson du roi d’Égypte et le panetier offensèrent le roi d’Égypte, leur seigneur.

2 Et Pharaon se mit en colère contre ces deux eunuques, c’est-à-dire, contre son grand échanson, et contre son maître panetier.

3 Et il les fit mettre en garde dans la maison du prévôt de l’hôtel, dans la prison étroite, au lieu où Joseph était renfermé.

4 Et le prévôt de l’hôtel les mit entre les mains de Joseph, qui, les servait, et ils furent quelques jours en prison.

5 Et tous deux firent un songe, chacun en une même nuit, et chacun selon la signification de son songe, tant l’échanson que le panetier du roi d’Égypte, qui étaient renfermés dans la prison.

6 Alors Joseph, venant les voir le matin, et les regardant, remarqua qu’ils étaient fort tristes.

7 Et il interrogea ces eunuques de Pharaon, qui étaient avec lui dans la prison de son maître, et leur dit : D’où vient que vous avez aujourd’hui si mauvais visage ?

8 Et ils lui répondirent : Nous avons eu des songes, et il n’y a personne qui les explique. Et Joseph leur dit : Les interprétations ne viennent-elles pas de Dieu ? Je vous prie, récitez-les-moi.

9 Et le grand échanson récita son songe à Joseph, et lui dit : Il me semblait en songeant, que je voyais un cep devant moi,

10 Et que ce cep avait trois sarments. Or, il semblait qu'il voulait fleurir, que sa fleur sortait, et que ses grappes avaient des raisins mûrs.

11 Et la coupe de Pharaon était en ma main ; et je prenais les raisins, et je les pressais dans la coupe de Pharaon, et je lui donnais la coupe en sa main.

12 Et Joseph lui dit : Voici l’interprétation de ton songe : Les trois sarments sont trois jours.

13 Dans trois jours, Pharaon élèvera ta tête, et te rétablira en ton premier état, et tu donneras la coupe à Pharaon en sa main, selon ton premier emploi, lorsque tu étais échanson.

14 Mais souviens-toi de moi quand ce bonheur te sera arrivé, et aie, je te prie, la bonté de faire mention de moi à Pharaon, et fais-moi sortir de cette maison.

15 Car, certainement, j’ai été dérobé du pays des Hébreux, et même je n’ai rien fait ici qui dût me faire mettre en cette fosse.

16 Alors le maître panetier voyant que Joseph avait interprété ce songe-là en bien, lui dit : J’ai aussi songé, et il me semblait qu’il y avait trois corbeilles blanches sur ma tête ;

17 Et dans la plus haute corbeille il y avait de toutes sortes de viandes du métier de boulanger, pour Pharaon, et les oiseaux les mangeaient dans la corbeille qui était sur ma tête.

18 Et Joseph répondit, et dit : Voici l’interprétation de ce songe : Les trois corbeilles sont trois jours.

19 Dans trois jours, Pharaon élèvera ta tête de dessus toi, et te fera pendre à un bois, où les oiseaux mangeront ta chair de dessus toi.

20 Et au troisième jour, qui était le jour de la naissance de Pharaon, le roi fit un festin à tous ses serviteurs, et il fit sortir de prison le grand échanson et le maître panetier, qui étaient du nombre de ses serviteurs.

21 Et il rétablit le grand échanson dans son office d’échanson, et il présenta la coupe à Pharaon.

22 Mais il fit pendre le maître panetier, selon que Joseph leur avait interprété leurs songes.

23 Cependant le grand échanson ne se souvint point de Joseph, mais il l’oublia. 

REFLEXIONS
La réflexion générale que ce chapitre nous fournit est que les songes des deux officiers furent envoyés de Dieu afin que cela servît dans la suite à faire connaître Joseph à ce prince et à le tirer de sa prison, en quoi il faut admirer la providence qui préparait ainsi les choses pour la délivrance et pour l'élévation de Joseph. On voit dans la conduite de l'échanson, qui oubliât Joseph, le procédé ordinaire de ceux qui sont dans la prospérité, ils oublient les misérables, même ceux à qui ils ont le plus d'obligation. Cependant il faut considérer que Dieu ne voulait pas que Joseph sortît de prison par le moyen de cet officier, mais qu'il voulait éprouver encore sa vertu pendant deux ans afin de le délivrer ensuite par une voie plus merveilleuse et de l'élever à un degré de puissance à laquelle il ne serait pas parvenu s'il n'avait été mis plus tôt en liberté. Ceci fait bien voir que les voies de Dieu ne sont pas nos voies qu'il ne se sert pas toujours pour la délivrance de ceux qu'il aime des moyens qu'ils jugeraient eux-mêmes les plus convenables et que s'il diffère de les tirer de la souffrance, il ne le fait que pour les délivrer d'une manière plus glorieuse.

CHAPITRE XLI.

Pharaon ayant eu deux songes, Joseph les explique en lui disant qu’il y aurait sept années d'abondance et ensuite sept années de famine. Il lui conseille, après cela, de faire amasser du blé pendant les sept années d'abondance afin que l'on pût en fournir au peuple lorsque la famine viendrait. Pharaon élève Joseph au gouvernement de l'Égypte. Joseph se marie et il lui naît deux fils, savoir Manassé et Ephraïm. 

1 Mais au bout de deux ans entiers, Pharaon songea, et il lui semblait qu’il était près du fleuve.

2 Et voici, sept jeunes vaches, belles à voir, grasses et en embonpoint, montaient hors du fleuve, et paissaient dans les marais.

3 Et voici, sept autres jeunes vaches, laides à voir et maigres, montaient hors du fleuve après les autres et se tenaient auprès des autres jeunes vaches sur le bord du fleuve.

4 Et les jeunes vaches, laides à voir et maigres, mangèrent les sept jeunes vaches, belles à voir et grasses. Alors Pharaon s’éveilla.

5 Et il se rendormit, et songea pour la seconde fois. Et il lui semblait que sept épis, bien nourris et beaux, sortaient d’un même tuyau.

6 Ensuite il lui semblait que sept autres épis, minces et flétris par le vent d’orient, germaient après ceux-là.

7 Et les épis minces engloutirent les sept épis bien nourris et pleins de grains. Et Pharaon s’éveilla. Et voilà le songe.

8 Et sur le matin son esprit fut effrayé, et il envoya appeler tous les magiciens et tous les sages d’Égypte, et leur récita ses songes ; mais il n’y avait personne qui les lui interprétât.

9 Alors le grand échanson parla à Pharaon, disant : Je me souviens aujourd’hui de mes fautes ;

10 Lorsque Pharaon se mit en colère contre ses serviteurs, et nous fit mettre, le grand panetier et moi, en prison, dans la maison du prévôt de l’hôtel ;

11 Alors nous fîmes, lui et moi, un songe, en une même nuit, chacun songeant ce qui lui est arrivé, selon l’interprétation qui nous fut donnée de nos songes.

12 Or, il y avait là avec nous un jeune homme hébreu, serviteur du prévôt de l’hôtel ; et nous lui récitâmes nos songes, et il nous les interpréta, donnant à chacun l’interprétation qui convenait à son songe.

13 Et la chose est arrivée comme il nous l’avait interprétée : car le roi me rétablit en mon premier état, et fit pendre l’autre.

14 Alors Pharaon envoya appeler Joseph, et on le fit sortir en hâte de la prison, on le rasa, et on lui fit changer de vêtements ; ensuite il vint vers Pharaon.

15 Et Pharaon dit à Joseph : J’ai fait un songe, et il n’y a personne qui l’interprète. Or, j’ai appris que tu sais très-bien interpréter les songes.

16 Et Joseph répondit à Pharaon, disant : Ce sera Dieu, et non pas moi, qui répondra touchant ce qui concerne la prospérité de Pharaon.

17 Et Pharaon dit à Joseph : Comme je songeais, il me semblait que j’étais sur le bord du fleuve.

18 Et voici, sept jeunes vaches grasses, et en embonpoint, et fort belles, sortaient du fleuve, et paissaient dans des marais.

19 Et voici, sept autres jeunes vaches montaient après celles-là, chétives, si laides et si maigres, que je n’en ai jamais vu de semblables en laideur dans tout le pays d’Égypte.

20 Mais les jeunes vaches maigres et laides dévorèrent les sept premières jeunes vaches grasses,

21 qui entrèrent dans leur ventre, sans qu’on connût qu’elles y fussent entrées ; car elles étaient aussi laides à voir qu’au commencement. Alors je me réveillai.

22 Je vis aussi en songeant, et il me semblait que sept épis sortaient d’un même tuyau, pleins de grains et beaux.

23 Puis, voici sept épis petits, minces et flétris par le vent d’orient qui germèrent après.

24 Mais les épis minces engloutirent les sept beaux épis. Et j’ai dit ces songes aux magiciens ; mais aucun ne me les a expliqués.

25 Et Joseph répondit à Pharaon : Ce qu’a songé Pharaon n’est qu’une même chose ; Dieu a déclaré à Pharaon ce qu’il s’en va faire.

26 Les sept belles jeunes vaches sont sept ans ; et les sept beaux épis sont sept ans ; c’est un même songe.

27 Et les sept jeunes vaches maigres et laides, qui montaient après celles-là, sont sept ans et les sept épis vides et flétris par le vent d’orient, seront sept ans de famine.

28 C’est ce que j’ai dit à Pharaon, savoir, que Dieu a fait voir à Pharaon ce qu’il s’en va faire.

29 Voici, sept ans viennent, auxquels il y aura une grande abondance dans tout le pays d’Égypte.

30 Et ces années-là seront suivies de sept ans de famine. Alors on oubliera toute l’abondance précédente au pays d’Égypte, et la famine consumera le pays.

31 Et on ne reconnaîtra plus la première abondance du pays à cause de la famine qui viendra après ; car elle sera très grande.

32 Et quant à ce que le songe a été réitéré à Pharaon pour la seconde fois, c’est que la chose est arrêtée de Dieu, et que Dieu l’accomplira bientôt.

33 Or, maintenant que Pharaon choisisse un homme entendu et sage, et qu’il l’établisse sur le pays d’Égypte.

34 Que Pharaon aussi fasse ceci : Qu’il établisse des commissaires sur le pays, et qu’il prenne la cinquième partie du revenu du pays d’Égypte, durant les sept années d’abondance.

35 Et qu’on amasse tous les vivres de ces bonnes années qui viendront, et que le blé qu’on amassera, demeure sous la puissance de Pharaon, pour nourriture dans les villes, et qu’on le garde.

36 Et ces vivres-là seront pour la provision du pays durant les sept années de famine qui seront au pays d’Égypte, afin que le pays ne soit pas consumé par la famine.

37 Et la chose plut à Pharaon, et à tous ses serviteurs.

38 Et Pharaon dit à ses serviteurs : Pourrions-nous trouver un homme semblable à celui-ci, qui eût l’esprit de Dieu ?

39 Et Pharaon dit à Joseph : Puisque Dieu t’a fait connaître toutes ces choses, il n’y a personne qui soit si entendu, ni si sage que toi.

40 Tu seras sur ma maison, et tout mon peuple te baisera la bouche. Je serai seulement plus grand que toi, quant au trône.

41 Pharaon dit encore à Joseph : Regarde, je t’ai établi sur tout le pays d’Égypte.

42 Alors Pharaon ôta son anneau de sa main, et le mit en celle de Joseph, et il le fit revêtir d’habits de fin lin, et il lui mit un collier d’or au cou.

43 Et il le fit monter sur un char, qui était le second après le sien ; et on criait devant lui : Qu’on s’agenouille. Et il l’établit sur tout le pays d’Égypte.

44 Et Pharaon dit à Joseph : Je suis Pharaon, mais sans toi nul ne lèvera la main ni le pied dans tout le pays d’Égypte.

45 Et Pharaon appela le nom de Joseph, Tsaphenath-Pahanéah, et il lui donna pour femme Asçenath, fille de Potiphérah, gouverneur d’On. Et Joseph alla visiter le pays d’Égypte.

46 Or, Joseph était âgé de trente ans, quand il se présenta devant Pharaon, roi d’Égypte. Etant sorti de devant Pharaon, il passa par tout le pays d’Égypte.

47 Et la terre rapporta très abondamment durant les sept années de fertilité.

48 Et Joseph amassa tous les vivres de ces années, qui furent au pays d’Égypte, et il resserra les vivres dans les villes ; savoir, en chaque ville les vivres du territoire d’alentour.

49 Joseph donc amassa une grande quantité de blé, comme le sable de la mer, tellement qu’on cessa de le mesurer, parce qu’il était sans nombre.

50 Et avant que la première année de la famine vînt, il naquit deux enfants à Joseph, qu’Asçenath, fille de Potiphérah, gouverneur d’On, lui enfanta.

51 Et Joseph nomma le premier-né, Manassé ; car Dieu, dit-il, m’a fait oublier tous mes travaux, et toute la maison de mon père.

52 Et il nomma le second Ephraïm, car Dieu, dit-il, m’a fait fructifier au pays de mon affliction.

53 Alors finirent les sept années de l’abondance qui avait été au pays d’Égypte.

54 Et les sept années de la famine commencèrent, comme Joseph l’avait prédit. Et la famine fut dans tout le pays ; mais il y avait du pain dans tout le pays d’Égypte.

55 Ensuite tout le pays d’Égypte fut affamé ; et le peuple cria à Pharaon pour avoir du pain. Et Pharaon répondit à tous les Égyptiens : Allez à Joseph, et faites ce qu’il vous dira.

56 La famine donc étant dans tout le pays, Joseph ouvrit tous les greniers qui étaient chez les Égyptiens, et il leur distribua du blé. Et la famine augmenta au pays d’Égypte.

57 On venait aussi de tout pays en Égypte vers Joseph, pour acheter du blé ; car la famine était fort grande par toute la terre.

REFLEXIONS
Il y a deux réflexions principales à faire sur les songes de Pharaon :

I. On y voit la connaissance que Dieu a de l’avenir et en même temps le soin qu'il avait du peuple d’Égypte et surtout de la famille de Jacob à la subsistance de laquelle il voulait pourvoir par le moyen de Joseph.

II. Ces songes doivent être considérés comme un moyen dont Dieu se servit pour délivrer Joseph et pour le faire connaître à Pharaon par l’interprétation de ses songes et par les conseils pleins de sagesse qu’il lui donna. Nous avons vu ensuite que Joseph, après avoir été jusqu’alors dans la souffrance, fut élevé au gouvernement de l’Égypte. Ce fut ainsi qu’il parvint à la gloire qui lui avait été promise autrefois, que Dieu récompensa sa vertu et son innocence qui avaient été si longtemps opprimées et fit voir qu'il ne l’avait exercé par tant d’adversités que pour rendre sa vertu plus pure et pour le faire jouir ensuite d'une très grande prospérité. Le mariage de Joseph et la naissance de ses deux fils furent, comme il le reconnut lui-même par les noms qu’il leur donna, une nouvelle bénédiction que Dieu lui accorda, lui faisant trouver, dans un pays étranger, le repos et la douceur qu’il n’avait pas rencontrés dans la maison paternelle.

CHAPITRE XLII.

Les fils de Jacob viennent acheter du blé en Égypte et se présentent devant Joseph. Joseph les reconnaît, mais il ne se donne pas à connaître à eux. Il les fait mettre en prison et il retient Siméon afin de les obliger à lui emmener Benjamin. Cependant, il les renvoie avec du blé et il leur fait rendre leur argent. Etant de retour auprès de leur père, ils lui rendent compte du succès de leur voyage. 

1 Et Jacob, sachant qu’il y avait du blé à vendre en Égypte, dit à ses fils : Pourquoi vous regardez-vous les uns les autres ?

2 Il leur dit encore : Voici, j’ai appris qu’il y a du blé à vendre en Égypte ; descendez-y pour en acheter, afin que nous vivions et que nous ne mourions point.

3 Alors dix frères de Joseph descendirent pour acheter du blé en Égypte.

4 Mais Jacob n’envoya point Benjamin, frère de Joseph, avec ses frères ; car il disait en soi-même : Il faut prendre garde que quelque accident mortel ne lui arrive.

5 Et les fils d’Israël arrivèrent en Égypte pour acheter du blé, avec ceux qui y allaient ; car la famine était dans le pays de Canaan.

6 Or, Joseph commandait dans le pays, et c’est lui qui faisait distribuer le blé à tous les peuples du pays. Les frères de Joseph vinrent donc et se prosternèrent devant lui, la face en terre.

7 Et Joseph ayant vu ses frères, les reconnut ; mais il contrefit l’étranger avec eux, et il leur parla rudement, en leur disant : D’où venez-vous ? Et ils répondirent : Du pays de Canaan, pour acheter des vivres.

8 Joseph donc reconnut ses frères ; mais eux ne le reconnurent point.

9 Alors Joseph se souvint des songes qu’il avait faits, et leur dit : Vous êtes des espions ; vous êtes venus pour épier les lieux faibles du pays.

10 Et ils lui répondirent : Non, mon seigneur ; mais tes serviteurs sont venus pour acheter des vivres.

11 Nous sommes tous enfants d’un seul homme ; nous sommes gens de bien ; tes serviteurs ne sont point des espions.

12 Et il leur dit : Cela n’est pas ; mais vous êtes venus pour remarquer les lieux faibles du pays.

13 Et ils répondirent : Nous sommes douze frères, tes serviteurs, enfants d’un même homme, au pays de Canaan, dont le plus jeune est aujourd’hui avec notre père, et l’autre n’est plus.

14 Et Joseph leur dit : C’est là ce que je vous ai dit : Vous êtes des espions.

15 Vous serez éprouvés par ce moyen : Vive Pharaon, si vous sortez d’ici, que votre jeune frère ne soit venu ici.

16 Envoyez-en un d’entre vous qui amène votre frère ; mais vous serez prisonniers ; et j’éprouverai par ce moyen si vous avez dit la vérité : autrement, vive Pharaon, que vous êtes des espions.

17 Et ainsi il les fit mettre tous ensemble en prison pour trois jours.

18 Et au troisième jour, Joseph leur dit : Faites ceci, et vous vivrez ; je crains Dieu :

19 Si vous êtes gens de bien, que l’un de vous, qui êtes frères, demeure lié dans la prison, et allez-vous-en, emportez du blé, pour pourvoir à la famine de vos familles.

20 Et amenez-moi votre jeune frère, et vous ferez voir que vos paroles ont été véritables ; et vous ne mourrez point. Et ils firent ainsi.

21 Et ils se disaient l’un à l’autre : Vraiment, nous sommes coupables à l’égard de notre frère ; car nous avons vu l’angoisse où il était quand il nous demandait grâce, et nous ne l’avons point exaucé ; c’est pour cela que nous nous trouvons dans cette détresse.

22 Et Ruben leur répondit, disant : Ne vous disais-je pas bien : Ne commettez point ce péché contre cet enfant ? Et vous ne m’écoutâtes point : c’est pourquoi, voici, son sang vous est redemandé.

23 Et ils ne savaient pas que Joseph les entendait, parce qu’il leur parlait par un truchement.

24 Et il se détourna d’auprès d’eux pour pleurer ; ensuite, étant retourné vers eux, il leur parla de nouveau, et il prit Siméon d’entre eux, et le fit lier devant leurs yeux.

25 Et Joseph commanda qu’on remplît leurs sacs de blé, et qu’on remît l’argent dans le sac de chacun d’eux, et qu’on leur donnât de la provision pour leur chemin. Et c’est ce qui fut fait.

26 Ils chargèrent donc leur blé sur leurs ânes, et s’en allèrent.

27 Et l’un d’eux ouvrit son sac pour donner à manger à son âne dans l’hôtellerie ; alors il vit son argent, qui était à l’entrée de son sac.

28 Et il dit à ses frères : Mon argent m’a été rendu ; et en effet, le voici dans mon sac. Et ils furent comme hors d’eux-mêmes, et la frayeur les saisit, se disant l’un à l’autre : Qu’est-ce que Dieu nous a fait ?

29 Et ils vinrent au pays de Canaan vers Jacob leur père, et ils lui racontèrent toutes les choses qui leur étaient arrivées, disant :

30 L’homme qui commande dans tout le pays, nous a parlé fort rudement, et nous a pris pour des espions.

31 Mais nous lui avons répondu : Nous sommes des gens de bien, nous ne sommes point des espions.

32 Nous étions douze frères, enfants de notre père ; l’un n’est plus, et le plus jeune est aujourd’hui avec notre père, au pays de Canaan.

33 Et cet homme, qui est le seigneur du pays, nous a dit : Je connaîtrai à ceci que vous êtes des gens de bien : Laissez-moi l’un de vos frères, et prenez du blé afin de pourvoir à la faim de vos familles, et vous en allez,

34 et amenez-moi votre jeune frère. Alors je connaîtrai que vous n’êtes point des espions, mais des gens de bien ; et je vous rendrai votre frère, et vous trafiquerez au pays.

35 Et comme ils vidaient leurs sacs, voici, chacun trouva le paquet de son argent dans son sac ; et ils virent les paquets de leur argent, eux et leur père, et ils eurent peur.

36 Alors Jacob, leur père, leur dit : Vous m’avez privé d’enfants ; Joseph n’est plus, et Siméon n’est plus, et vous voulez emmener Benjamin ! Toutes ces choses sont faites contre moi.

37 Et Ruben parla à son père, et lui dit : Fais mourir mes deux enfants, si je ne te le ramène ; confie-le-moi, et je te le ramènerai.

38 Et il répondit : Mon fils ne descendra point avec vous ; car son frère est mort, et celui-ci est resté seul. Si quelque accident mortel lui arrivait dans le chemin, vous feriez descendre mes cheveux blancs avec douleur dans le sépulcre. 

REFLEXIONS
Cette lecture nous présente trois réflexions :

I. Nous voyons dans l’arrivée des frères de Joseph en Égypte et dans les hommages qu’ils lui rendirent l’accomplissement des songes qu’il avait eu. On y voit aussi que Dieu l'avait envoyé en Égypte pour faire subsister la famille de Jacob et attirer cette famille en ce pays-là.

II. La conduite de Joseph envers ses frères marque, d'un côté, de l'affection pour eux, puisqu'il leur fit donner autant de blé qu’ils voulurent et qu’il leur fit rendre leur argent, mais on y voit en même temps une grande prudence en ce qu'il ne se fit pas connaître et qu’il retint Siméon. Il en usa ainsi, non par ressentiment contre ses frères, mais pour les obliger à revenir et à amener Benjamin, pour attirer par ce moyen son père en Égypte et parce qu’il se défiait d'eux avec raison, craignant que s'il leur eût dit qu'il était Joseph, ils n'eussent caché cela à leur père.

III. Il faut faire bien de l’attention à ce que les frères de Joseph dirent lorsqu’ils furent mis en prison. Jusqu'alors ils n'avaient pas senti si vivement la grandeur du crime qu’ils avaient commis contre lui, il y avait plus de vingt ans, mais la détresse où ils se virent alors les fit souvenir de celle où ils avaient vu Joseph et de l'inhumanité avec laquelle ils l'avaient traité. La conscience du pécheur peut être insensible pendant quelque temps, mais tôt ou tard elle se réveille et lui cause d’étrange remords et c’est surtout ce qui arrive aux méchants dans l'adversité.

CHAPITRE XLIII.

Jacob étant contraint par la famine de renvoyer ses fils en Égypte consent que Benjamin y aille avec eux. Étant arrivés en Égypte, ils se présentent devant Joseph qui les reçut favorablement et les fit manger avec lui.

1 Or, la famine était fort grande sur la terre.

2 Et comme les enfants de Jacob eurent achevé de manger les vivres qu’ils avaient amenés d’Égypte, leur père leur dit : Retournez, pour nous acheter un peu de vivres.

3 Et Juda lui répondit, et lui dit : Cet homme-là nous a fort protesté, disant : Vous ne verrez point mon visage, que votre frère ne soit avec vous.

4 Si donc tu envoies notre frère avec nous, nous descendrons en Égypte, et nous t’achèterons des vivres.

5 Mais si tu ne l’envoies pas, nous n’y descendrons point ; car cet homme-là nous a dit : Vous ne verrez point mon visage, que votre frère ne soit avec vous.

6 Et Israël dit : Pourquoi m’avez-vous fait ce tort, de déclarer à cet homme que vous aviez encore un frère ?

7 Et ils répondirent : Cet homme-là s’est enquis avec soin de nous et de notre parentage, et nous a dit : Votre père vit-il encore ? N’avez-vous point de frère ? Et nous le lui avons déclaré, selon qu’il nous avait demandé. Pouvions-nous savoir qu’il dirait : Faites descendre votre frère ?

8 Et Juda dit à Israël son père : Envoie l’enfant avec moi, et nous nous mettrons en chemin, et nous nous en irons, et nous vivrons et ne mourrons point, ni nous, ni toi aussi, ni nos petits-enfants.

9 J’en réponds ; redemande-le-moi. Si je ne te le ramène, et si je ne te le représente, je serai toujours sujet à la peine que tu voudras m’imposer.

10 Que si nous n’eussions pas tant différé, certainement nous serions déjà de retour une seconde fois.

11 Alors Israël, leur père, leur dit : Si la chose va ainsi, faites-le. Prenez des choses les plus estimées du pays dans vos vaisseaux, et portez à cet homme un présent, quelque peu de baume, et quelque peu de miel, des drogues ; de la myrrhe, des dattes et des amandes ;

12 et prenez de l’argent au double en vos mains, et reportez celui qui a été remis à l’entrée de vos sacs. Peut-être cela s’est-il fait par erreur.

13 Prenez aussi votre frère, et vous mettez en chemin, et retournez vers cet homme.

14 Le Dieu fort, tout-puissant, vous fasse trouver grâce devant cet homme-là, afin qu’il vous relâche votre autre frère et Benjamin ! Et s’il faut que je sois privé d’enfants, que j’en sois privé.

15 Alors ils prirent le présent, et ayant pris de l’argent au double en leurs mains, et Benjamin, ils se mirent en chemin, et ils descendirent en Égypte. Puis ils se présentèrent devant Joseph.

16 Alors Joseph vit Benjamin avec eux, et dit à son maître d’hôtel : Mène ces hommes dans la maison, et tue quelque bête, et l’apprête ; car ils mangeront à midi avec moi.

17 Et l’homme fit comme Joseph lui avait dit, et amena ces hommes dans la maison de Joseph.

18 Et ces hommes-là eurent peur de ce qu’on les conduisait dans la maison de Joseph ; et ils dirent : Nous sommes amenés à cause de l’argent qui fut remis en nos sacs, dans notre premier voyage. Cet homme veut se décharger et se jeter sur nous, nous prendre pour esclaves, et se saisir de nos ânes.

19 Ensuite ils s’approchèrent du maître d’hôtel de Joseph, et lui parlèrent à la porte de la maison,

20 disant : Hélas ! mon seigneur, nous descendîmes la première fois pour acheter des vivres ;

21 et lorsque nous arrivâmes à l’hôtellerie, et que nous eûmes ouvert nos sacs, voici, l’argent de chacun de nous était à l’entrée de son sac, notre même argent, selon son poids ; et nous l’avons rapporté en nos mains.

22 Et nous avons apporté d’autre argent en nos mains, pour acheter des vivres ; mais nous ne savons qui a pu remettre notre argent dans nos sacs.

23 Et il dit : Tout va bien pour vous ; ne craignez point : votre Dieu et le Dieu de votre père vous a donné un trésor dans vos sacs ; votre argent m’a bien été remis. Et il leur amena Siméon.

24 Et cet homme les fit entrer dans la maison de Joseph et il leur donna de l’eau, et ils lavèrent leurs pieds ; il donna aussi à manger à leurs ânes.

25 Et ils préparèrent leurs présents, en attendant que Joseph revînt sur le midi ; car ils avaient appris qu’ils mangeraient là.

26 Alors Joseph revint à la maison, et ils lui présentèrent dans la maison le présent qu’ils avaient en leurs mains ; et ils se prosternèrent devant lui jusqu’en terre.

27 Et il s’enquit d’eux comment ils se portaient, et il leur dit : Votre père, ce bon vieillard dont vous m’avez parlé, se porte-t-il bien ? Vit-il encore ?

28 Et ils répondirent : Ton serviteur notre père se porte bien ; il vit encore. Et se baissant profondément, ils se prosternèrent.

29 Et Joseph, élevant ses yeux, vit Benjamin, son frère, fils de sa mère, et dit : Est-ce là votre jeune frère, dont vous m’avez parlé ? et il lui dit : Mon fils, Dieu te fasse miséricorde.

30 Et Joseph se retira incontinent ; car ses entrailles étaient émues à la vue de son frère, et il cherchait un lieu pour pleurer ; et entrant dans son cabinet, il pleura.

31 Et s’étant lavé le visage, il sortit de son cabinet, et se faisant violence, il dit : Mettez le pain.

32 Et on servit Joseph à part, et eux à part, et les Égyptiens qui mangeaient avec lui, furent aussi servis à part, parce que les Égyptiens ne pouvaient manger avec les Hébreux ; car c’est une abomination aux Égyptiens.

33 Ils s’assirent donc en sa présence, l’aîné selon son droit d’aînesse, et le plus jeune selon son âge. Et ces hommes étaient extrêmement surpris.

34 Et il leur fit porter des mets, qu’il fit ôter de devant lui ; mais la portion de Benjamin était cinq fois plus grosse que toutes les autres ; et ils burent, et firent bonne chère avec lui.

REFLEXIONS
Ce qui arriva à Jacob lorsqu'il fut contraint de renvoyer ses fils en Égypte fut une nouvelle épreuve que Dieu lui envoya. Il fit paraître dans cette occasion sa tendresse pour ses enfants et en même temps sa constance et sa foi. Il y donna surtout un bel exemple de piété et de résignation en recommandant ses fils à la protection de Dieu et en se soumettant à être privé de ses enfants si Dieu le voulait. C'est ainsi que nous devons obéir aux ordres de la providence et nous résigner à tous les événements. Ce que Joseph dit à ses frères lorsqu'ils furent arrivés en Égypte et la manière dont il les traita fait voir qu'il avait une extrême tendresse pour son père et pour Benjamin et qu'il aimait toujours ses frères nonobstant tout ce qu'ils avaient fait contre lui. Ce caractère de bonté et de douceur est la vraie marque des gens de biens, non seulement ils aiment leurs proches avec la plus grande tendresse, mais ils ne conservent aucun ressentiment des injures qu'ils ont reçues et ils sont toujours prêts à faire du bien à ceux qui les ont le plus offensés.

CHAPITRE XLIV.

Il y a deux choses à remarquer dans ce chapitre.  I. L’ordre que Joseph donna à son maître d'hôtel, au départ de ses frères. De mettre son gobelet dans le sac de Benjamin afin d'avoir un prétexte de les faire arrêter. II. Le discours que Juda tint à Joseph pour le fléchir et pour l'engager à le retenir en Égypte en la place de Benjamin.

1 Et Joseph commanda à son maître d’hôtel, disant : Emplis de vivres les sacs de ces gens, autant qu’ils en pourront porter, et remets l’argent de chacun à l’entrée de son sac ;

2 Et mets mon gobelet, le gobelet d’argent, à l’entrée du sac du plus jeune, avec l’argent de son blé. Et il fit comme Joseph lui avait dit.

3 Le matin, dès qu’il fut jour, on renvoya ces hommes avec leurs ânes.

4 Lorsqu’ils furent sortis de la ville, avant qu’ils fussent beaucoup éloignés, Joseph dit à son maître d’hôtel : Va, poursuis ces hommes, et quand tu les auras atteints, dis-leur : Pourquoi avez-vous rendu mal pour bien ?

5 N’est-ce pas le gobelet dans lequel mon seigneur boit, et par lequel il devine infailliblement ? Vous avez fait une très méchante action.

6 Et le maître d’hôtel les atteignit, et leur dit les mêmes paroles.

7 Et ils lui répondirent : Pourquoi mon seigneur parle-t-il ainsi ? Dieu garde tes serviteurs de commettre une telle chose !

8 Voici, nous t’avons rapporté du pays de Canaan l’argent que nous avions trouvé à l’entrée de nos sacs ; et comment déroberions-nous de l’argent ou de l’or de la maison de ton maître ?

9 Que celui de tes serviteurs, à qui l’on trouvera ce que tu cherches, meure, et nous serons même esclaves de mon seigneur.

10 Et il leur dit : Qu’il soit maintenant ainsi fait selon vos paroles : Que celui à qui l’on trouvera le gobelet, soit mon esclave, et vous serez traités comme innocents.

11 Et incontinent chacun posa son sac.

12 Et il les fouilla, en commençant depuis le plus grand, et finissant au plus jeune. Et le gobelet fut trouvé dans le sac de Benjamin.

13 Alors ils déchirèrent leurs habits, et chacun rechargea son âne, et ils retournèrent à la ville.

14 Et Juda, avec ses frères, vint en la maison de Joseph, qui était encore là, et ils se jetèrent en terre devant lui.

15 Et Joseph dit : Quelle action avez-vous faite ? Ne savez-vous pas qu’un homme tel que je suis, devine infailliblement ?

16 Et Juda lui dit : Que dirons-nous à mon seigneur ? Comment parlerons-nous ? Et comment nous justifierons-nous ? Dieu a trouvé l’iniquité de tes serviteurs. Voici, nous sommes tous les esclaves de mon seigneur, tant nous que celui à qui on a trouvé le gobelet.

17 Mais il dit : Dieu me garde de faire cela. L’homme à qui l’on a trouvé le gobelet, me sera esclave ; mais vous, remontez en paix vers votre père.

18 Alors Juda s’approcha de lui, disant : Hélas, mon seigneur ! je te prie, que ton serviteur dise un mot, et que mon seigneur l’écoute, et que ta colère ne s’enflamme point contre ton serviteur ; car tu es comme Pharaon.

19 Mon seigneur interrogea ses serviteurs, disant : Avez-vous père, ou frère ?

20 Alors nous répondîmes à mon seigneur : Nous avons notre père qui est âgé, et un jeune fils qui lui est né en sa vieillesse, et qui est le plus jeune, dont le frère est mort ; et celui-ci est resté seul de sa mère, et son père l’aime.

21 Or, tu as dit à tes serviteurs : Faites-le descendre vers moi ; je serai bien aise de le voir.

22 Et nous dîmes à mon seigneur : Cet enfant ne pourrait laisser son père, car s’il le laisse, son père mourra.

23 Alors tu dis à tes serviteurs : Si votre petit frère ne descend avec vous, vous ne verrez plus mon visage.

24 Or il est arrivé qu’étant de retour vers ton serviteur mon père, nous lui rapportâmes les paroles de mon seigneur.

25 Ensuite notre père nous dit : Retournez, et nous achetez un peu de vivres.

26 Et nous lui dîmes : Nous ne pouvons y descendre, mais si notre jeune frère est avec nous, nous y descendrons ; car nous ne pouvons pas voir cet homme, que notre jeune frère ne soit avec nous.

27 Et ton serviteur mon père nous répondit : Vous savez que ma femme m’a enfanté deux enfants ;

28 l’un s’en est allé, et j’ai dit : Certainement, il a été déchiré, et je ne l’ai point vu jusqu’à présent.

29 Que si vous m’ôtez aussi celui-ci, et que quelque accident mortel lui arrive, vous ferez descendre mes cheveux blancs avec douleur dans le sépulcre.

30 Maintenant donc, quand je serai venu vers ton serviteur mon père, si le jeune homme dont l’âme est liée étroitement avec la sienne, n’est point avec nous ;

31 il arrivera, qu’aussitôt qu’il aura vu que le jeune homme n’y sera pas, il mourra. Ainsi tes serviteurs feront descendre avec douleur les cheveux blancs de ton serviteur notre père dans le sépulcre.

32 De plus, ton serviteur a répondu de ramener le jeune homme, pour obliger mon père à le laisser aller ; et il a dit : Si je ne te le ramène, je serai toujours sujet à la peine que mon père voudra m’imposer.

33 Ainsi maintenant, je te prie, que ton serviteur soit l’esclave de mon seigneur, au lieu du jeune homme, et qu’il remonte avec ses frères.

34 Car comment remonterai-je vers mon père, si le jeune homme n’est avec moi ! Ha ! que je ne voie point l’affliction de mon père.

REFLEXIONS
Il faut considérer ce que Joseph fit à l’égard de ses frères, en donnant ordre que Benjamin fut arrêté, comme un nouveau moyen qu’il mit prudemment en usage avant que de se faire connaître à eux, afin de les éprouver encore une fois de reconnaître leurs véritables sentiments et de leur faire encore mieux sentir le péché qu’ils avaient commis contre lui. Après cela le discours tendre et touchant de Juda à Joseph est très remarquable. On y voit l’extrême détresse où il était avec ses frères et un aveu sincère que Dieu les punissait justement. C’est là l’effet des afflictions, elles sont très propres à réveiller la conscience et à humilier les hommes et Dieu s'en sert avec beaucoup de sagesse pour les amener à la connaissance et au sentiment de leurs péchés.

CHAPITRE XLV.

Joseph se fait connaître à ses frères et il leur ordonne d'aller quérir leur père et de l'amener en Égypte. Jacob ayant appris que Joseph vivait encore se dispose à partir pour y aller. 

1 Alors Joseph ne put plus se retenir devant tous ceux qui étaient là présents, et il cria : Faites sortir tout le monde. Et nul ne demeura avec lui quand il se fit connaître à ses frères.

2 Et en pleurant il éleva sa voix, et les Egyptiens l’entendirent, et la maison de Pharaon l’ouït aussi.

3 Et Joseph dit à ses frères : Je suis Joseph ; mon père vit-il encore ? Mais ses frères ne lui pouvaient répondre ; car ils étaient troublés de sa présence.

4 Joseph dit encore à ses frères : Je vous prie, approchez-vous de moi. Et ils s’approchèrent, et il leur dit : Je suis Joseph votre frère, que vous avez vendu pour être mené en Egypte.

5 Et, maintenant, ne vous affligez point, et n’ayez point de regret de ce que vous m’avez vendu pour être amené ici, puisque Dieu m’a envoyé devant vous pour la conservation de votre vie.

6 Car, voici, il y a déjà deux ans que la famine est sur la terre, et il y en aura encore cinq, pendant lesquels on ne pourra ni labourer, ni moissonner.

7 Mais Dieu m’a envoyé devant vous, pour vous faire subsister sur la terre, et vous faire vivre par une grande délivrance.

8 Maintenant donc, ce n’est pas vous qui m’avez envoyé ici, mais c’est Dieu, qui m’a établi pour père à Pharaon, et pour seigneur sur toute sa maison, et pour commander dans tout le pays d’Égypte.

9 Hâtez-vous d’aller vers mon père, et dites-lui : Ainsi a dit ton fils Joseph : Dieu m’a établi seigneur sur toute l’Égypte ; descends donc vers moi, et ne t’arrête point.

10 Et tu habiteras dans la terre de Gosçen, et tu seras près de moi, toi, tes enfants, et les enfants de tes enfants, tes troupeaux, et tes bœufs, et tout ce qui est à toi.

11 Et je t’entretiendrai là, car il y a encore cinq années de famine, de peur que tu ne périsses par la pauvreté, toi et ta maison, et tout ce qui est à toi.

12 Et voici, vous voyez de vos yeux, et Benjamin mon frère voit aussi de ses yeux, que c’est moi qui vous parle de ma propre bouche.

13 Rapportez donc à mon père quelle est ma gloire en Égypte, et tout ce que vous avez vu ; et hâtez-vous de faire descendre ici mon père.

14 Alors il se jeta sur le cou de Benjamin son frère, et pleura. Benjamin pleura aussi sur son cou.

15 Et il baisa tous ses frères, et pleura sur eux. Après cela, ses frères parlèrent avec lui.

16 Aussitôt on entendit un grand bruit dans la maison de Pharaon, et on dit : Les frères de Joseph sont venus. Ce qui plut fort à Pharaon et à ses serviteurs.

17 Alors Pharaon dit à Joseph : Dis à tes frères : Faites ceci ; chargez vos bêtes, et allez, retournez au pays de Canaan ;

18 Et prenez votre père et vos familles, et revenez vers moi, et je vous donnerai du meilleur du pays d’Égypte ; et vous mangerez la graisse de la terre.

19 Or, tu as la puissance de commander : Faites ceci, prenez avec vous du pays d’Égypte des chariots pour vos petits-enfants, et pour vos femmes, et amenez votre père, et venez.

20 Ne regrettez point vos meubles ; car le meilleur de tout le pays d’Égypte sera à vous.

21 Et les enfants d’Israël firent ce qui leur avait été dit ; et Joseph leur donna des chariots, selon l’ordre qu’il avait reçu de Pharaon ; il leur donna aussi de la provision pour le chemin.

22 Et il leur donna à tous des robes de rechange, et à Benjamin il donna trois cents pièces d’argent, et cinq robes de rechange.

23 Il envoya aussi à son père dix ânes chargés des plus excellentes choses qu’il y avait en Égypte, et dix ânesses qui portaient du blé, du pain, et de la nourriture à son père pour le chemin.

24 Il renvoya donc ses frères, qui partirent, et il leur dit : Ne vous querellez point en chemin.

25 Ainsi ils remontèrent d’Égypte, et vinrent à Jacob leur père au pays de Canaan.

26 Et ils lui firent ce rapport et lui dirent : Joseph vit encore, et même il commande sur tout le pays d’Égypte. Et il tomba presque en défaillance, bien qu’il ne les croyait point.

27 Et ils lui dirent toutes les paroles que Joseph leur avait dites. Et il vit les chariots que Joseph avait envoyés pour le porter. Et l’esprit revint à Jacob leur père.

28 Alors Israël dit : C’est assez ; Joseph mon fils vit encore ; j’irai, et je le verrai avant que je meure.

REFLEXIONS
I. L'on voit dans ce qui se passa lorsque Joseph se fit connaître à ses frères l'exemple d'une extrême bonté et d'une grande douceur. La conduite et les discours de Joseph marquent qu'il avait tellement oublié ce que ses frères avaient fait contre lui, que non seulement il leur pardonna et ne leur en fit aucun reproche, mais qu'il les consola et qu'il ne voulut pas qu'ils s'affligeassent.

II. On découvre ici la piété de Joseph en ce qu'il reconnaît que tout le mal que ses frères lui avaient fait avait été permis et dirigé par la providence pour le bien de leurs familles. L'on y remarque encore le soin que Joseph eut de son père en pourvoyant à son voyage et à son entretien dans l'Égypte. Ce sont là de beaux exemples de douceur, de pardon et de piété que chacun doit imiter.

III. On voit enfin ici que Jacob après avoir pleuré Joseph comme mort eut la consolation d'apprendre qu'il vivait et qu'il gouvernait l'Égypte. C'est ainsi que Dieu fait succéder la joie à l'affliction et qu'il console les siens après les avoir fait passer par diverses épreuves.

CHAPITRE XLVI.

Moïse rapporte dans ce chapitre le voyage de Jacob, qui s'en alla du pays de Canaan en Égypte, avec toute sa famille.

1 Israël donc partit, avec tout ce qui lui appartenait, et vint à Béer-sçébah, et offrit des sacrifices au Dieu de son père Isaac.

2 Et Dieu parla à Israël en vision de nuit, disant : Jacob, Jacob. Et il répondit : Me voici.

3 Il dit encore : Je suis le Dieu fort, le Dieu de ton père. Ne crains point de descendre en Égypte ; car je t’y ferai devenir une grande nation.

4 Je descendrai avec toi en Égypte, et je t’en ferai aussi infailliblement remonter ; et Joseph mettra sa main sur tes yeux.

5 Ainsi Jacob partit de Béer-sçébah, et les enfants d’Israël mirent Jacob leur père et leurs petits-enfants, et leurs femmes, sur les chariots que Pharaon avait envoyés pour le porter.

6 Ils emmenèrent aussi leur bétail et le bien qu’ils avaient acquis au pays de Canaan. Et Jacob et toute sa famille avec lui vinrent en Égypte,

7 Et il amena avec soi en Égypte ses enfants, et les enfants de ses enfants, ses filles, et les filles de ses filles, et toute sa famille.

8 Ce sont ici les noms des enfants d’Israël qui vinrent en Égypte : Jacob et ses enfants. Le premier-né de Jacob fut Ruben.

9 Et les enfants de Ruben étaient Hénoc, Pallu, Hetsron et Carmi.

10 Et les enfants de Siméon étaient Jémuël, Jamin, Ohad, Jakin, Tsohar et Sçaûl, fils d’une Cananéenne.

11 Et les enfants de Lévi étaient Guersçon, Kéhath et Mérari.

12 Et les enfants de Juda étaient Her, Onan, Sçéla, Pharez et Zara. Mais Her et Onan moururent au pays de Canaan. Les enfants aussi de Pharez furent Hetsron et Hamul.

13 Et les enfants d’Issacar étaient Tolah, Puva, Job et Simron.

14 Et les enfants de Zabulon étaient Séred, Elon et Jahléel.

15 Ce sont là les enfants de Léa, qu’elle enfanta à Jacob en Paddan-Aram, avec Dina sa fille ; ses fils et ses filles étaient en tout trente-trois personnes.

16 Et les enfants de Gad étaient Tsiphjon, Haggi, Sçuni, Etsbon, Héri, Arodi et Aréli.

17 Et les enfants d’Ascer étaient Jimna, Jisçua, Jisçui, Bériha, et Sérah leur sœur. Les enfants de Bériha, Héber et Malkiel.

18 Ce sont là les enfants de Zilpa, que Laban avait donnée à Léa sa fille ; et elle les enfanta à Jacob, et ils faisaient seize personnes.

19 Les enfants de Rachel, femme de Jacob, furent Joseph et Benjamin.

20 Et Joseph eut des fils au pays d’Égypte, savoir, Manassé et Ephraïm, qu’Asçenath, fille de Potiphérah, gouverneur d’On, lui enfanta.

21 Et les enfants de Benjamin étaient Bélah, Béker, Asçbel, Guéra, Nahaman, Ehi, Ros, Muppim et Huppim et Ard.

22 Ce sont là les enfants de Rachel, qu’elle enfanta à Jacob, qui sont en tout quatorze personnes.

23 Et les enfants de Dan étaient Husçim.

24 Et les enfants de Nephthali étaient Jatséel, Guni, Jetser et Sçillem.

25 Ce sont là les enfants de Bilha, que Laban donna à Rachel sa fille, et elle les enfanta à Jacob ; ils faisaient sept personnes en tout.

26 Toutes les personnes qui vinrent en Égypte, qui appartenaient à Jacob et qui étaient nées de lui (sans les femmes des enfants de Jacob), étaient en tout soixante-six.

27 Et les enfants de Joseph qui lui étaient nés en Égypte, furent deux personnes. Toutes les personnes donc de la maison de Jacob, qui vinrent en Égypte, furent soixante et dix.

28 Or, Jacob envoya Juda devant lui vers Joseph, pour l’avertir de lui venir au-devant en Gosçen. Ils vinrent donc dans la contrée de Gosçen.

29 Et Joseph fit atteler son chariot, et monta pour aller au-devant d’Israël son père en Gosçen, et se fit voir à lui, et il se jeta sur son cou, et pleura quelque temps sur son cou.

30 Et Israël dit à Joseph : Que je meure à présent, puisque j’ai vu ton visage, et que tu vis encore.

31 Puis Joseph dit à ses frères et à la famille de son père : Je remonterai, et je ferai savoir à Pharaon votre arrivée, et je lui dirai : Mes frères et la famille de mon père, qui étaient au pays de Canaan, sont venus vers moi.

32 Et ces hommes sont bergers, car ils se sont toujours mêlés de bétail ; ainsi ils ont amené leurs brebis et leurs bœufs, et tout ce qui était à eux.

33 Or, il arrivera que Pharaon vous fera appeler, et vous dira : Quel est votre métier ?

34 Alors vous direz : Tes serviteurs se sont toujours mêlés de garder le bétail, dès leur jeunesse jusqu’à maintenant, tant nous que nos pères, afin que vous demeuriez dans la terre de Goscen : car les Égyptiens ont en abomination les bergers.

REFLEXIONS
Il faut remarquer que Jacob étant sur le point de partir pour l’Égypte, Dieu lui apparut, qu’il lui ordonna d’y aller et qu’il lui promit de le bénir en ce pays-là et d’en faire revenir sa postérité. Cet ordre était nécessaire parce que le départ de Jacob pour aller en Égypte avec sa famille paraissait contraire aux promesses que Dieu lui avait faites de lui donner le pays de Canaan.

Mais la volonté de Dieu était que les enfants d’Israël fussent pendant quelque temps en Égypte et c’est ce qu’il avait déjà fait connaître à Abraham. Jacob obéit aux ordres du Ciel, marquant par là sa foi aussi bien que sa soumission à la providence. Le dénombrement de la famille de Jacob, qui ne consistait alors qu'en septante personnes, sert à faire voir que ses descendants multiplièrent extrêmement en Égypte. Dans l'entrevue de Jacob et de Joseph, l'on doit remarquer le respect de Joseph envers son père, leur tendresse réciproque et la consolation et la joie dont les afflictions où ils avaient été exposés furent suivies.

CHAPITRE XLVII.

I. Joseph présente ses frères et ensuite son père à Pharaon qui leur permet d'habiter dans le pays de Goscen.

II. La famine continuant, le peuple d'Égypte vend son bétail et ses terres à Pharaon

III. Jacob sentant que sa fin approchait fait promettre à Joseph de l'ensevelir au pays de Canaan.

 1 Et Joseph vint et fit entendre cela à Pharaon, disant : Mon père et mes frères, avec leurs troupeaux et leurs bœufs, et tout ce qui est à eux, sont venus du pays de Canaan ; et voici, ils sont dans la contrée de Goscen.

2 Et il prit une partie de ses frères, (il en prit cinq) et il les présenta à Pharaon.

3 Et Pharaon dit aux frères de Joseph : Quelle est votre occupation ? Ils répondirent à Pharaon : Tes serviteurs sont bergers, comme l’ont été nos pères.

4 Ils dirent aussi à Pharaon : Nous sommes venus habiter comme étrangers dans ce pays ; car il n’y a point de pâture pour les troupeaux qui appartiennent à tes serviteurs ; et même il y a une grande famine au pays de Canaan. Maintenant donc, nous te prions que tes serviteurs demeurent dans la contrée de Goscen.

5 Et Pharaon parla à Joseph, disant : Ton père et tes frères sont venus vers toi.

6 Le pays d’Égypte est à ta disposition ; fais habiter ton père et tes frères dans le meilleur endroit du pays ; qu’ils demeurent dans la terre de Goscen. Et si tu connais qu’il y ait parmi eux des gens forts et robustes, tu les établiras sur tous mes troupeaux.

7 Alors Joseph amena Jacob son père, et le présenta à Pharaon. Et Jacob bénit Pharaon.

8 Et Pharaon dit à Jacob : Quel âge as-tu ?

9 Jacob répondit à Pharaon : Les jours des années de mes pèlerinages sont cent trente ans ; les jours des années de ma vie ont été courts et mauvais, et n’ont point atteint les jours des années de la vie de mes pères, du temps de leurs pèlerinages.

10 Jacob donc bénit Pharaon et sortit de devant lui.

11 Et Joseph assigna une demeure à son père et à ses frères, et il leur donna une possession au pays d’Égypte, dans le meilleur endroit du pays, dans la contrée de Rahmésès, selon l’ordre qu’en avait donné Pharaon.

12 Et Joseph entretint de pain son père et ses frères, et toute la maison de son père, selon le nombre de leurs familles.

13 Or, il n’y avait point de pain dans tout le pays, car la famine était très grande ; et le pays d’Égypte et le pays de Canaan ne savaient que faire à cause de la famine.

14 Et Joseph amassa tout l’argent qu’on trouva dans le pays d’Égypte et au pays de Canaan, pour le blé qu’on achetait, et il porta cet argent à l’hôtel de Pharaon.

15 Et l’argent du pays d’Égypte et du pays de Canaan manqua. Et tous les Égyptiens vinrent à Joseph, disant : Donne-nous du pain ; et pourquoi mourrions-nous devant tes yeux, parce que l’argent a manqué ?

16 Joseph répondit : Donnez votre bétail, et je vous en donnerai pour votre bétail, puisque l’argent a manqué.

17 Alors ils amenèrent à Joseph leur bétail ; et Joseph leur donna du pain pour des chevaux, pour des troupeaux de brebis, pour des troupeaux de bœufs et pour des ânes. Ainsi il leur fournit du pain pour tous leurs troupeaux cette année-là.

18 Cette année finie, ils revinrent l’année suivante, et lui dirent : Nous ne cacherons point à mon seigneur que l’argent et les troupeaux de bêtes ont manqué ; tout est entre les mains de mon seigneur ; il ne reste rien à prendre à mon seigneur que nos corps et nos terres.

19 Pourquoi mourrions-nous devant, tes yeux ? Quant à nous et à nos terres, achète-nous, et nous et nos terres, pour du pain, et nous serons serviteurs de Pharaon, et nos terres seront à lui. Donne-nous aussi de quoi semer, afin que nous vivions et ne mourrions point, et que la terre ne soit point désolée.

20 Ainsi Joseph acquit à Pharaon toutes les terres de l’Egypte ; car les Egyptiens vendirent chacun son champ, à cause de la famine qui avait augmenté ; et la terre fut à Pharaon.

21 Et il fit passer le peuple dans les villes, depuis une extrémité de l’Egypte jusqu’à l’autre.

22 Il n’y eut que les terres des sacrificateurs que Joseph n’acquit point ; car Pharaon avait fait un établissement pour les sacrificateurs, et ils mangeaient la portion que Pharaon leur avait donnée. C’est pourquoi, ils ne vendirent point leurs terres.

23 Et Joseph dit au peuple : Je vous ai acquis aujourd’hui, vous et vos terres, à Pharaon. Voici, je vous donne de la semence, afin que vous semiez la terre.

24 Et quand le temps de la récolte viendra, vous en donnerez la cinquième partie à Pharaon, et les quatre autres seront à vous pour semer les champs, et pour votre nourriture et pour celle de ceux qui sont dans vos maisons, et de vos petits-enfants.

25 Et ils dirent : Tu nous as sauvé la vie ; que nous trouvions seulement grâce envers toi, mon seigneur, et nous serons esclaves de Pharaon.

26 Et Joseph fit une loi qui dure jusqu’à ce jour, sur les terres d’Egypte, de payer à Pharaon la cinquième partie. Il n’y eut que les terres des sacrificateurs qui ne furent point à Pharaon.

27 Israël donc habita au pays d’Egypte, en la contrée de Gosçen, et ils en jouirent, et s’accrurent, et ils multiplièrent beaucoup.

28 Et Jacob vécut au pays d’Egypte dix-sept ans. Et les années de la vie de Jacob furent cent quarante-sept ans.

29 Or, le temps de la mort d’Israël approchant, il appela Joseph son fils, et lui dit : Je te prie, si j’ai trouvé grâce envers toi, mets présentement ta main sous ma cuisse, et jure-moi que tu me feras une faveur, et que tu me tiendras parole. Je te prie, ne m’enterre point en Egypte ;

30 Mais que je dorme avec mes pères. Tu me transporteras donc d’Egypte, et tu m’enterreras dans leur sépulcre. Et il répondit : Je ferai selon ta parole.

31 Et il dit : Jure-le-moi. Et il le lui jura. Et Israël se prosterna sur le chevet du lit.

REFLEXIONS

Il faut considérer dans ce chapitre :

I. La manière favorable dont Pharaon reçut Jacob et sa famille, en quoi l’on voit des marques de la bénédiction qui accompagnait Jacob et comment Dieu fléchit le cœur des rois en faveur de ceux qu’il aime.

II. L’ordre avec lequel Joseph distribua du blé aux Égyptiens pendant la famine marque sa prudence et il fit aussi paraître sa bonté et son équité en leur laissant la récolte de leurs terres après avoir réservé la cinquième partie pour le roi.

Cependant, cet exemple n’autorise point ceux qui gouvernent à fouler les peuples, ni à rien faire surtout dans des temps de disette qui soit contraire à la justice et à l'équité.

III. Le désir qu’eut Jacob d’être enseveli au pays de Canaan est une belle preuve de la foi qu’il avait en Dieu et de l'assurance dans laquelle il mourrait que Dieu donnerait ce pays-là à sa postérité.
C’est ainsi que les fidèles vivent et meurent dans une espérance ferme que Dieu ne manquera pas d’accomplir, même après leur mort les promesses qu'il leur a faites.

CHAPITRE XLVIII.

Jacob étant malade à mort bénit Éphraïm et Manassé, les deux fils de Joseph, en préférant Éphraïm qui était le cadet à Manassé qui était l'aîné. Il prédit aussi que Dieu retirerait les enfants d'Israël d'Égypte et qu’il les ferait retourner au pays de Canaan.

1 Or il arriva, après ces choses, qu’on vint dire à Joseph : Voici, ton père est malade. Alors il prit ses deux fils avec soi, Manassé et Ephraïm.

2 On le fit savoir à Jacob, et on lui dit : Voici Joseph ton fils qui vient vers toi. Alors Israël reprenant ses forces s’assit sur le lit.

3 Et Jacob dit à Joseph : Le Dieu fort, tout-puissant, s’est apparu à moi à Luz, au pays de Canaan, et m’a béni.

4 Et il m’a dit : Voici, je te ferai croître et multiplier, je te ferai devenir une assemblée de peuples, et je donnerai ce pays à ta postérité après toi, en possession perpétuelle.

5 Or maintenant, les deux enfants qui te sont nés au pays d’Egypte, avant que je vinsse ici vers toi, sont à moi. Ephraïm et Manassé seront miens, comme Ruben et Siméon.

6 Mais les enfants que tu auras après eux seront à toi, et ils porteront le nom de leurs frères dans leur héritage.

7 Or, quand je revenais de Paddan, je perdis Rachel, qui mourut au pays de Canaan en chemin, n’y ayant plus que quelque petit espace de pays pour venir à Ephrat, et je l’enterrai là sur le chemin d’Ephrat, qui est Bethléhem.

8 Et Israël vit les fils de Joseph, et dit : Qui sont ceux-ci ?

9 Et Joseph répondit à son père : Ce sont mes fils, que Dieu m’a donnés ici. Alors il dit: Amène-les-moi, je te prie, afin que je les bénisse.

10 Or, les yeux d’Israël étaient si appesantis à cause de sa vieillesse, qu’il ne pouvait voir. Et il les fit approcher de lui, et il les baisa et les embrassa.

11 Et Israël dit à Joseph : Je ne croyais plus voir ton visage, et voici, Dieu m’a fait voir et toi et ta famille aussi.

12 Et Joseph les retira d’entre les genoux de son père, et il se prosterna le visage en terre.

13 Joseph donc les prit tous deux, Ephraïm à sa droite, à la gauche d’Israël, et Manassé à sa gauche, à la droite d’Israël, et les fit approcher de lui.

14 Et Israël avança sa main droite et la mit sur la tête d’Ephraïm, qui était le cadet, et il mit sa main gauche sur la tête de Manassé. Il posa ainsi ses mains de propos délibéré, bien que Manassé fût l’aîné.

15 Et il bénit Joseph, disant : Que le Dieu, devant la face duquel mes pères Abraham et Isaac ont marché, le Dieu qui me nourrit depuis que je suis au monde jusqu’à ce jour ;

16 que l’ange qui m’a délivré de tout mal, bénisse ces enfants, et qu’ils portent mon nom et le nom de mes pères Abraham et Isaac, et qu’ils multiplient, très abondamment sur la terre !

17 Alors Joseph voyant que son père mettait sa main droite sur la tête d’Ephraïm, en eut du déplaisir, et soutenant la main de son père, il tâcha de la lever de dessus la tête d’Ephraïm, pour la mettre sur la tête de Manassé.

18 Et Joseph dit à son père : Ce n’est pas ainsi, mon père ; car celui-ci est l’aîné ; mets ta main droite sur sa tête.

19 Mais son père refusa de le faire, disant : Je le sais bien, mon fils, je le sais bien. Celui-ci deviendra aussi un peuple, et même il sera grand, mais toutefois son frère, qui est le cadet, sera plus grand que lui, et sa postérité sera une multitude de nations.

20 Et en ce jour-là il les bénit, et dit : Israël bénira en toi, disant : Dieu te fasse comme à Ephraïm et à Manassé ! Ainsi il mit Ephraïm devant Manassé.

21 Et Israël dit à Joseph : Voici, je m’en vais mourir, mais Dieu sera avec vous, et vous fera retourner au pays de vos pères.

22 Et je te donne, de plus qu’à tes frères, cette part de mon bien que j’ai gagnée avec mon épée et mon arc, sur les Amorrhéens.

REFLEXIONS
Les derniers discours que Jacob tint à Joseph avant que de mourir sont très édifiants. On y découvre une foi et une piété ardente, une vive reconnaissance pour toutes les grâces qu'il avait reçues de Dieu aussi bien qu'une grande tendresse pour Joseph. Le désir qu'eut Jacob de bénir les enfants de Joseph et l'excellente prière par laquelle il les recommanda à Dieu montre qu'il regardait la bénédiction céleste comme la source de tout le bonheur de ses enfants, ce qui est un bel exemple pour les mourants et particulièrement pour les pères de famille qui sont près de leur fin. La préférence que Jacob donna par une inspiration divine à Éphraïm qui était le cadet sur Manassé qui était l'aîné fait voir que Dieu accorde ses faveurs à qui il plaît et qu'il le fait cependant toujours avec sagesse, avec justice et avec bonté. Au reste cette bénédiction de Jacob eut son accomplissement, la tribu d'Éphraïm ayant été puissante dans la suite et ayant même donné le nom aux dix tribus d'Israël.

CHAPITRE XLIX.

Ce sont ici les derniers discours de Jacob dans lesquels il prédit ce qui arriverait à ses douze fils et à leur postérité. Il réitère ensuite les ordres qu’il avait donnés à Joseph de l'ensevelir au pays de Canaan et il meurt.

1 Et Jacob appela ses fils, et dit : Assemblez-vous et je vous déclarerai ce qui vous doit arriver aux derniers jours.

2 Assemblez-vous et écoutez, fils de Jacob, écoutez, dis-je, Israël votre père :

3 RUBEN, tu es mon premier-né, ma force, et le commencement de ma vigueur, grand en dignité et grand en force.

4 Tu t’es débordé comme l’eau ; tu n’auras point la prééminence, car tu es monté sur la couche de ton père, et tu as souillé mon lit en y montant.

5 SIMÉON et LÉVI sont frères, instruments de violence dans leurs demeures ;

6 que mon âme n’entre point dans leur conseil secret ; que ma gloire ne soit point jointe à leur assemblée ; car ils ont tué les gens en leur colère, et ils ont enlevé des bœufs pour leur plaisir.

7 Que leur colère soit maudite, car elle a été violente ; et leur fureur, car elle a été rude ! Je les diviserai en Jacob, et les disperserai en Israël.

8 JUDA, quant à toi, tes frères te loueront ; ta main sera sur le cou de tes ennemis ; les fils de ton père se prosterneront devant toi.

9 Juda est un jeune lion ; mon fils, tu es revenu de déchirer ta proie ; il s’est courbé, et s’est couché comme un lion qui est en sa force, et comme un vieux lion ; qui le réveillera ?

10 Le sceptre ne sera point ôté de Juda, ni le législateur d’entre ses pieds, jusqu’à ce que le Scilo vienne ; et c’est à lui qu’appartient l’assemblée des peuples ;

11 il attache à la vigne son ânon, et le petit de son ânesse à un fort bon cep ; il lavera son vêtement dans le vin, et son manteau dans le sang des raisins ;

12 il a les yeux vermeils de vin, et les dents blanches de lait.

13 ZABULON se logera au port des mers, et il sera au port des navires, et ses côtés s’étendront vers Sidon.

14 ISSACAR est un âne gros et fort, qui se tient couché entre les barres des étables.

15 Il a vu que le repos était bon, et que le pays était délicieux ; il baissera son épaule pour porter, et il s’assujettira à payer les tributs.

16 DAN jugera son peuple, aussi bien que les autres tribus d’Israël.

17 Dan sera un serpent sur le chemin, et un céraste dans le sentier, mordant les paturons du cheval, afin que celui qui le monte, tombe à la renverse.

18 O Eternel ! j’ai attendu ton salut.

19 Quant à GAD, des troupes viendront le ravager ; mais aussi il ravagera à la fin.

20 Le pain qui viendra d’ASCER sera excellent, et même il fournira les délices royales.

21 NEPHTHALI est une biche lâchée ; il fait de beaux discours.

22 JOSEPH est un rameau fertile, un rameau fertile près d’une fontaine ; ses branches ont couvert la muraille.

23 On lui a donné beaucoup d’amertume, on a tiré contre lui, et les archers ont été ses ennemis ;

24 mais son arc est demeuré en sa force, et ses bras et ses mains ont été renforcés par la main du Puissant de Jacob, qui l’a aussi fait être le pasteur et la pierre d’Israël.

25 Cela est procédé du Dieu fort de ton père, qui t’aidera, et du Tout-Puissant, qui te comblera des bénédictions des cieux en haut, des bénédictions de l’abîme en bas, des bénédictions du lait des mamelles, et de la matrice.

26 Les bénédictions de ton père ont surpassé les bénédictions de ceux qui m’ont engendré, quand on remonterait jusqu’au bout des collines éternelles ; elles seront sur la tête de Joseph, et sur le sommet de la tête de celui qui est Nazarien entre ses frères.

27 BENJAMIN est un loup qui déchirera ; au matin il dévorera la proie, et sur le soir il partagera le butin.

28 Ce sont là les douze tribus d’Israël, et c’est ce que leur dit leur père en les bénissant ; il bénit chacun d’eux de la bénédiction qui lui était propre.

29 Il leur fit aussi ce commandement, et leur dit : Je m’en vais être recueilli vers mon peuple ; enterrez-moi avec mes pères dans la caverne qui est au champ d’Héphron Héthien,

30 dans la caverne qui est au champ de Macpéla, qui est vis-à-vis de Mamré, au pays de Canaan, laquelle Abraham acquit d’Héphron Héthien avec le champ, pour le posséder comme le lieu de son sépulcre.

31 C’est là qu’on a enterré Abraham avec Sara sa femme ; c’est là qu’on a enterré Isaac et Rébecca sa femme ; c’est là que j’ai enterré Léa.

32 On a acquis des Héthiens le champ, et la caverne qui y est.

33 Et quand Jacob eut achevé de donner ses ordres à ses fils, il retira ses pieds au lit, et expira ; ainsi il fut recueilli vers ses peuples.

REFLEXIONS
Il y a quatre choses à remarquer dans les dernières paroles de Jacob :

I. On voit premièrement dans les vœux qu’il fait pour ses fils et dans les bénédictions qu’il leur donne sa tendresse pour eux, cependant on remarque que comme un père sage il reproche à quelques-uns d’entre eux les méchantes actions dont ils s’étaient rendus coupables.

II. Ce patriarche fait paraître ici sa grande piété envers Dieu et la ferme espérance qu’il avait en lui, même aux approches de la mort.

III. Il prédit ce qui devait arriver dans la suite aux douze tribus, mais la plus considérable de ces prédictions est celle qui regarde la tribu de Juda et qui porte : que le sceptre ne serait point ôté de Juda jusqu’à ce que le Scilo vînt. C’est là un oracle qui se rapporte au Messie et qui désigne le temps de sa venue.

IV. Enfin les ordres que Jacob donna encore une fois à ses fils de l'enterrer au pays de Canaan montrent qu'il mourrait dans une ferme persuasion que sa postérité habiterait dans ce pays-là et le posséderait et que les promesses que Dieu lui avait faites s’accompliraient infailliblement.

CHAPITRE L.

Moïse récite trois choses :

I. Comment Joseph alla ensevelir son père au pays de Canaan.

II. La prière que ses frères lui firent de leur pardonner ce qu’ils avaient fait autrefois contre lui et ce que Joseph répondit à cette prière.

III. La mort de Joseph.

1 Alors Joseph se jeta sur la face de son père, et pleura sur lui, et le baisa.

2 Et Joseph commanda aux médecins qu’il avait à son service d’embaumer son père ; et les médecins embaumèrent Israël.

3 Et on employa quarante jours à l’embaumer ; car c’était la coutume d’embaumer les corps pendant quarante jours. Et les Egyptiens en firent le deuil soixante et dix jours.

4 Or, le temps du deuil étant passé, Joseph parla à ceux qui étaient de la maison de Pharaon, disant : Je vous prie, si j’ai trouvé grâce envers vous, faites savoir ceci à Pharaon,

5 Que mon père m’a fait jurer, et m’a dit : Voici, je m’en vais mourir ; tu m’enseveliras dans le sépulcre que je me suis acquis au pays de Canaan. Maintenant donc, je te prie, que j’y monte, et que j’y enterre mon père, et je reviendrai.

6 Et Pharaon répondit : Monte, et ensevelis ton père, comme il t’y a engagé par serment.

7 Alors Joseph monta pour enterrer son père ; et les serviteurs de Pharaon, les anciens de la maison de Pharaon, et tous les anciens du pays d’Égypte montèrent avec lui.

8 Et toute la maison de Joseph et ses frères, et la maison de son père y montèrent aussi, laissant seulement leurs petits-enfants, et leurs troupeaux, et leurs bœufs, dans la terre de Gosçen.

9 Il eut aussi avec lui des chariots et des gens de cheval, tellement qu’il y eut un fort gros camp.

10 Et lorsqu’ils furent venus à l’aire d’Atad, qui est au-delà du Jourdain, ils firent de fort grandes et extraordinaires lamentations ; et Joseph pleura son père pendant sept jours.

11 Et les Cananéens, habitants du pays, voyant ce deuil dans l’aire d’Atad, dirent : Voilà un grand deuil parmi les Égyptiens. C’est pourquoi l’aire fut nommée Abel-Mitsraïm. Elle est au-delà du Jourdain.

12 Les fils donc de Jacob accomplirent ainsi ce qu’il leur avait commandé.

13 Car ses fils le transportèrent au pays de Canaan, et l’ensevelirent dans la caverne du champ de Macpéla, vis-à-vis de Mamré, laquelle Abraham avait acquise d’Héphron Héthien avec le champ, pour le posséder comme le lieu de son sépulcre.

14 Et après que Joseph eut enseveli son père, il retourna en Égypte avec ses frères et tous ceux qui étaient montés avec lui pour enterrer son père.

15 Mais les frères de Joseph voyant que leur père était mort, dirent entre eux : Peut-être que Joseph aura de la haine contre nous, et ne manquera point de nous rendre tout le mal que nous lui avons fait.

16 C’est pourquoi, ils envoyèrent dire à Joseph : Ton père, avant que de mourir, nous a fait ce commandement :

17 Vous parlerez ainsi à Joseph : Je te prie, pardonne maintenant à tes frères leur crime et leur péché ; car ils t’ont fait du mal. Or, maintenant, je te supplie, Pardonne cette iniquité aux serviteurs du Dieu de ton père. Mais Joseph pleura quand on lui fit ce discours.

18 Et ses frères étant venus vers lui, se jetèrent à ses pieds, et lui dirent : Voici, nous sommes tes serviteurs.

19 Et Joseph leur dit : Ne craignez point ; car suis-je en la place de Dieu ?

20 Vous aviez dessein de me faire du mal ; mais Dieu a pensé en bien, pour me faire ce que vous voyez maintenant, et conserver par mon moyen la vie à un grand peuple.

21 Ne craignez donc point maintenant ; je vous entretiendrai, vous et vos familles. Et il les consola et leur parla selon leur cœur.

22 Joseph donc demeura dans l’Égypte, lui et la maison de son père, et il vécut cent et dix ans.

23 Et Joseph vit les enfants d’Ephraïm jusqu’à la troisième génération. Makir aussi, fils de Manassé, eut des enfants qui furent élevés sur les genoux de Joseph.

24 Joseph dit ensuite à ses frères : Je m’en vais mourir, et Dieu ne manquera point de vous visiter, et il vous fera remonter de ce pays, au pays qu’il a juré de donner à Abraham, à Isaac et à Jacob.

25 Et Joseph fit jurer les enfants d’Israël, et leur dit : Certainement Dieu vous visitera ; et alors vous transporterez mes os d’ici.

26 Puis Joseph mourut, âgé de cent et dix ans ; et on l’embauma, et on le mit dans un cercueil en Égypte.

 REFLEXIONS
I. Le soin qu'eut Joseph d'ensevelir Jacob au pays de Canaan est une marque de son obéissance aux volontés de son père aussi bien que de sa piété et de la persuasion qu'il avait que les enfants d'Israël retourneraient dans ce pays-là.

II. La prière que ses frères lui firent de leur pardonner nous fait voir que les personnes coupables sont toujours en crainte, même longtemps après leur péché et la manière pleine de bonté et de piété dont Joseph répondit à cette prière nous met devant les yeux un rare et touchant exemple de piété, de clémence et de douceur qui doit faire bien de l'impression sur nous.

III. Ce que Moïse rapporte dans ce chapitre nous apprend que Dieu fit parvenir Joseph à une vieillesse heureuse et avancée, qu'il lui fit voir la prospérité de sa famille et que pour quelques années d'affliction qu'il avait eues en sa jeunesse, il lui accorda une longue et constante prospérité. Voilà comment le Seigneur après avoir exercé ses enfants par diverses épreuves leur accorde de la tranquillité et du repos et enfin la grâce d'une mort heureuse en attendant qu'il récompense leur foi et leur piété dans la vie à venir.

IV. Enfin il faut rappeler ici la réflexion que St. Paul fait sur la mort de Joseph lorsqu'il dit dans l'épitre aux Hébreux : Que ce fut par la foi que Joseph mourant ordonna que ses os fussent transportés au pays de Canaan. Cela marquait qu'il mourait dans la ferme persuasion que les enfants d'Israël sortiraient d'Égypte et qu'ils posséderaient ce pays que Dieu avait promis à leurs pères. C'est ainsi que les promesses de Dieu soutiennent les fidèles et dans la vie et dans la mort.